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 What do I do because of you ?

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Mizeria K. Balogh
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Mizeria K. Balogh

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MessageSujet: What do I do because of you ?    What do I do because of you ?  EmptyMar 17 Juil - 20:29

What do I do with you?
I look at you and I think of you even more


Cela faisait à peine quelques jours que Mizeria et Rai avaient enfin quittés le quartier général des Auditore… Il leur avait fallu du temps à tous les deux pour se remettre. Leur convalescence restait cependant raisonnable, ils étaient restés calmes quelques jours mais cela avait paru une éternité à la blondinette. Et pour cause, elle était restée dans le noir complet tout ce temps. Les ordres et conseils de Julia étaient clairs, il fallait un repos total à ses yeux. Si dans les premiers temps, elle avait songé en faire qu’à sa tête comme elle savait si bien le faire, elle n’en fit finalement rien. La gardienne du soleil avait été suffisamment convaincante et avait réussi à lui faire assez peur pour qu’elle craigne que ses mauvais présages ne se retrouvent véridiques. Devenir aveugle semblait être devenu sa plus grosse hantise, si bien qu’elle s’était tenue à carreau. Un autre facteur avait énormément joué également : elle ne voulait pas inquiéter Rai. Le pauvre semblait avoir déjà bien paniqué quand elle avait perdu connaissance selon ce qui lui avait raconté Julia, ou plutôt selon les piques qu’elle avait adressés au brun pour l’embêter au mieux une fois que les deux étaient plus reposés.  Mizeria avait donc veillé à la suite de cet accident à ne pas rajouter d’inquiétudes à sa moitié, il fallait qu’il se concentre sur lui avant tout. Ils avaient donc passé les premiers jours dans son appartement à dormir la plupart du temps... Elle ignorait qu’elle en avait tant besoin. Cela avait été comme si elle n’avait pas dormi depuis des années. Même son corps sembla faire des siennes dans les premiers temps, comme trop faible pour faire quoi que ce soit d’autre. Doucement mais surement, elle reprit du poil de la bête et ce au même titre que son amant. Si elle veilla à ne pas être un poids pour lui, elle ne perdit pas une miette de son rétablissement. Elle n’avait pas oublié à quel point il avait été inconscient en son absence. Peut-être s’était-elle donc un brin montrée maternelle avec lui. Certes, elle avait tâché de camoufler ça au mieux, réclamant par exemple de dormir dans ses bras pour être sûr que ce dernier se repose suffisamment et trouve le sommeil s’il en avait besoin.

Ils avaient été comme collés depuis qu’elle l’avait retrouvé, comme s’ils ne s’étaient pas vus depuis des années. Néanmoins, ils n’avaient pas eu la fougue qu’ils avaient eu auparavant. Ils avaient été tout d’abord trop fatigués, puis leur intimité semblait n’être qu’une douce illusion. Les Auditore s’étaient avérés curieux de leur relation, peut-être même trop… Et elle n’était pas folle, ils avaient été surveillés à leur insu constamment. Même Julia semblait vouloir en savoir plus à chaque fois qu’elle les soignait. Mizeria pour sa part resta quelque peu vague mais ne l’envoya pas balader... Elle avait l’impression que concernant l’autre jeune femme, il y avait vraiment une volonté d’en savoir plus par simple curiosité. Elle s’était également assez bien accordée avec elle, sans oublier de lui faire lever les bras au ciel évidemment par son inconscience et irresponsabilité coutumières, mais elles s’étaient assez bien trouvées pour embêter au mieux le Nagafuse. Bien sûr ils avaient été moins passionnés mais aussi moins complices, la blonde avait taché de rester dans ses habitudes pour embêter son partenaire mais elle avait été quand même relativement calme et sage. C’était presque comme si elle s’était trouvée en mode off quelques jours. Et pour cause, son esprit ne cessait de se torturer sur la situation dans laquelle elle venait de s’aventurer. Inquiète et incertaine, elle n’avait cessé de penser à toutes les options et d’essayer de faire les meilleurs choix… Au final, jamais elle n’avait semblé si calme et réfléchie, elle était presque trop sage par rapport à d’habitude. Rajoutant à cela son incroyable fatigue, c’était comme si elle n’était plus la même pendant plusieurs jours.

La Mizeria que Rai connaissait désormais surement presque par cœur, ne refit apparition qu’au moment où on lui laissa choisir qui des otages pouvait quitter les geôles Auditore en premier et elle se revigora encore plus quand ils purent partir où ils le souhaitaient pour quelques temps. Concernant la libération du premier Leone, Mizeria y avait réfléchit longuement et intelligemment. Elle avait un plan mais elle ignorait encore qui se retrouvaient captifs... Son plan était donc resté bancal pendant un long moment, elle tacha quand même de peaufiner les moindres détails. Quel ne fut pas son soulagement quand elle se retrouva face à tous les Leone et qu’elle sut enfin qui avaient été attrapés. Elle ne put les voir mais les noms et les voix lui suffirent amplement. Sans hésitation son choix se porta sur Thomas… Plus d’une fois elle s’était entrainée avec lui et avait à plusieurs occasions discutés. Ils ne se connaissaient pas personnellement mais c’était celui avec lequel elle avait eu le plus de contact… Rien qu’en échangeant de la sorte il devait savoir comment elle était réellement, il aurait plus confiance en elle que les autres. Du moins c’était ce qu’elle espérait. Elle avait prétexté que Thomas avait plus de famille que les autres pour le faire libérer, ce qui étonna tout le monde. D’une part les Auditore qui ne semblaient réellement pas affectés par ce détail, et d’une autre les Leone qui étaient eux au courant que ce n’était pas véritablement le cas… Mais ils ne vendirent pas la mèche. Son esprit se détendit déjà sur ce point, ils avaient vu clair dans son mensonge... Ils pouvaient donc imaginer qu’elle mentait également avec sa nouvelle famille, ils avaient confiance. Une fois cela fait, elle les laissa la traiter de tous les noms, les remerciant même intérieurement. Ils lui assuraient une meilleure couverture et elle les ignora difficilement, ayant bizarrement envie de les remercier du fond du cœur malgré la gravité des propos qu’ils lui lançaient. Ne restait plus que laisser partir Thomas et lui glisser un message… L’idée du message était simple et rapide, mais elle devait passer inaperçu. Par chance, elle n’avait pas oublié ce cher Matthew… Ses paroles furent donc très simples, elle demanda au jeune homme d’avertir son ami qu’elle ne rentrerait pas, qu’il n’attende peut être plus bêtement à l’appartement son retour. Elle lui demanda ensuite de l’excuser auprès de lui, mais ce d’une manière particulière. Elle rajouta qu’il fallait qu’il la pardonne, qu’elle ne pourrait finalement pas lui donner la fameuse recette de sa mère pour la copine dont il lui avait parlé.

A partir de ce moment-là, Thomas fut relâché et il ne lui resta plus qu’à espérer… A croire en lui, qu’il fasse la transmission à Matthew, à prier que ce dernier comprenne qu’elle parlait de Mitsuki de manière indirecte puisqu’il lui avait promis d’avertir les Leone si elle ne revenait pas, et il n’avait jamais eu l’occasion de croiser sa boss. La suite n’était que supposition également, mais elle ne pouvait pas faire mieux… Matthew rencontrerait peut-être Mitsuki, aborderait ce qu’il s’était passé, ce qu’il savait et par grande chance parlerait de cette histoire de recette familiale. Mitsuki alors de son côté comprendrait sans mal. Parler de leurs mères avait toujours été un moyen de s’avertir et de faire comprendre que, malgré tout, la situation était sous contrôle. Combien de fois avait-elle été en mauvaise posture et avait-elle du avertir la rose ? Trop de fois. Et à chaque fois leur code secret pour se rassurer et s’avertir avait été d’évoquer leurs mères. Sa mère… Elle la pria d’ailleurs plus d’une fois de lui venir en aide, de veiller à ce que tout son plan, ses suppositions, les réactions en chaine qu’elle espérait, arrivent. Il n’y avait plus de dieu dans l’histoire, juste le destin… Et les dés étaient lancés. Désormais il lui fallait se faire une raison, elle n’était plus une Leone mais une Auditore…

Néanmoins, elle fut plus que soulagée quand ils purent quitter Venise et partir quelques jours uniquement que tous les deux. Sa nouvelle famille pouvait bien attendre… Toujours emprunte de nostalgie et cherchant du réconfort, elle avait demandé à Rai qu’ils puissent partir en Angleterre. Le reste n’avait été que formalités... Ils partirent pour son pays natal en paix, avec l’accord plus qu’appréciable de Symphony. La seule chose qui la dérangea dans l’entreprise fut sa vue. Julia lui avait recommandé, si ce n’était encore une fois ordonné, de garder son bandeau et donc ses yeux au repos encore quelques jours… Il lui restait donc une bonne semaine à tirer quand ils partirent. Sagement mais avec énormément de mal et de réticence, elle écouta… Elle enchainait désormais les premières en très peu de temps, et surtout elle prenait beaucoup sur elle. Elle avait dû s’en remettre au brun pour la guider et pour veiller sur elle, tout comme elle avait dû finalement rester calme et au repos une fois arrivée. Elle avait la bougeotte, sa fatigue était globalement passée, il lui fallait désormais bouger et profiter. D’autant plus si le quartier général et ses maudits Auditore étaient loin. Oui, dès l’arrivée en Angleterre l’ex Leone sembla reprendre du poil de la bête. Elle était tellement plus en forme physiquement et mentalement parlant avec tous les poids qui lui avaient été enlevés malgré leurs incertitudes, qu’elle ne tenait pas en place.

C’est donc au matin du troisième jour, qu’elle émergea dans le lit qui était désormais le leur pour les jours à venir, et qu’elle chercha Rai sans le trouver. A tâtons, elle avait parcouru tout le lit, rien… Elle l’avait appelé tout aussi doucement, aucune réponse. Elle ne s’inquiéta pas plus malgré tout, ils étaient loin de leurs soucis… Néanmoins, elle avait envie voire besoin de le trouver. Elle voulait revenir à la normale, surtout désormais qu’elle assimilait qu’ils étaient hors de danger et pouvaient pleinement profiter de tout. N’écoutant que son courage, la mafieuse se leva, elle souffla un coup pour se donner du courage et se lança. Toujours en tâtonnant, elle alla jusqu’au mur et y chercha la porte qu’elle trouva. Premier bon point... Elle passa cette dernière et emprunta le couloir, se guidant à son sens de l’orientation et aux souvenirs du chemin que Rai lui faisait emprunter. Elle parcourut quelques mètres avant de rencontrer une commode. Elle jura en se frottant la hanche et en maudissant le pauvre meuble qui n’avait jamais fait exprès de se trouver sur sa route. Un soupir s’échappa de ses lèvres et elle maudit sa condition de plus belle.. Elle en avait marre. Seulement, il lui sembla arriver à un point de non-retour à ce point précis. Sans réfléchir d’avantage, elle enleva le bandage, se moquant bien de le garder autant de temps que l'avait dit Julia, et ferma immédiatement les yeux. Il faisait décidément trop jour pour elle... Surtout après qu’elle soit resté si longtemps dans le noir et l’obscurité la plus totale que lui avait conféré ce maudit bandage. La jeune femme prit son temps, ouvrant doucement les yeux, s’habituant à la luminosité et prenant conscience petit à petit de son environnement tout en continuant d’avancer. Elle discernait désormais sans mal les obstacles, qu’elle évita parfaitement par la suite. Ses yeux allaient, c’était encore douloureux mais supportable. Sans attendre, elle accéléra le pas pour déboucher dans le salon. Elle y trouva enfin le brun, sur qui, sans réfléchir d’avantage, elle se précipita. En quelques pas et quelques secondes, elle se jeta à son cou presque comme un enfant. Elle en oublia même la pauvre jambe du brun, qui elle espérait, devait être totalement, ou en voie de l’être, guérie.

Ses bras enlacèrent ses épaules et sa nuque, ses pieds se décolèrent quelque peu du sol, si ce ne fut pas totalement pendant un court instant. Un rire des plus sincère et joyeux s’échappa de ses lèvres et elle enfouit dès lors son visage au creux du cou du brun.

« Je te vois. Clairement. Je te vois enfin vraiment ... »


Pourquoi riait-elle comme une enfant ? Elle en ignorait la réelle raison… Elle pouvait pourtant assurer sans aucun doute qu’elle était plus heureuse que jamais. Même s’ils avaient été inséparables pendant des jours, elle avait l’impression d’enfin le retrouver. Les traits du brun lui avaient terriblement manqués, elle n’avait pas eu l’occasion de le discerner parfaitement depuis ce qui lui semblait être des lustres. Si elle sortit la tête de son cou, ce ne fut que pour embrasser ce dernier, suivie de sa joue et enfin de ses lèvres, et ce sans chercher à tâtons. Elle le relâcha juste quelque peu, pour enfin poser ses deux pieds au sol et le regarder face à face, profitant pleinement et de tout son soul de sa beauté. C’était encore légèrement flou, il fallait l’avouer, mais terriblement plus net et clair, plus revigorant. Un sourire dont elle seule avait le secret se plaça sur ses lèvres. Enfin, elle avait l’impression de se retrouver et de redevenir entière, de redevenir celle qu’il connaissait, d’être sienne à nouveau.

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Rai Nagafuse
Auditore
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MessageSujet: Re: What do I do because of you ?    What do I do because of you ?  EmptyMer 18 Juil - 14:08



Dans les yeux de la vérité.



L'Angleterre. C'était le refuge qu'ils s'étaient octroyés. Celui vers lequel Mizeria les avait entraîné dès lors qu'on leur avait rendu un tant soit peu de liberté... Et c'était un changement d'air pour le moins bienvenu. Rai n'avait plus voyagé à l'extérieur de l'Italie depuis des lustres : depuis la Hongrie, en fait, si ses souvenirs ne lui jouaient aucun tour. Autant dire que ce dépaysement lui convenait d'autant plus pleinement qu'il savait qu'il n'aboutirait probablement pas à une rencontre avec un fou furieux en puissance, accablé d'une vanité effarante ou d'un sadisme infernal. Le couple avait bien assez souffert, jusqu'à présent... Et puis, se savoir aussi éloignés de Venise avait de quoi le rassurer, psychologiquement parlant... Ce n'était pas ici que Mephisto allait pouvoir retrouver leur trace, en tout cas pas du jour au lendemain, et les Auditore n'avaient certainement pas eu le temps de préparer le terrain avant leur arrivée. En d'autres termes ? Une sensation de liberté l'ébranlait, comme cela n'avait que trop rarement été le cas. Celle-ci s'éterniserait-elle ? Il l'espérait, ardemment. S'il lui semblait qu'ils n'avaient jamais été aussi proches et intimes, lui et Mizeria, il devait néanmoins reconnaître que la tension perpétuelle qui avait trôné sur leurs épaules conjointes avait été proprement inconfortable... Certes, ils étaient là, indéfectibles et fidèles comme jamais, l'un envers l'autre, mais ce n'était une source de réconfort que relative qui s'atténuait au fil des jours. Le Nagafuse ne s'était jamais senti aussi puissant et invulnérable qu'aux côtés de sa belle... Mais il ne pouvait, en contre-partie, s'empêcher de craindre pour elle. Et si les Auditores étaient pris d'un désir sanguin et impulsif de l'ériger en exemple ? De l'utiliser comme d'un otage de qualité afin d'attirer d'autres Leones dans un piège grossier ? Ou simplement de la faire souffrir, de lui graver dans la chaire son appartenance à leur famille odieuse et exécrable ? Symphony et Alda tenaient les rênes d'une main intraitable, certes, mais cela n'empêchait pas nécessairement les écarts : les conduites des précédents gardiens du désert et de la brume en étaient des preuves substantielles. Et si une petite frappe décidait d'user de sa force pour la torturer... Ou pire ? Le noiraud, pas forcément adroit et robuste en temps normal, n'était de surcroît pour l'heure réduit qu'à l'ombre de lui-même. Une appréhension sourde l'avait donc habitée, et ce jusqu'à leur grand départ, qui lui permit de souffler une grande part de son anxiété d'un coup d'un seul.

Sa jambe, petit-à-petit, se remit de la blessure cinglante qui l'avait lacérée jusqu'à présent. Le muscle avait été touché, mais l'estafilade s'était résorbée grâce aux bons soins de Julia et grâce à l'efficacité de sa flamme. Les Auditores étaient peut-être un troupeau de criminels notoires et de crapules de la pire engeance, mais ils n'en étaient pas moins doués d'une expertise fascinante dans leurs domaines respectifs... La doctoresse semblait par ailleurs s'être liée d'amitié avec Mizeria. Dans la mesure du possible, en tout cas : sans doute les deux jeunes femmes ne seraient-elles jamais réellement proches l'une de l'autre... Et c'était pour le mieux. Si la gardienne du soleil n'était clairement pas celle de ses collègues que le mafieux abhorrait le plus, elle n'en était pas moins une femme qu'il valait mieux tenir à l’œil et surveiller de près...
La convalescence, donc, s'était bien déroulée. Tant et si bien que ce matin-ci, il avait été capable de se déplacer sans peine : il s'était rendu sans plus tarder au salon où il s'était affalé dans un fauteuil, sans faire de bruit afin de ne pas troubler le repos que sa chère et tendre méritait dûment. Un livre dans les mains, il avait fait de son mieux pour éviter de laisser ses pensées vagabonder trop hardiment, sans réellement y parvenir. Toute cette histoire continuait à l'obnubiler car il ne savait que trop bien que, lorsqu'ils seraient de retour, ils auraient tout le poids de cette affaire sur le dos et qu'ils devraient tâcher de la remplir avec autant de brio et d'efficacité que possible. La bague ridicule et misérable qui brillait à son annulaire n'allait probablement pas l'y aider beaucoup : c'était l'anneau d'une petite frappe, d'un soldat de bas étage, et les pouvoirs qu'il octroyait n'allaient pas lui permettre d'aller bien loin... Pourtant, il craignait que Mephisto ne s'annonce pas, lorsqu'il se déciderait enfin à passer à la riposte : autrement dit, le noiraud allait devoir faire de son mieux pour acquérir un anneau de meilleur qualité en temps et en heure... Ou allait simplement devoir convaincre Symphony de lui rendre le sien. Autant dire qu'il avait du pain sur la planche, et de quoi accaparer ses songes pendant de longs jours...

Fut-ce pour cela qu'il n'entendit pas l'appel de son amante ? Possible. Le résultat fut le même, dans tous les cas : il ne fut confronté à son arrivée imminente qu'à partir du moment où il l'entendit et où il remarqua sa silhouette, à quelques mètres de lui seulement. La première chose qui lui sauta aux yeux, c'était qu'elle avait ôté son bandage. Il s'apprêta à la rabrouer, l'air courroucé, en se redressant prestement, lorsqu'il se rendit compte qu'elle avait l'air étonnamment émerveillée. Il ne pipa mot, effaré, et fut soudain la cible d'une charge à la fois espiègle et tendre face à laquelle il ne chercha guère à se soustraire. Au contraire, il lâcha lourdement le livre qu'il tenait jusqu'à présent et tendit les bras mécaniquement, son corps réagissant à la place de son cerveau face à l'objet de tous ses désirs. Il l'attrapa et lui rendit son étreinte avant de remarquer son éclat de rire spontané et joyeux, décontenancé. Il cligna des paupières, effaré, avant de finalement entendre les paroles qu'elle prononça. Elle le voyait... Ses yeux étaient remis ? Ses propres lèvres s'étirèrent sans plus tarder, tandis qu'elle le relâchait quelque peu et s'en retournait au niveau du plancher, il entreprit de lui glisser quelques mots à son tour, juste avant qu'elle ne vienne quérir ses lèvres si avidement et si fougueusement qu'il s'en sentit frémir.

-C'est vrai ? Je suis soulagé...

C'était laconique, mais néanmoins sincère et il le prouva d'autant plus puissamment lorsqu'il l'enveloppa de ses bras en lui rendant son baiser, paupières closes. Ce contact avait un quelque chose de rassérénant qui, curieusement, ne s'estompait guère, au fil des semaines qu'ils écoulaient ensemble. Combien d'amour avait-il vu ternir, tout autour de lui ? Même le monde de la criminalité abondait d'histoires sans lendemains, et s'il s'était toujours tenu à distance de ses pairs, il n'en avait pas moins prêté à une attention assidue aux ragots en tout genre. L'information, même de comptoir, pouvait être transformée en arme acérée par ceux qui la maniaient avec professionnalisme et efficacité... Et il en faisait partie, sans nul doute. Il avait eu peur, bien sûr, que ses propres sentiments ne finissent par perdre de leur superbe... Mais au fil des jours, le Nagafuse comprenait que cela n'avait pas été un sentiment très rationnel. C'était même tout l'inverse... Plus il évoluait en sa compagnie et plus il se délectait de ses mimiques, de son euphorie naïve, tantôt, de sa combativité glorieuse et glorifiante, d'autres fois. Elle était exactement ce qu'il n'avait jamais souhaité être... Et c'était précisément pour cela qu'elle l'avait percuté avec une telle virulence. Aurait-il jamais pu trouver de personne aussi droite et honorable ? Il en doutait, a fortiori dans le domaine qu'il avait fait sien. Ce n'était pas spécialement le genre de profils typiques qu'on rencontrait à chaque carrefour, au sein des familles qui régnaient en maître sur la criminalité du Monde entier... Lorsque leurs lèvres se désunirent, le noiraud se laissa choir sur le fauteuil puis, taquin à son tour, tira son amante vers lui pour la forcer à prendre place sur ses genoux. Il n'avait pas encore envie de lui rendre sa liberté : puisqu'elle était venue s'échouer dans ses bras, elle allait devoir en assumer les conséquences...

-Ma jambe aussi va beaucoup mieux. On dirait que ces vacances étaient effectivement ce qu'il nous fallait pour nous requinquer...

Il eut un sourire suave puis déposa un nouveau baiser sur la tempe gauche de sa chère et tendre avant de simplement la conserver là, contre lui. Même s'ils passaient le plus clair de leurs temps collés, l'un contre l'autre, il avait l'impression que ça n'était jamais assez. Sa soif de contact devenait insatiable, comme si elle suscitait en lui un besoin grégaire contre lequel il ne pouvait pas lutter et qui, d'instant en instant, prenait en ampleur et en puissance. En l'espace de quelques jours, elle était devenue sa drogue... Et quelle drogue séduisante ! Il n'en finissait plus de rêver d'elle, et avait grand peine à distinguer précisément ses songes fantasmés des instants qu'elle lui offrait si tendrement. Il lui semblait, d'ailleurs, que les jours passés à ses côtés avaient revêtu un caractère étrangement onirique. Comme si tous ses souvenirs étaient nimbés d'une espèce d'intangibilité, d'un caractère brumeux et insaisissable... Ce n'était pas réellement là une sensation déplaisante, en fin de compte : c'était même plutôt l'exact inverse. Le temps passait, et elle lui était de plus en plus admirable...
Pourtant, quelques secondes furent suffisantes pour instiller dans son cœur un doux poison auquel il avait eu à s'acclimater également, ces derniers temps durant. La culpabilité... Il était une chose qu'il se reprochait et qu'il n'en finissait plus de ruminer à longueur de journée. La vérité... Elle le lui avait demandé, et il lui avait promis qu'il finirait par la lui livrer. Leur présence dans le quartier général des Auditores, dans un premier temps, les en avait empêché. Et ensuite... C'était un mélange cynique et étrange de peur, d'envie de la préserver, de ne pas obscurcir ses pensées davantage. Pourtant, le Nagafuse savait pertinemment que ses quelques révélations ne feraient jamais souffrir Mizeria : elle les accueillerait avec patience et intelligence, comme elle avait toujours su le faire à son égard, puis y réagirait avec doigté et méticulosité afin de ne pas le brusquer ou le froisser. A contrario, il risquait plutôt de l'attendrir... Il savait donc que ce n'étaient là qu'un tissu de mensonges et de faux arguments qu'il tentait de dresser contre sa propre honnêteté. Car l'évidence était là : il avait peur de parler. Il s'était renfermé sur lui-même trop longtemps, tant et si bien qu'il ne parvenait pas à imaginer sereinement l'idée d'en dévoiler sur ses origines à une tierce personne. Il n'allait faire que se dévoiler, que s'exposer, se mettre à nu... Il ne pouvait en ressortir que des souffrances supplémentaires. De surcroît, était-ce vraiment des larmoiements, qu'elle attendait de lui ? Il ne voulait pas lui renvoyer l'image d'un homme brisé... Elle était tombée amoureuse de l'être intelligent, manipulateur et faussement odieux qu'il avait incarné. Maintenant, il craignait que l'honnêteté ne tue finalement ce qu'elle pouvait ressentir, le concernant... Cela aussi, c'était irrationnel, et irrespectueux, en prime. Elle était largement capable de faire preuve de maturité afin de passer au-delà d'une simple passade... Elle le pouvait. Aussi se contraignit-il à lui glisser quelques mots supplémentaires, non sans la serrer encore plus fiévreusement contre lui, camouflant son visage au creux de son cou, comme s'il avait trop peur d'affronter son regard. Il était comme un enfant, terrifié par avance à l'idée de ressasser ses souvenirs les plus douloureux et les plus intimes...

-Je... Mizeria, je veux te parler... Te dire tout ce que j'ai vécu, mais... J'ai peur. Je ne sais pas comment m'y prendre... C'est stupide, je sais. Je n'ai aucune excuse... Je vais essayer.

Allait-il seulement y parvenir ? Cela dépendrait fort probablement de la réponse de Mizeria et de sa posture... Elle pouvait le mettre en confiance, comme elle pouvait le détruire. Mais lui, de son côté, s'en remettait à elle volontiers. Il le savait : elle trouverait les mots et la conduite parfaite pour l'encourager sans l'oppresser nullement. Car elle l'avait toujours compris, et car elle continuerait à le comprendre.
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Mizeria K. Balogh
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MessageSujet: Re: What do I do because of you ?    What do I do because of you ?  EmptyMar 24 Juil - 5:51

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Elle était redescendue, posant précautionneusement ses deux pieds de nouveau sur le sol. Les paroles du brun ne lui arrachèrent qu’une moue boudeuse avant qu’elle ne finisse par l’embrasser. Aurait-elle aimé autant d’enthousiasme que le sien ? Surement. Néanmoins elle se rendait compte qu’elle réagissait peut être trop vivement… La blonde avait été comme une enfant, ni plus ni moins. Et elle tacha de s’en rattraper au plus possible en laissant s’exprimer d’avantage la femme qu’elle était. Leur baiser ne s’en fit que des plus passionnés, comme il l’avait rarement été depuis quelques jours. Ils étaient de nouveau tous les deux d’attaque. Cette pensée lui arracha un frisson, un certain tremblement qu’elle occulta bien vite en sentant le brun se retirer. Elle allait protester de tout son soul, plus vivement et vigoureusement que jamais, quand soudainement, Rai l’attira avec lui la faisant prendre place sur ses genoux tandis qu’il restait avachi dans son fauteuil. La demoiselle cligna des yeux un bon moment, analysant leur nouvelle position et ce que son amant lui disait. Prenant alors conscience de la situation, de ses mots et de son sourire, elle ne put s’empêcher de piquer un fard. Venait-il de penser à la même chose qu’elle quelques secondes plus tôt ? Rien que cette idée sembla enflammer tout son corps. Malgré toutes leurs péripéties, Rai semblait toujours aussi capable de lui faire tourner la tête avec si peu de choses… Il l’enivrait toujours de plus en plus, elle en venait à se demander si l’amour qu’elle éprouvait pour lui arriverait un jour à se heurter à une quelconque limite… Et plus les jours passaient, plus il lui semblait que c’était impossible. Il avait su se faire une place dans son cœur, et ce dernier ne semblait plus se trouver en paix s’il ne le sentait pas à ses côtés. Non, c’était tout son être entier qui le réclamait, qui dépendait de son bon vouloir se retrouvant complètement à sa merci s’il en faisait le souhait. Il y avait la une sorte de folie, et pourtant, rien ne semblait effrayer l’ex-Leone. Pas ici, pas avec lui et encore moins quand il déposait un tel baiser sur sa tempe.

Un sourire passa sur ses lèvres, et Mizeria se laissa faire comme une enfant de nouveau, se lovant d’autant plus contre lui et se relaxant. Il ne lui fallait rien d’autre pour les prochains temps à venir, elle souhaitait simplement faire le plein de ces instants. Elle voulait s’imprégner de chaque sensation qu’il pouvait lui offrir, qu’elle l’ait déjà expérimentée ou non. Oui, il était désormais son seul moteur, sa seule source de force… Et dieu qu’elle allait en avoir besoin. Elle n’ignorait pas que leur petit paradis n’était que provisoire. D’ici quelques jours ils devraient de nouveau retourner chez les Auditore et commenceraient ainsi les vrais problèmes… Elle allait devoir faire ses preuves. Pire encore, elle allait devoir leur obéir et œuvrer comme eux, ce qui avait régulièrement le don de lui soulever le cœur. Son seul réconfort était de se savoir auprès de son seul amour… La seule perspective positive se trouvait là. En entrant dans la famille des Auditore elle s’assurait de rester à ses côtés et de profiter de lui sans interruption, sans craintes… Même si elle avait peur pour sa vie. Combien de fois avait-elle de nouveau fait le même cauchemar ? De manière récurrente elle voyait Rai au bord de la mort, lui reprochant tout, l’accablant de vérité et la faisant culpabiliser… Il était dans le vrai à chaque fois, elle le savait… Et elle n’oubliait pas non plus que ce cauchemar pouvait au fil du temps devenir réalité. Quand ce dernier venait la hanter, elle cherchait immédiatement le réconfort de son amant pour s’assurer qu’il était bien en vie et ne lui reprochait rien. Du moins, pour l’instant.

Si la petite blonde avait ses nouveaux démons, il sembla que le brun était en proie à des anciens pour sa part. Des qu’il commença à raffermir sa priser sur elle, son instinct lui souffla que quelque chose n’allait pas et elle tendit l’oreille immédiatement, à l’affut de n’importe quel son… Comme pour lui répondre sans qu’elle n’ait besoin de prononcer un mot, Rai lui glissa quelques inquiétudes, et surtout ses craintes… Il avait effectivement promis de tout lui raconter mais cela semblait le plonger dans le désarroi le plus total. La mafieuse le comprenait et respectait ça sans mal, même si elle s’étonnait qu’il soit si effrayé. Avait-il peur de sa réaction avant tout… ? N’écoutant que son instinct et son cœur de nouveau, elle se plaça définitivement à califourchon face à lui, l’englobant dès lors dans une étreinte des plus tendres, le laissant placer sa tête toujours dans son cou. Ses doigts vinrent quérir ses cheveux à la base de son cou et caresser sa nuque de manière réconfortante, tandis que son autre bras s’assurait de le serrer suffisamment contre elle. Elle déposa à son tour un baiser sur sa tempe puis un sur le haut de sa tête, avant d’appuyer la sienne contre cette dernière.

« Rai… Si tu veux attendre pour en parler tu peux… Je ne veux pas te presser d’accord ? Fais le quand tu penseras que c’est le bon moment, et que tu es le plus à l’aise pour te livrer… Je saurais attendre. Je ne veux pas que ça te rende mal.. Surtout pas. »

Elle se détacha quelque peu pour déposer un baiser sur son front, avant de le reprendre contre elle. Elle le berça doucement, profitant de leur étreinte et du moment de douceur qui s’offrait à eux. En réalité, elle avait envie de savoir… Mais il passait avant tout. Lui eut-il fallu dix ans pour tout lui avouer, elle aurait patienté s’il lui avait demandé... Cela faisait partie des innombrables choses qu’ils n’avaient pas besoin de se dire mutuellement. Il suffisait qu’ils se regardent, qu’ils se tiennent parfois pour savoir si l’un d’eux avait besoin de temps, de repos ou d’amour. Elle ignorait comment, mais une réelle confiance et symbiose s’était formée entre eux. Il lui semblait même qu’ils étaient imbattables. Le monde pouvait bien se retourner contre eux, ils seraient toujours victorieux si ils s’avaient mutuellement. Rai représentait désormais tellement de choses à la fois… Il était celui qui avait su bousculer sa vie, il avait ébranlé ses convictions, changé ses buts pour que les siens deviennent sa priorité, il avait su lui faire gouter à plus de délices de d’amour qu’elle n’avait jamais expérimenté, il ne cessait malgré tout d’être une surprise pour elle et de la faire tomber amoureuse encore et encore… Rai était devenu son être le plus cher, son seul amour et sa seule raison de se battre… Il pouvait donc bien avoir besoin d’un tas d’années pour tout lui dévoiler, elle tacherait de s’en accommoder sans mal…Elle resterait à ses côtés qu’il lui parle ou non. C’est ce qu’elle tacha de lui retranscrire dans les étreintes.

« Lâche toi quand tu penseras que c’est le bon moment… C’est tout ce que je peux te conseiller… Mais sache que peu importe ce moment, j’attendrais. Tu n’es plus seul. Enfin j’espère que tu ne rêvais pas de finir tout seul et d’avoir la paix, je serais là pour continuer à t’embêter… »

Un sourire des plus tendres se plaça sur ses lèvres et elle le fit échouer sur sa joue. Elle n’avait jamais été quelqu’un de patient, mais pour lui il semblait que tout était possible. Il réveillait en son sein de nouvelles qualités et surtout une tendresse qu’elle avait longtemps cru éteinte... Dans son enfance, Mizeria avait toujours été assez câline et affectueuse. Le temps et surtout ses épreuves l’avait rendue plus distante et froide, elle ne s’épanchait plus en sentiments. Du moins jusqu’à Rai qui avait et continuait perpétuellement de chambouler son monde, jusqu’à ses fondements les plus surs qu’avaient été les Leone. Doucement, elle continua de le serrer contre elle et de caresser ses cheveux. Elle espérait simplement qu’il ne voit pas la dedans une tentative de l’infantiliser ou de le materniser, ce n’était simplement que son cœur et son envie de se montrer là pour lui qui s’exprimaient.


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MessageSujet: Re: What do I do because of you ?    What do I do because of you ?  EmptyJeu 26 Juil - 8:04



Dans les yeux de la vérité.



Bien sûr qu'elle allait se montrer compréhensive et empathique... En entendant ses dires et en remarquant la foultitude de petites attentions qu'elle lui destina, du bercement aux baisers, Rai se sentit à nouveau accablé d'une culpabilité indicible et dont il ne pouvait pertinemment estimer la provenance. Il songea que le simple fait de ne pas arriver à prononcer les mots qu'il imaginait déjà était un tort, considérant le fait que nul ne l'aurait jamais blâmé pour ce qu'il avait pu faire et que Mizeria, de son côté, n'aurait jamais pu le blâmer tout court. Eut-il détruit la moitié d'un pays qu'elle l'aurait probablement pardonné en songeant qu'il était l'homme qu'elle avait décelé, et non celui qu'il avait semblé être, des années durant... Un sentiment de frustration inonda momentanément ses yeux de larmes et l'impuissance poussa dans sa gorge un grognement faible mais rageur. Il exécrait cette image qu'il devait actuellement renvoyer : celle d'un homme brisé, alors que ça n'était pas son cas, pas le moins du monde. Ou, à tout le moins, ça n'était plus son cas : plus depuis qu'elle l'avait rencontré, plus depuis qu'elle l'avait transformé. Elle l'avait réincarné... Il n'avait plus rien de l'homme dont il s'apprêtait à brosser le portrait, en fin de compte.
La patience dont la demoiselle fit preuve, déclarant qu'elle était prête à attendre au nom de son bien-être à lui, suffit également à convaincre le noiraud du fait qu'il n'avait d'autre choix que celui de lui parler ici et maintenant. Cela aurait été une infamie de la délaisser dans l'ignorance et dans l'incertitude lors même qu'il lui avait déjà promis, à plusieurs reprises, qu'il allait tout lui avouer dès lors qu'ils auraient droit à un semblant de quiétude. Leur quiétude, ils l'avaient : nul appartement de Venise n'aurait su se montrer aussi apaisant que cette maison anglaise dans laquelle ils logeaient actuellement. Si le Nagafuse laissait passer cette chance inouïe de se délester de ce fardeau, s'il ne parvenait pas à briser cette carapace insurmontable qu'il s'était autrefois forgé, il craignait également de ne jamais y arriver... Il continuerait perpétuellement à se bercer de prétendues raisons, à repousser l'échéance et ils n'affronteraient jamais, ce fait, les tourments qui l'habitaient encore et le traumatisme qui l'avait poussé à l'extrémisme que son amante lui connaissait. Or, l'Auditore n'en avait que trop conscience : s'il espérait, un jour ou l'autre, s'épanouir et devenir un homme meilleur, il n'avait d'autre choix que celui de tenir tête à celui qu'il était pour l'heure... La complaisance n'avait rien, et n'aurait jamais rien d'un moteur. Elle était mortifère, et sa conduite auto-destructrice risquait, de surcroît, de finir par nuire à Mizeria. Non, définitivement, le noiraud n'avait d'autre choix que celui de tout lui annoncer froidement : elle saurait le bercer, elle saurait le remercier, et elle saurait penser ses plaies, par la suite. Il le savait.

-Je suis né à Tokyo. D'une mère italienne, et d'un père japonais. Lui était ouvrier, et elle masseuse... On n'avait pas beaucoup d'argent. Très peu, même... On avait un appartement un peu délabré, sous les combles d'un vieil immeuble... C'est... à peu près tout ce dont je me souviens de ma mère. J'ai juste un souvenir assez... Tenace. Qui ne me quitte jamais. J'en cauchemarde, parfois...

Il eut un frisson puissant, qui le secoua de la tête au pied, et il tâcha de raffermir sa prise contre Mizeria afin de se stabiliser et de se tranquilliser aussi fermement que possible. Commencer avait été plus compliqué que d'enchaîner les mots, et il avait compris qu'il ne devait pas perdre de temps en remerciements ou en mots d'amour, pour le coup : il aurait risqué de manquer le coche, et de ne pas trouver la force de se livrer aux révélations qu'il était actuellement en train de formuler. Ses lèvres buttèrent néanmoins à l'évocation de ce souvenir douloureux, et il lui fallut plusieurs secondes afin de trouver des dires susceptibles de concrétiser ses pensées. Ceux-ci ne furent néanmoins pas prononcés bien fort : tant et si bien que même la jeune femme, pourtant accolée contre lui, aurait certainement à tendre l'oreille pour tous les distinguer clairement. C'était comme si le noiraud avait peur de réveiller d'autres songes, profondément assoupis : comme s'il craignait d'aggraver sa perception de cette terrible expérience rien qu'en l'évoquant trop audiblement.

-C'est... Une image. Quelques images, à vrai dire... Ma mère s'avance jusqu'à la porte, sourire aux lèvres, en croyant que c'est mon père qui rentre... Et quand elle ouvre la porte, une épée la traverse de part en part. Elle s'effondre, raide morte, de deux hommes rentrent en enjambant son cadavre... Puis se dirigent vers moi. Je... Je n'avais pas cinq ans...

Il conserva ses paupières closes et, une fois de plus, fut ébranlé par un frisson qui se métamorphosa bientôt en soupir. Il exécrait son apparente faiblesse. En agissant de la sorte, il avait l'impression de bafouer toutes les règles qu'il s'était naguère fixé, de déroger à toutes les promesses qu'il s'était forgé de lui-même. Il avait juré qu'il œuvrerait dans la solitude la plus absolue : Mizeria avait su l'en extraire, par la force de son honnêteté et de sa bonté candide. Il avait juré qu'il n'embrigaderait jamais personne dans cette folle quête vengeresse qu'il avait décidé de livrer : elle avait bien failli perdre sa vie en demeurant à ses côtés dans les instants les plus cruciaux. Il avait juré qu'il ne s'autoriserait jamais le moindre sourire, au nom de toutes les âmes et de tous les destins qu'il avait pu faucher : elle l'avait poussé au rire à maintes occasions. Il avait juré qu'il détruirait la mafia dans son entièreté et que nul ne serait épargné par son entreprise insensée et ses funestes desseins : elle en avait d'ores et déjà réchappé. Il avait, enfin, promis que nul ne verrait jamais le moindre de ses secrets : elle était sur le point de découvrir ceux dont elle ignorait encore la teneur. C'était probablement pour cela qu'il s'était si puissamment amouraché d'elle... Ce n'était ni plus ni moins qu'un cercle vicieux, en fin de compte. Puisqu'elle déjouait tous les pronostics, puisqu'elle faisait en sorte de le surprendre et de le rendre pareil à un ignare débile et simple d'esprit d'instant en instant, d'épreuve en épreuve, il n'avait eu d'autre choix que de commencer à l'apprécier... Et puisqu'il avait commencé à l'apprécier en remarquant sa myriade de qualité, il lui avait volontairement donné des armes supplémentaires pour le surprendre. Tout avait été à la fois étonnamment prompt et paradoxalement très lent... Parce qu'il avait envers et contre tout fallu franchir quelques étapes intermédiaires indispensables, et parce qu'elle les avait franchi avec un brio considérable, qui laissait à penser que cela n'avait été, aux yeux de la belle, ni plus ni moins qu'une poignée de formalités dont elle ne s'était pas encombrée très longtemps. Et, en acceptant de lui livrer toute la vérité de son morne passé, Rai comprenait sans peine qu'il participait enfin activement à ce petit jeu : qu'il nourrissait l'ouroboros de leur amour, et qu'il lui donnait d'autant plus d'ampleur. Désormais, il ne pouvait que l'espérer ardemment : elle ne devrait jamais lui faire défaut... Sans quoi elle le plongerait dans un désarroi dont il ne parviendrait probablement jamais à se relever. Elle l'avait reconstruit : elle jouissait des armes lui permettant de le détruire, si elle le décidait.

-J'ai passé... Approximativement deux ans, retenu en otage. Ils avaient un complice. Ils exigeaient tous les trois une rançon de la part de mon père. Pendant tout ce temps... J'ai été placé seul dans une pièce semblable à celle dans laquelle Symphony et Alda m'ont placé, pendant mon incarcération. J'imagine que ça n'a pas aidé à m'offrir de la sérénité, loin de là... Et finalement, j'ai été libéré. Mais je te l'ai dit... Mon père était pauvre. Cela lui a pris du temps, mais il a fini par payer la rançon considérable que ces types exigeaient... Je suis retourné vivre à l'appartement, en sa compagnie. Et pendant que je me morfondais, pendant que j'entendais encore et encore le bruit résultant de la chute de ma mère... La question n'a pas tardé à me traverser. Comment avait-il réussi à rassembler une somme aussi importante ? Il n'y avait qu'une seule réponse possible, et tu dois t'en douter... Mon père était un mafieux. Il m'a juré qu'il allait se venger... Et... Il n'a rien fait. Rien fait d'autre que crever, à son tour. Il m'a privé de ma mère... En se parjurant, en devenant criminel, en s'intriquant dans des conflits qui l'outrepassaient, il a causé la mort de ma mère, mon enlèvement, puis sa propre disparition. J'avais huit ans... J'ai hérité de ses deux boîtes et... J'ai commencé à vivre seul, dans les rues de Tokyo. Comme un vagabond. Comme un orphelin.

Le plus pénible avait été énoncé, il en avait pleinement conscience. Pourtant, le noiraud ne parvenait pas à relâcher la pression qu'il exerçait sur le corps chaleureux et rassurant de sa chère et tendre. Il ne pouvait pas la quitter, ne pouvait pas détacher leurs deux silhouettes, fusse d'un centimètre... Il avait besoin de la sentir contre lui, car il évoquait précisément ce qui, toute sa vie durant, l'avait rongé. Ce qui l'avait poussé à la folie, à la mesquinerie, à la violence, au nihilisme, à la froideur terne et revancharde, laquelle était à l'origine de son courroux morbide. A la fois le pire des maux et celui qui, à ses yeux, était fondateur de toute chose néfaste et négative, de toutes les pensées auto-destructrices et de tous les souhaits belliqueux...

-La Solitude. Je me suis enfermé dedans... Pendant des années. J'ai fini par trouver une bague de qualité médiocre sur un cadavre, en plein Tokyo. Je me contentais de errer... De fouiller dans les poubelles pour subsister. Je volais beaucoup, également... Pendant deux ans, je crois.  Finalement, alors que je m'entraînais avec Shiho dans une décharge... Ces deux fils de pute se sont pointés. Par hasard... L'un d'entre eux a sorti son épée. S'est avancé vers moi. Je l'ai su instinctivement. Ce qu'il fallait que je fasse... J'ai utilisé ma flamme. Pour la première fois de ma vie, je l'ai utilisée sur un être humain. J'ai fait croire à son pote que j'étais son fils et... En me voyant me faire menacer de la sorte, il n'a pas hésité. Ils se sont entre-tués. Même maintenant... J'ai du mal à croire que ça ait aussi bien fonctionné. Mais c'est à ce moment-là que j'ai pris conscience du fait que je pouvais le faire. Que je pouvais les détruire, tous. Leur faire endurer ce qu'ils m'avaient fait endurer, à moi. Et protéger tous les innocents qui, incapables de veiller à leur propre protection, avaient à endurer leurs exactions égoïstes. J'ai voué ma vie à la vengeance mais... J'ai eu
à en payer un lourd tribut. Pendant une dizaine d'années... Ma flamme a disparu. Je n'arrivais plus à allumer cette fichue bague... Elle restait muette. Avec le recul, je pense que j'avais simplement usé toute la flamme dont mon corps disposait... En tout cas, j'ai fini par rejoindre un orphelinat, jusqu'à mes dix-huit ans.

Il marqua l'arrêt, pour la première fois depuis qu'il avait commencé à narrer l’inénarrable. Il eut un nouveau frisson, cette fois-ci atténué vis-à-vis de ceux qui s'étaient manifestés jusqu'à présent, mais n'en conserva pas moins son visage plongé dans le creux du cou de Mizeria, comme s'il était désormais incapable de s'en extraire. Il se souvint sans peine de la rancœur cultivée des années durant, et de la mort de toute l'insouciance qu'il avait pu continuer à entretenir, fébrile mais existante. La bêtise et la méchanceté des marmots qu'il avait été contraint de côtoyer durant ces jeunes années l'avaient poussé à une radicalisation colossale : il avait même, l'espace d'un instant, songé que l'humanité toute entière était viciée et qu'elle méritait d'être annihilée dans son absolue globalité. Finalement, le noiraud avait réussi à modérer ses ambitions exterminatrices, et ce notamment grâce à sa rencontre avec sa désormais amante... Mais il restait quelques petits événements à évoquer, il ne le savait que trop pertinemment. Il ne parla guère de ses années égarées au milieu des autres orphelins, songeant qu'il aurait tôt ou tard l'occasion de s'attarder sur ce sujet, et reprit donc son récit là où il venait de le laisser, toujours mécanique et inlassable, sans pour autant parvenir à ôter la tristesse et la mélancolie qui faisaient vibrer ses cordes vocales bien malgré lui.

-J'ai pris le premier avion que j'ai trouvé pour l'Italie et j'ai fini par errer de ville en ville... Jusqu'à Venise. J'ai entendu parler d'Alda et de Symphony, au moment où la famille voyait le jour. Je suis allé les voir et je leur ai prêté ma force. Elles m'ont accepté en tant que gardien et, à compté de ce jour, j'ai œuvré secrètement pour fortifier les Auditore, de sorte qu'ils puissent finir par évincer les Van Sidéris et causer leur mort.

Le constat froid et cinglant s'imposait de lui-même, mais Mizeria ne l'ignorait pas. Elle allait simplement pouvoir comprendre les tenants des agissements du noiraud, lors même qu'elle pouvait déjà estimer les aboutissants... Avec son passé, elle allait pouvoir cerner ses motivations, leur légitimité, et, quelque part, leur noblesse capricieuse. Au final, le Nagafuse n'était ni plus ni moins qu'un gamin et c'était sa frustration de n'avoir jamais su bénéficier de ce à quoi tous les mômes devaient naturellement avoir droit qui l'avait poussé à se montrer aussi radical et aussi glauque, des années durant. Pour autant, nul n'aurait jamais pu se gausser de son jadis, il le savait : il avait effectivement vécu des événements terribles, et cela contribuait à justifier ce caprice-ci. Finalement, sa voix se mourut et, les larmes aux yeux, il décolla son visage du cou au creux duquel il l'avait échoué. Il dévora sa belle du regard puis laissa fleurir sur ses lèvres un sourire sincère, tendre et amoureux. Il avait réussi à parler de ses démons les plus sombres, et il ne pouvait qu'être reconnaissant : il le prouva et le communiqua sans plus tarder en lui offrant le plus fiévreux des baisers, s'abandonnant à leur étreinte et chassant de la sorte tout ce qui avait pu le hanter durant de trop pénibles années.
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MessageSujet: Re: What do I do because of you ?    What do I do because of you ?  EmptyDim 5 Aoû - 16:06

What do I do with you?
I look at you and I think of you even more


La demoiselle était restée en place, continuant de bercer et de rassurer son amant. En l’état actuel des choses, elle ne pouvait pas faire plus. La situation et leur discussion s’était montrée trop délicate à la mention du passé du noiraud pour qu’ils changent de sujet de manière abrupte ou qu’ils prétendent que rien n’avait pas été mis sur la table. De plus, elle sentait le jeune homme bien trop fébrile tout d’un coup pour ne pas lui porter toute son attention. Il était libre de ses choix, il pouvait effectivement tout lui raconter, comme y renoncer… Dans son attente, elle lui laissait donc le champ libre, le choix de se confier ou d’entamer une autre conversation qui l’aurait mis plus à l’aise. Sa main ne cessa pas pour autant de se perdre dans ses cheveux. Pour une fois, ils avaient du temps pour eux et elle comptait bien le mettre à profit… Ou du moins ils en avaient de nouveau. Il lui semblait que cela faisait des lustres qu’ils ne s’étaient pas retrouvés si intimement et de manière si innocente et sereine. Le constat n’était pas brillant, leurs seuls jours de quiétude avaient été ceux après leur mésaventure dans la galerie d’art. Et pourtant, durant ce temps ils avaient été également en convalescence, jusqu’à que Méphisto n’apparaisse comme un démon et ne tente de les détruire. Suite à cela, les pires jours s’étaient égrenés… Ceux où ils avaient été à la solde du gardien de la brume puis ceux où ils pensaient s’être perdus mutuellement, ceux où ils ignoraient tout de l’état de l’autre et ceux où ils avaient bien cru sombrer dans la solitude et la folie pour de bon. S’ils s’étaient finalement retrouvés, les jours chez les Auditore, du point de vue de la blondinette, n’avaient rien eu de très appréciables. Elle était trop inquiète et ne cessait de ressasser son changement de famille pour être détendue et se concentrer uniquement sur son partenaire. Même Rai avait semblé comme ailleurs et anxieux… Leur arrivée en Angleterre n’avait été finalement qu’un soulagement sur tous les points de vue. Pour une fois ils étaient enfin loin de tout, les soucis étaient pour l’instant derrière eux, ils étaient plus en forme qu’ils ne l’avaient été dans l’appartement à Venise, et plus important encore et délicieux, ils étaient là ensembles, encore plus amoureux qu’avant. Oui, tout était enfin propice pour qu’ils puissent profiter pleinement et de tout leur saoul l’un de l’autre. Ils étaient comme coupés du temps et du monde, seuls dans leur idylle pour quelques jours de repos.

Mais pourtant… Ces jours de repos allaient devoir être utilisés intelligemment. Ils étaient encore loin de pouvoir en jouir complètement innocemment et y trouver la paix. Les deux amants avaient trop à se dire. Mizeria n’ignorait pas qu’elle devait lui confier son plan, ou à défaut lui en esquisser les contours… Puis elle n’avait pas choisi l’Angleterre pour rien, de surcroit elle n’avait pas porté son choix sur cette ville par hasard. Tout avait été pensé et était entrepris dans un but précis… Néanmoins, tout cela saurait attendre. Si elle avait bien des choses à raconter, le brun avait pour l’instant la priorité. Il finit d’ailleurs à se livrer, certes de manière abrupte mais la blonde imagina sans mal que c’était la meilleure façon d’attaquer. Surprise que Rai choisisse de tout lui raconter, elle ne fit aucun bruit. Elle ne devait pas l’interrompre, il avait fait son choix et elle n’avait plus qu’à écouter attentivement. Le temps sembla s’arrêter, elle écouta religieusement tous les mots qu’il se mit à prononcer et elle ignora pourquoi mais son cœur commença à s’emballer. Les frissons qui prirent Rai achevèrent de la rendre hagarde à tout ce qu’il pouvait lui véhiculer ou lui retranscrire. Étrangement, son esprit commença à essayer de se dresser un tableau, une espèce de film, essayant vainement d’imaginer Rai quand il était encore un marmot, de tracer les lignes de Tokyo et de voir leur appartement, d’imaginer des traits à ses parents, ou à défaut d’y voir quelques silhouettes… Était-ce là une bonne idée ? Surement pas.

Son cœur sembla s’en serrer d’avantage quand son amant lui confia ce qu’il avait vécu. Elle eut alors l’impression de voir cette fameuse et si précieuse mère s’effondrer également sous ses yeux, et son attention se braqua immédiatement sur Rai. La jeune anglaise se doutait déjà qu’il avait dû vivre des choses horribles, mais en savoir désormais la teneur, ou du moins le début, ne faisait que la déchirer. D’autant plus que le meurtre sanglant de sa génitrice commençait à faire écho à sa propre expérience… Elle imaginait sans mal son état, à quel point il aurait eu besoin de soutien et surtout qu’ils n’auraient jamais dû vivre cela. L’espace d’un instant les images qu’elle dessinait dans son esprit se troublèrent et furent remplacées par ce qu’elle avait elle-même vu le funeste jour où elle avait perdu toute sa famille. Ce fut le soupir du brun qui la tira de cette première torpeur qu’elle traversait à cette révélation. Instinctivement elle resserra sa prise sur lui, tachant de se faire plus présente que jamais et de le rassurer. Ses gestes s’arrêtent néanmoins, elle ne lui caressait plus les cheveux, non elle voulait juste le serrer contre elle et lui montrer qu’il avait toute son attention. Stupidement, elle aurait aimé le connaitre à cette époque ou remonter le temps pour l’enlever de tout ça. Ce sentiment ne fit que se renforcer d’avantage quand il lui raconta la suite de son passé.

Le sang de Mizeria ne fit qu’un tour de nouveau en imaginant Rai plus jeune et enfermé, tout qu’elle se mit à haïr d’autant plus les Auditore. Elle imaginait sans mal ce que son récent enfermement avait dû lui faire revivre, il n’avait pourtant rien dit ou montré… Combien de choses avait-il ainsi encaissé sans jamais se laisser aller, sans jamais être abattu et chercher appui sur quelqu’un ? Alors qu’il continuait son récit la rage qu’elle avait éprouvée, ce transforma inexorablement en infinie tristesse. Sans surprises, elle découvrit que son père était mafieux également… Elle en avait eu une vague idée à la mention d’une rançon et surtout après que ces hommes aient recourt à de telles méthodes… Ses yeux se fermèrent pour maintenir la vague d’émotions qui ne cessaient de monter en son sein. Elle comprenait la rage qui avait pu habiter Rai, la haine qu’il avait pu adresser à son père mais elle ne cessait de se répéter que tout cela n’avait décidément été rien d’autre qu’un mauvais enchaînement.. Il avait fait les frais des erreurs de son père, il en avait perdu sa mère puis avait découvert que son seul parent restant était du même acabit de ceux qui avaient détruit son monde… Au final son père n’avait rien effacé ou arrangé, il avait sauvé son fils ce qui était certes un très bon point… Mais il n’avait pas vu les dommages qu’il avait subi et sur quel chemin il risquait de le pousser. La réaction épidermique que Rai vouait à la mafia ne l’étonnait désormais plus, elle aussi à sa place aurait voulu détruire ce monde, et ce jusqu’au dernier mafieux… Elle s’imaginait sans mal tout comme lui, jurer de tous les annihiler pour se faire justice et que jamais un autre n’ait à vivre la même chose… C’est à ce moment-là qu’un sentiment d’impuissance se rajouta à toute la tristesse qui ne cessait d’investir son être. Elle aurait voulu être cette personne. Si seulement elle avait pu remonter le temps, arranger les choses et le sauver. Alors que Rai continuait son récit et racontait sa vie d’orphelin et ses déboires dans les rues de Tokyo, Mizeria sentit un énorme sanglot monter dans sa gorge et quelques larmes se mirent à couleur d’elles-mêmes. D’un geste empressé elle les chassa, elle n’avait pas le droit de pleurer la maintenant, il n’avait pas fini et surtout ça ne lui servait à rien, ce n’était pas de ses larmes qu’il avait besoin. Elle sécha donc ses larmes et se retint, le serrant à nouveau contre elle.

Elle continua de l’écouter, toujours aussi religieusement et en le serrant toujours aussi fort qu’il le faisait avec elle. Il se mit à lui donner plus de détails sur la rencontre avec ses bourreaux, puis à lui parler d’un orphelinat… Le contraste entre les détails et leur manque quant à l’orphelinat en question la frappa. Il y avait encore des choses en dessous mais il faisait le choix d’en garder un peu de côté. Pouvait-elle de toute façon lui en tenir rigueur ? Non, évidement. Ce qu’il lui avait déjà raconté était déjà une énorme partie, elle comprenait dès lors toutes ses motivations, tout comme le masque qu’il avait dû se façonner au fil des années, toute la peine qu’il avait dû éprouver également… Ce qu’il venait de lui raconter suffisait déjà à l’attrister au plus haut point, elle réfrénait déjà ses larmes avec difficulté, maintenant une façade parfaitement calme, alors en savoir plus risquait fort de l’achever pour de bon… Et probablement pour lui également, vu à quel point il la serrait contre lui et les frissons qui l’avaient pris durant tout son récit.


Rai acheva son histoire et se retira enfin quelque peu, relâchant légèrement la pression qu’il avait jusqu’à maintenant exercé sur son corps et il quitta également son cou. Son expression et le sourire qu’il lui adressa malgré les larmes qu’elle devinait aux coins de ses yeux, eurent raison d’elle et l’achevèrent pour de bon. Son cœur se souleva une dernière fois et avant qu’elle ne puisse esquisser le moindre mot, Rai se mit à l’embrasser. A vrai dire, elle était bien incapable de dire quoi que ce soit, trop puissamment secouée pour y parvenir. Elle mit d’ailleurs un léger moment à lui répondre tout aussi fougueusement qu’il le faisait, mais elle y parvint. Elle prit son visage entre ses mains et tacha de lui retranscrire toute la passion et surtout l’amour qu’elle lui vouait. Néanmoins, plus les secondes passaient plus elle y peinait, ce qu’il lui avait raconté ne cessait de lui peser. Ce n’était pas qu’elle avait du mal à encaisser d’en savoir autant, non… Elle ne cessait d’être prise de sentiments contradictoires qu’elle n’arrivait plus à gérer. Elle était une fois en proie à une colère sourde, et d’autres instants à une tristesse infinie et à une impuissance détestable. Trop d’émotions ne cessaient de s’évacuer, que les larmes finirent par rouler toutes seules sur ses joues sans qu’elle s’en aperçoive. La jeune femme en prit connaissance quand ils se retirèrent mutuellement à bout de souffle. Elle se trouva dès lors bien idiote et ne sut quels mots adresser à son amant. Elle le regarda quelques instants, elle-même stupéfaite de se laisser autant aller avant de finalement baisser la tête penaude, et de couvrir ses yeux de sa main, comme si ce geste pouvait effacer le fait qu’elle était en pleurs. Pourtant, elle ne s’arrêta pas pour autant et les larmes dévalèrent de plus belle ses joues.

« Je... Désolée… »

Mizeria réprima un sanglot et se hait de plus belle, elle prit très vite peur qu’il interprète mal sa réaction et comprenne tout de travers. Mais arriverait-elle encore à tout retranscrire et à lui faire comprendre ce qu’elle ressentait ? Il lui fut quelques instants avant de remettre de l’ordre dans ses idées, et sa première réaction fut d’appuyer son front contre le torse du brun, s’octroyant ainsi une cachette de fortune. Elle regarda un instant ses propres larmes tomber sur le bas du haut du brun et elle ferma les yeux de plus belle. Dieu qu’elle était faible… Et pourquoi ? Parce qu’elle l’aimait infiniment. Ces deux états de faits lui convenaient pourtant sans soucis.

« Rai… Je suis tellement désolée… Je… C’est pas de la pitié crois moi… C’est juste que j’imagine ce que tu as vécu et ça me… Ca me fait tellement mal pour toi. »

Bêtement, elle n’arrivait pas à trouver les bons mots. Ils étaient pourtant cruciaux après de telles révélations. Elle n’avait pas le droit de le blesser d’avantage mais l’art des mots n’étaient pas le sien… Elle ignorait comment être pertinente et concise.

« Si je pouvais seulement remonter le temps… Si je pouvais faire quelque chose pour toi. C’est prétentieux de ma part de te dire ça, j’en ai conscience. Mais je ne sais pas comment te l’expliquer autrement. Si je pouvais j’aimerais effacer tout ce que tu as vécu… J’aimerais rendre tout bien plus simple et merveilleux pour toi… »

Toujours aussi pataude, elle attrapa maladroitement son haut d’une de ses mains et le serra. Son cœur semblait toujours plongé dans un tumulte d’émotions et peinait à faire le tri dans celles-ci et d’harmoniser ses pensées. Elle voulait lui exprimer tant de choses… Et surtout elle avait tant à lui dire. Que cela soit vis-à-vis de ce qu’il lui avait raconté, de ses réactions, des mots qu’elle voulait lui adressée, au même encore au sujet de tout ce qu’elle ne lui avait pas encore dit sur elle et sur leur venue près de Londres. Tout se bousculait dans sa tête et elle avait l’impression qu’elle allait exploser. Ses larmes continuaient de rouler inlassablement sur ses joues et la pensée de Rai plus petit et abandonné ne la quittait pas. Finalement, elle prit son courage à deux mains et tacha d’être la plus sincère possible. Elle se redressa quelques peu, remettant néanmoins une main sur ses yeux sentant ceux-ci faiblirent sous les larmes et toujours trop honteuse pour accepter son état et le dévoiler complètement.

« J’aimerais te dire tant de choses… Il faut que je te dise également certains faits, que je te raconte aussi quelques éléments de mon côté mais ça attendra. Je ne faillirais pas… Parce que je te le dois bien. Vraiment, je te jure que ce n’est pas de la pitié ou bien une tentative de te materner… Je… J’aimerais juste pouvoir t’offrir tout ce que tu aurais dû avoir et te faire justice bien que tu l’as déjà fait toi-même. A défaut… Je te jure que je ferais de mon mieux pour toi. C’est bien égoïste et prétentieux à nouveau mais je veux t’apporter tout ce dont tu as besoin, tout ce que tu mérites… Parce que mon dieu, tu mérites tellement… Et tu es tellement important aussi. »

Malgré sa tristesse et ses sanglots, un sourire passa sur ses lèvres. Maladroitement elle décida de tenter de sécher enfin ses larmes. Si elle se mettait à déclamer haut et fort qu’elle était prête à tout et qu’elle voulait lui offrir le meilleur, elle se devait d’être logique. Il ne méritait pas ses larmes, même si celles-ci se faisaient vicieuses et dures à arrêter. Comme une enfant, elle tacha d’essuyer le plus gros de ses larmes à coups de revers de poignets. Un rire presque nerveux mais pourtant léger s’échappa de ses lèvres. Elle avait l’impression que son cœur s’apaisait, mais pourtant... Ce n’était que pour s’emballer de plus belle à peine elle croisa son regard. Un autre sourire passa sur ses lèvres et elle ferma les yeux pour mieux s’imprégner des nouveaux sentiments qui prenaient le dessus.

« Je t’aime tellement… C’en est dévorant… »

Si elle rouvrit les yeux, elle ne rajouta rien de plus. Elle se contenta de le regarder simplement quelques instants, puis elle prit sa main et entrelaça leurs doigts. Il l’avait dit lui-même quelques jours plus tôt, il l’aimait et ce bien plus qu’aucun mot ne le dira jamais. Ils étaient fusionnels jusqu’à ce point-là car elle éprouvait la même chose. Elle songea donc qu’elle n’avait pas besoin de le lui dire textuellement, il pouvait sans nul doute lire en elle comme dans un livre ouvert.. Du moins elle l’espérait. Ses lèvres se déposèrent sur sa main et elle lui adressa un doux baiser avant de conserver celle-ci contre elle. Quelques larmes roulèrent encore sur ses joues en repensant à tout ce qu’il lui avait avoué et tout ce que ça avait suscité chez elle. Doucement, elle avala la maigre distance qui les séparait de nouveau et déposa un court baiser sur ses lèvres avant de coller son front au sien, veillant à ne pas rajouter de larmes sur son haut ou sur ses propres joues.

« Merci de m’avoir tout dit… Je tacherais de m’en montrer digne. »

Elle n’était pas idiote, elle savait ce que ça avait dû lui couter. Livrer son passé, surtout quand il s’agissait d’évènements si tragiques, ne pouvait être que dur et rouvrir de vieilles blessures… Elle s’était livrée au même exercice quelques semaines plus tôt, elle n’en ignorait donc pas les conséquences pour le brun et ce qui avait dû remonter à la surface… Une fois de plus elle se sentit peinée pour lui, mais incroyablement reconnaissante. Elle resta ainsi contre lui, sa main serrant toujours aussi fort mais raisonnablement tendrement la sienne, leurs fronts collés et les yeux clos pour laisser ceux-ci se reposer quelques peu. Bien qu’elle vît de nouveau, elle s’en rendait compte qu’elle n’était pas encore au maximum de sa récupération. Pleurer de la sorte ne faisait que lui montrer que ses pauvres yeux n’étaient pas encore tout à fait prêts, il n’avait guère apprécié un tel flot de larmes. Cependant, elle s’en fichait. Elle avait encore le temps de soigner ses plaies, de guérir en douceur aux côtés de Rai et de veiller sur son rétablissement également. Pour l’instant rien n’importait… Ils étaient loin de tout et n’avaient qu’à se concentrer l’un sur l’autre. Les problèmes sauraient bien évidemment les retrouver, mais elle les attendait presque de pied ferme. L’ex Leone était plus que jamais résolue à se battre et surtout à vivre. Ce n’était plus que dans son propre intérêt. Désormais elle allait s’évertuer à un nouvel art, à une nouvelle façon de penser… Celle de le faire pour deux. Il était sien et elle était sienne.


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MessageSujet: Re: What do I do because of you ?    What do I do because of you ?  EmptyMar 16 Oct - 16:28



Dans les yeux de la vérité.



Il avait tout lancé d'une traite : il avait prononcé ces paroles en semblant particulièrement morne, abattu, terrassé par la fatalité qui, pourtant, l'habitait depuis des années et des années. Si l'on pouvait naïvement croire que ce genre d'expériences, comme toutes les autres, étaient destinées à s'estomper puis à tomber dans l'oubli au fil des mois, a fortiori lorsqu'elles concernaient des enfants d'un parfois très jeune âge, le noiraud avait fini par se persuader du contraire. Après tout, il n'était pas un jour qui ne le fasse frissonner d'effroi à la pensée de ces disparitions, et pas une heure qui ne s'écoule sans le faire vibrer de colère et d'aigreur. La présence rassérénante et amoureuse de Mizeria, bien entendu, lui avait grandement servi à réguler ses humeurs ces derniers temps. Elle était devenue comme une espèce de vanne qu'il ouvrait afin de laisser s'écouler abondamment le purulent fiel qu'il avait jusqu'à présent jalousement conservé en son sein, comme si cultiver son ressentiment allait lui permettre, à terme, de transcender sa condition originelle, celle d'un être faillible et imparfait. Il le savait : vivre pour la rancune et à travers elle seulement ne lui avait causé que des torts, et avait à de multiples reprises bien failli lui coûter la vie. Il était grand temps qu'il passe à autre chose, qu'il s'applique consciencieusement à mener une autre existence... Et sa dulcinée était possiblement celle qui allait lui permettre de franchir ce cap vertigineux, de passer d'une vie à l'autre, de s'acclimater à de nouveaux rites, à de nouvelles habitudes, à de nouveaux réflexes. Il tâcha de se focaliser sur cet espoir tandis que leurs langues se liaient et se déliaient de plus en plus fiévreusement : il reprit son souffle, enfin, en mirant l'air hébété les larmes qui perlaient le long des joues de sa chère et tendre.

Oh, bien sûr, Rai s'attendait à ce que ce qu'il avait à lui conter participe à la chambouler quelque peu. Il imaginait qu'elle serait étonnée de le voir si sincère, énervée par le comportement odieux des criminels qu'il avait pu croiser durant sa basse enfance, attristée par le destin funeste qui avait été celui de ses jeunes années... Mais l'intensité des émotions, celle-là, il l'avait profondément sous-évaluée. Aussi se contenta-t-il, terriblement maladroit, de la conserver contre lui en écoutant silencieusement les paroles qu'elle avait à lui offrir, les explications parfois chancelantes et timides qu'elle tentait de lui fournir. Il aurait, bien sûr, aimé la contredire, la couper dans son élan et affirmer qu'elle n'avait guère besoin de se munir de si denses précautions : il ne prenait pas cette tristesse accablante négativement... C'était tout le contraire. Il sentait son cœur battre d'un sentiment nouveau, curieux et pourtant grisant. Il eut un relent de culpabilité en croyant qu'il était simplement satisfait de la voir affligée par les maux dont il avait à souffrir, mais il comprit que ça n'était rien d'aussi sadique : il était simplement soulagé de savoir qu'il importait à quelqu'un à ce point, heureux de remarquer que son passé terrible pouvait susciter l'empathie malgré toutes les horreurs dont il s'était par la suite rendu coupable. D'une certaine manière, il vouait à l'ex Leone une gratitude grandement requinquée. Instinctivement et puérilement, il avait certainement craint qu'elle ne s'énerve, qu'elle juge finalement que toutes ses expériences et tous ses traumatismes n'étaient que poussière, que fumisterie comparativement à tout le tort qu'il avait, de son côté, pu causer. Il n'aurait pas pu lui en vouloir, à ce titre : il savait que le cheminement de sa pensée était extrême, radical au possible, et que rares étaient ceux qui pouvaient consentir même à demi-mot à sa légitimité. Pourtant, une fois de plus, la Balogh démontrait la plénitude de l'amour qu'elle lui accordait : elle ne lui accorda pas un seul reproche, pas même l'ombre d'une ironie cinglante, et se contenta a contrario de lui offrir toute l'affection qu'elle était capable de lui communiquer. Lui, de son côté, demeura particulièrement sage : cette fois, c'était à lui d'écouter, de se taire pieusement... Il le fit, donc. Le Nagafuse sentit les lèvres de la jeune femme se poser sur sa main, puis les vit s'animer pour le couvrir d'une révélation assommante qui, curieusement, parvint à attirer sur son faciès un sourire certes encore timide, comme maladif, mais néanmoins éclatant de bonheur. Les confessions qu'elle venait de lui faire et, bien entendu, les remerciements francs qu'elle prononça ensuite contribuèrent à offrir au noiraud un regain d'ardeur et d'engouement : il le mit à profit sans plus attendre, tandis que leurs fronts réunifiés laissaient à leurs yeux tout loisir pour se contempler.

-Tu t'en montres déjà digne. Le simple fait que j'ai pu me livrer à ce point en est une preuve indéniable... Tu es la première à connaître mon histoire avec un tel degré de précision et... Je pense que tu seras la seule.

C'était triste de l'affirmer de la sorte, avec une conviction aussi inébranlable, mais cela ne faisait que remettre en valeur l'efficacité avec laquelle Mizeria avait su déjouer tous les pronostics et s'infiltrer promptement au sein de la carapace pourtant quasiment inexpugnable du noiraud. C'était un exploit que nul n'avait jamais su réaliser, et que nul ne saurait jamais réaliser à l'avenir, car c'était un exploit qui, Rai le savait, pouvait à terme le conduire à sa perte. Force était d'admettre qu'il avait fait de la jeune femme sa raison de vivre, de subsister : il l'avait troquée contre la vengeance. Un échange pour le moins savoureux, dont il se délectait jour après jour, tant qu'il demeurait à ses côtés, mais un échange qui lui ôtait néanmoins une certitude. Si ses sentiments demeuraient inchangés éternellement, il pouvait encore arriver malheur à la jeune femme, tout comme les hostilités avec Mephisto avaient pu le montrer. Ils n'étaient ni intouchables, ni invincibles... Ils étaient à la merci de forces qui les outrepassaient largement, à commencer par les Auditore, et pouvaient donc passer de vie à trépas en un claquement de doigts. Or, si elle tombait, si elle disparaissait de la plus horrible des manières, si elle le délaissait et le condamnait à la solitude, à l'errance... Il craignait de n'avoir plus jamais la force de surclasser ses démons. Il risquait d'être leur prisonnier jusqu'à sa propre fin, qu'il risquait, également, de précipiter drastiquement. Peut-être aurait-il l'audace de faire payer au meurtrier de sa chère et tendre, mais son ambition originelle, celle de créer un monde meilleur, s'en irait sans doute dans la tombe en même temps qu'elle. Parce qu'il ne pourrait concevoir de monde doux sans la présence de l'ex Leone, il ne verrait plus jamais l'intérêt à livrer une bataille qu'il considérerait comme étant perdue d'avance. L'homme était ainsi fait qu'il penchait constamment naturellement vers la bonté ou la cruauté... Et il y en aurait forcément qui, de tout temps, à toute époque et dans toutes les circonstances possibles, choisiraient la deuxième de ces deux options antonymes.

-Tu vas sans doute trouver ça grotesque... Voire stupide, mais... Pour la première fois depuis cette époque, je crois que je ne regrette rien. J'aurais aimé que les choses se déroulent mieux, sans encombre, bien sûr... Que je n'entre jamais dans le milieu de la mafia... Mais le fait de t'avoir trouvée est un réconfort tel qu'il me permet de relativiser puissamment. Je ne peux pas dire que les choses n'auraient pas pu être plus douces et plus délectables encore mais... Au final... C'est peut-être un moindre mal, si j'ai l'opportunité d'évoluer à tes côtés quotidiennement.

Il croyait fermement en ces mots qu'il venait de prononcer, tout en parcourant la joue de la demoiselle d'une main distraite. Son cœur avait tant et tant saigné que l'avoir à ses côtés était comme l'apothéose de toute une vie, comme le firmament atteint en un éclair. Tous les ébats passionnels et fougueux, toutes les réussites glorieuses et toutes les révélations jouissives n'auraient probablement pas lui fournir autant d'enthousiasme et d'engouement à l'idée de continuer à livrer bataille que sa seule présence. Elle l'éclairait, comme un ciel étoilé certes relativement intrusif, mais qui le couvrait si globalement et d'une lumière si douce qu'il ne pouvait que s'en sentir grandement rassuré. Avait-elle jamais manqué de tact ou de délicatesse à son encontre ? Difficile à dire. Tout avait été si vite, tout s'était enchaîné avec une telle virulence qu'il était incapable de l'affirmer... Pour autant, l'ancien gardien des Auditore était convaincu qu'elle avait agi pour le mieux. Si elle avait manqué d'ardeur ou si elle avait péché d'assurance à un seul instant, au court de leur brève mais néanmoins intense cohabitation, il aurait sans doute éprouvé une peine bien plus titanesque à l'idée de lui livrer ses démons sur un tel plateau d'argent. Finalement, les mots étaient comme apparus d'eux-mêmes, trop empressés à l'idée d'être révélés au grand jour... Était-ce là la psychanalyse dont il avait absolument toujours eu grand besoin ? Une fois de plus, il s'agissait là d'une question à laquelle le Nagafuse ne savait pas répondre. Il aurait aimé affirmer que sa vie ne connaîtrait plus jamais de tumultes orageux, qu'il vivrait simplement, de béatitude en ravissements plus spécifiques... Mais son cœur était encore et toujours ceint d'une myriade de ténèbres insondables au sujet de l'avenir. Il souffrait de trop d'incertitudes : il avait toujours été craintif et inconsolable et il continuerait probablement à l'être longtemps durant. Seul le passé lui apparaissait limpidement, dans la clairvoyance tranquille qui succédait à ses cascades d'aveux...

-Si tu éprouves l'envie de me dire quoi que ce soit, bien sûr, n'hésites pas. Je veux être là pour toi... Si tu estimes qu'il vaut mieux, pour l'heure, nous concentrer sur d'autres choses, j'en serai ravi aussi. Je veux simplement vivre un peu, avec toi... Sereinement, tranquillement. Sans n'avoir à songer à rien d'autre, ni à personne...

Une vie quiète et banale. La tranquillité, il l'avait toujours exécrée : elle était affligeante, engluait de savants esprits dans l'inaction et la paresse. Pourtant, d'un autre côté, il imaginait désormais qu'il l'avait exécrée précisément car il l'avait toujours follement désirée. Elle était le saint Graal, la promesse d'une existence sereine et sans bouleversements majeurs, sans peurs ni doutes... Il aurait aimé y prétendre, mais le chemin qu'il avait choisi l'avait toujours empêché d'y tremper, même sporadiquement. Il était un être de chaos, de péripéties diverses et variées... Lorsqu'il n'y contribuait pas activement, il avait à les subir, à les réparer, à les nullifier d'une manière ou d'une autre. Il n'était pas une seconde durant laquelle ses méninges ne s'activaient pas, pas un instant infime durant lequel ses boyaux ne s'entortillaient pas, anxieux, à l'idée des myriades de projets qu'il devait mener à bien communément, conjointement. Lorsqu'il jetait un coup d’œil au chemin parcouru, il éprouvait un étrange mélange de fierté et de mélancolie : comme s'il avait conscience du fait que tout ce qu'il avait pu entreprendre était formidable et unique, mais que tout cela était, dans le même temps, à la fois vain et inquiétant pour le commun des mortels, comparativement aux petites vies tranquilles des uns et des autres. Et cette fois-ci, précisément, il avait conscience du fait que lui et l'ancienne Leone touchaient ce bonheur simple du bout du doigt. Ils avaient l'occasion de passer quelques jours ensemble, dans l'intimité inébranlable du couple qu'ils constituaient. Il avait rêvé d'une vie normale, et il pouvait désormais se l'offrir, certes temporairement, mais néanmoins tangiblement, aux côtés de la femme qu'il aimait tendrement.

-On devrait bouger un petit peu, non ? Plutôt que rester enfermés... Si tes yeux vont bien, c'est peut-être l'occasion de t'oxygéner un moment. Le soleil ne doit pas être bien agressif...

Rai avait envie de sortir : lui qui avait pourtant jusqu'à présent été si secret et si pudique brûlait d'envie de s'exposer en une si gracieuse compagnie, de prouver à toutes et à tous qu'il était l'objet de son désir, de son amour, et qu'il le lui renvoyait plus que généreusement. Encore une fois, c'était un sentiment curieux et dépaysant, auquel il s'abandonnait pourtant bien volontiers. Cette escale à Londres était sans nul doute possible une occasion en or afin d'expérimenter de nouvelles sensations : ici, ils étaient de parfaits inconnus, des anonymes complets, et ils pouvaient donc se comporter comme les derniers des touristes sans risquer d'attirer les complots et les tragédies. Pour une fois, ils jouissaient d'une occasion unique qu'ils n'avaient qu'à mettre à profit : celle de subsister comme les simples amoureux transis qu'ils étaient actuellement et qu'ils auraient pu demeurer éternellement, dans une autre vie, si la mafia n'avait pas été une partie colossale de leurs histoires respectives.
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MessageSujet: Re: What do I do because of you ?    What do I do because of you ?  EmptyDim 4 Nov - 23:43

What do I do with you?
I look at you and I think of you even more


La jeune femme avait enfin réussi à se calmer et à ravaler ses larmes, permettant à ses yeux de retrouver un semblant de stabilité. Quand elle avait rouvert ses derniers, elle s’était retrouvée perdue dans ceux de Rai. Il était là, elle devait désormais se concentrer sur ce seul et unique fait. Son cœur se serra encore à imaginer tout ce qu’il avait pu vivre et ressentir depuis son plus jeune âge, mais désormais elle ne voulait plus lui montrer ses larmes. Certes, sourire aurait été déplacé. Pourtant, ses lèvres s’étirèrent quelque peu en voyant que son cher et tendre en faisait de même. Il avait l’air d’aller bien, de se sentir plus à l’aise, voire peut être d’être soulagé ? C’était ce qu’elle espérait tout du moins. Son sourire était léger mais elle avait appris avec le temps à les déceler et à les apprécier grandement. Même le plus micro des sourires avait son importance et pouvait être lourd de sens… Et chacun prenait d’autant plus d’importance désormais qu’elle connaissait son passé. Étrangement, il lui sembla sentir son cœur se réchauffer à le voir ainsi. Comme si de nouveau il arrivait à la faire fondre avec si peu. Les mots qui suivirent ce timide sourire achevèrent d’embraser son cœur, et même ses joues. La blonde se sentit rougir à vue d’œil. Avait-il compris la promesse voilée qu’il venait de lui faire ? Il songeait qu’elle serait à jamais la seule à connaitre autant de choses sur lui et cela prouvait à quel point elle était digne… Il lui offrait trop d’honneurs. Son rougissement demeura un long moment, alimenté par tout ce qu’elle arrivait à esquisser de leur futur… Oui, elle voulait croire qu’ils en avaient un. Que ce qui les attendait n’était que promesses de bonheur et de quiétude. Ils n’avaient jamais abordé le sujet ensemble, mais elle aimait à croire qu’entre ses mots elle décelait son envie de continuer à avancer main dans la main jusqu’à ce que la fatalité les rattrape. C’était idiot et stupide, mais elle se sentait rassurée. Au fil des jours, l’évidence s’était faite encore plus forte que leur amour naissant et s’était gravée dans son cœur : elle n’arriverait plus à vivre sans lui. Évidemment, tout cela paraissait bien prétentieux au premier abord. Ils étaient encore aux prémices de leur relation, et tout s’enchainait vite, peut-être trop vite et surtout trop bizarrement aux vues des récents événements… Mais elle ne doutait pas. Son instinct ne lui mentait jamais, il y avait quelque chose d’unique qui avait commencé. Ils ne s’étaient pas trouvés par hasard... Après tout le destin même semblait prendre un malin plaisir à les faire se croiser. Alors peut être que leur futur risquait d’être encore fort en rebondissements, ce qui n’allait pas les effrayer et les séparer. Ils semblaient bien d’accords pour les vivre conjointement.

En parlant de destin, la perspective que Rai aborda lui arracha un autre sourire. Certes beaucoup plus mitigé que le précédent car elle voyait dans ce « mal pour un bien », les erreurs passées du brun, mais elle était touchée. Les mots étaient maladroits surement, malgré tout elle comprenait où il voulait en venir. Le chemin du noiraud aurait pu se dérouler autrement, ses choix et ses actes auraient pu l’éloigner de tant d’horreurs et éviter de le transformer en un tel personnage. Pourtant au fond, il était resté fidèle à celui qu’il aurait toujours dû être… Dès leur première rencontre, elle avait voulu croire qu’un tel homme existait sous cette odieuse carapace, que tout le reste n’était que mascarade… Et elle avait eu raison. Certes, tout cela n’effaçait en rien ce que Rai avait fait. Les vies enlevées étaient toujours là… L’ex Leone n’ignorait pas qu’elle n’avait nul besoin de lui rappeler. Il le savait pertinemment lui-même car il était surement suffisamment hanté par ses dernières. Il s’était à coup sûr transformé et comporté comme un monstre toute sa vie en repentance pour tout cela. Il lui semblait que pendant trop longtemps il s’était privé de tout soutien et de tout contact avec les autres comme punition… Il était temps de changer. Elle ne voulait pas le transformer ou dicter sa vie, bien loin d’elle cette idée saugrenue… Non. Elle voulait qu’il s’épanouisse comme celui qu’il aurait toujours dû être, qu’il n’ait plus peur d’assumer ses sentiments, qu’il sache que désormais il ne serait plus jamais seul. Ils allaient être deux pour accomplir son plan… Le chemin en serait forcément différent. Du moins c’est que Mizeria espérait.

Au fond, elle était terrifiée d’avoir rejoint les Auditore. Elle craignait d’avoir à effectuer des missions et des tâches bien loin de ses principes… Elle savait qu’appartenir à une telle famille n’était pas facile. Et c’était en partie pour cela qu’elle pouvait encore moins jeter la pierre à Rai. La réalité des choses l’avait encore plus frappée que ce qu’elle avait bien pu imaginer sur cette famille. Après quelques jours au QG, elle s’était sentie bien sotte de ne pas avoir réalisé avant l’horreur et l’ampleur de leurs actes… Pire encore, elle s’était engagée sur cette voie terrifiante, et plus horrible toujours, elle avait laissé Rai continuer ce chemin…. Ces craintes-là, elle n’avait toujours pas osé en parler à Rai… Elle avait peur que les regrets fleurissent et que tout cela ne fasse que ternir leur relation. De toute évidence, peu importe ce qu’elle allait faire désormais, leur couple allait potentiellement être de nouveau ébranlé… Lui livrer ses peurs était peut-être la chose la plus simple à faire au final, car lui dire la vérité sur ses vraies intentions était plus délicat. Si elle regrettait parfois son choix, elle se rongeait encore plus les sangs de ne pas lui avoir tout raconté. C’est pourquoi elle resta silencieuse quand il aborda le sujet. Elle devait lui dire, et pourtant les mots ne sortaient pas. Elle était incapable de lui dire qui elle était vraiment, que se servant de ce tel statut elle lui avait intimé de continuer son parcours pour ainsi l’aider et acheter sa place au sein des Leone par la suite… Même si son véritable but était une nouvelle fois pensé pour deux, elle se sentait terriblement honteuse, presque comme si elle était en train de le manipuler. Et sa plus grosse crainte résidait là, elle ne faisait que grandir plus elle tardait… Plus les jours s’égrenaient et plus il risquait de croire qu’elle s’était jouée de lui depuis le début. Si le brun le prenait ainsi, elle ne pourrait lui en vouloir. Mais arriverait-elle à le convaincre que ce n’était nullement le cas, à aucun moment ?

Toutes ces perspectives ne lui arrachèrent qu’un grognement quand il lui glissa l’idée de sortir… Le cœur n’y était pas vraiment, il y était même à moitié. Bien sûr, elle avait envie de profiter des quelques jours avec lui... Et sortir comme des gens normaux en faisait partie. Mais pourtant, elle avait presque envie de profiter de lui jalousement seulement, de rester dans cette maison jusqu’à être rassasiée de sa présence, de ses bras, de ses mots, de ses lèvres, de son être tout entier... Chose qu’elle n’ignorait pas être impossible désormais. Il lui fallait être raisonnable. Sur tous les points de vue. Puis s’ils sortaient… Il fallait qu’elle règle ce pour quoi elle était venue. Choisir Londres comme destination n’avait pas été anodin... Encore moins ce quartier. Une nouvelle fois un relent de culpabilité vint la saisir. Qu’allait-il finir par penser ? Qu’elle l’utilisait pour avoir des informations sur les Auditore et qu’elle lui faisait miroiter un moment ensemble pour mieux servir ses intérêts ? Une nouvelle fois les risques étaient là. Et elle était incapable de lui avouer qu’elle était venue pour passer à la maison de ses parents récupérer quelques petites choses et en profiter pour lui montrer une partie de son passé… Elle se sentait nulle. Le soupire qui quitta ses lèvres et ses yeux qui se baissèrent en témoignèrent. Un dernier grognement suivit, mais uniquement dirigé contre elle-même, et telle une enfant elle plongea son visage au creux du cou de Rai.

« Désolé…. Oui tu as raison, on devrait sortir… Et.. Peut-être ça ira mieux pour te parler de tout. D’ailleurs j’aimerais t’emmener quelque part aussi… Mais je crains que tout risque d’être un peu difficile pour moi. Autant trouver les bons mots, tout t’expliquer et… Y aller… »

La blonde marqua par la suite un long silence, préférant se concentrer sur le parfum de son amant. Elle était déjà retournée maintes fois chez elle depuis qu’elle avait tout perdu. Cette fois ci aurait dû être aussi anodine que les autres. Ça n’était pourtant pas le cas. Cette fois elle y retournait après l’affaire d’Ox, après qu’elle ait eu plus que le loisir de revoir toutes les vidéos de son passé. Elle allait aussi surement passer à côté de la chambre de ses parents, après l’incident du tableau où elle avait appris qu’elle n’avait pas été là pour son père et qu’à peu de choses près il n’aurait pas choisi la mort et serait toujours à ses côtés. Elle se sentit larmoyer à cette idée. Qu’aurait été sa vie si son père était sorti de prison et l’aurait sauvée de lui-même du bordel d’Hado ? Si au lieu de partir s’entrainer à devenir une mafieuse en herbe, elle serait restée quelques jours de plus pour le retrouver ? Où serait-elle désormais ? Elle qui pensait avoir épuisé son quota de larmes pour la journée, les sentit revenir au galop. Il fallait que son esprit s’éloigne de ses pensées ci, c’était juste de la pure torture à laquelle elle ne devait pas penser. Une nouvelle fois elle tenta de se concentrer sur le brun, et elle se rendit ainsi compte que si les choses s’étaient déroulées autrement, jamais elle n’aurait croisé sa route… Elle prit une grande inspiration à cette révélation, remarquant par la même occasion qu’elle manquait d’air. Oui, il était temps qu’elle sorte s’oxygéner et qu’elle profite de sa vie pour ce qu’elle était à l’heure actuelle. Tout n’était pas que sombre et triste. Rai était une partie de sa vie désormais. Se reprenant quelque peu, l’ex Leone réussit à extraire son visage du réconfort que pouvait lui apporter la nuque de son amant. Malgré la tristesse qu’il pouvait surement lire dans ses yeux, elle lui adressa un sourire. Il serait surement bon de tout l’expliquer et de lui dire tout ce qu’il pouvait lui apporter également…

« Sortons… C’est une très bonne idée. Je vais aller me préparer et prendre une douche au passage… Libre à toi de venir si tu veux aussi… »

Doucement elle prit son visage entre ses mains et l’embrassa. Le baiser fut bref mais doux avant qu’elle ne se retire et se lève par la suite pour partir en direction de leur chambre et de la salle de bain. Elle passa dans la première pièce dans l’optique de choisir des vêtements. Ils avaient pris peu de choses au final… Mais elle ne les avait même pas vues. A vrai dire, elle avait même l’impression de découvrir la maison même si elle connaissait parfaitement tous les couloirs et pièces pour se déplacer. Regardant rapidement dans sa valise, elle chercha pour quelques habits et tiqua bien vite sur certaines affaires… Julia avait absolument tenu à l’aider pour partir, prétextant que Rai ne pouvait pas choisir assez judicieusement… Et la blondinette venait de comprendre pourquoi. Son air se perdit entre une fausse colère et de la gêne. C’était bête pour la jeune médecin, l’ex Leone allait retourner malheureusement un jour ou l’autre au QG Auditore et elle comptait bien lui en reparler. Cependant, la jeune femme sembla s’arrêter sur une robe. Il était vrai qu’elle n’avait pas l’habitude d’en mettre, sauf en missions ou pour des occasions encore... Mais jamais de son propre chef pour profiter de son temps libre. Elle se retrouva bêtement à la regarder et à songer que ce n’était pas si bête… Elle savait qu’elle n’avait pas l’obligation de s’habiller différemment pour le Nagafuse, pourtant cette robe lui donnait l’idée et surtout l’envie de le faire. Leurs seules sorties jusqu’à maintenant avaient été des missions ou des ennuis… Pour une fois elle pouvait s’apprêter et profiter d’une sortie normale en couple. Oui, aujourd’hui ils pouvaient s’offrir le luxe de faire comme tout le monde... Alors sans plus hésiter elle emporta la robe et d’autres petites choses. C’est presque pressée qu’elle entra ensuite dans la salle de bain, posant tout près d’un lavabo et se déshabillant. Son regard croisa le miroir et elle fit la grimace. Elle avait une sale tête… En même temps, elle n’avait pas eu le loisir de se regarder depuis plusieurs jours. Soupirant de nouveau elle se débarrassa des derniers vêtements et entra sous l’eau chaude, fermant les yeux pour en profiter de tout son saoul. Tout cela ne pouvait que lui faire du bien… Savourer l’eau chaude, prendre soin d’elle et après profiter avec Rai. Le but de leur escapade était bien là. Ses pensées s’égarèrent sur le brun à nouveau pour s’empêcher de songer à leurs soucis et aux démons de son passé. Elle espérait qu’il n’avait pas été trop choqué de son attitude même s’il devait surement commencer à se faire à son tempérament de tornade. Elle ne lui avait pas non plus caché qu’elle n’était pas très bien à l’idée des confessions qu’elle devait lui faire… Et malheureusement son tempérament voulait aussi qu’elle change un peu trop vite de sujet ou d’activité dans ces moments-là. Il ne fallait juste pas qu’il s’inquiète outre mesure. Elle aurait de toute façon rapidement l’occasion de lui parler voire de se faire pardonner si jamais, et ce peu importe qu’il choisisse de la rejoindre ou qu’il l’attende pour sortir… Elle ignorait pourquoi mais la perspective de sortir avec lui l’angoissait autant que cela pouvait la rendre impatiente… Elle voulait lui faire partager une partie de son monde, et surtout qu’ils puissent être à l’abri et heureux dans le leur quelques jours.


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MessageSujet: Re: What do I do because of you ?    What do I do because of you ?  EmptyJeu 17 Jan - 16:02



Dans les yeux de la vérité.



Elle ne s'était pas énervée, contre toute attente, lorsqu'il avait maladroitement sous-entendu ne rien regretter de son passé au regard du présent qui lui était actuellement offert : sans doute avait-elle compris où il voulait en venir. Ce n'était guère dans les habitudes du noiraud de jouer au joli-cœur, mis-à-part bien sûr dans le cadre de ses missions et des multiples rôles qu'il avait eu à embrasser au fil de sa funeste carrière... Combien de fois avait-il dû séduire une femme qui n'était ni ne serait jamais rien pour lui ? Combien de fois avait-il dû se frayer un chemin jusqu'à la couche d'une mafieuse ou d'une avocate, dans l'optique de mettre la main sur des dossiers compromettants, sur des informations croustillantes ? La patience, cela avait été son cheval de bataille principal... Si on omettait la fausseté et l'hypocrisie, bien sûr. Il avait tant et tant menti, sur tant de sujets et à tant d'occasions qu'il était parfaitement incapable de se remémorer ne fût-ce que d'une moitié des bobards distillés au fil des ans. Pourtant, il jouissait d'une mémoire excessivement efficace, et apportait un grand soin à tout ce qu'il tissait, à tout ce qu'il déclarait, aux interlocuteurs avec lesquels il livrait des versions différentes et parfois même contradictoires d'une seule et même chose. Il ne devait ni ne pouvait jamais se tromper lorsque sa langue devenait plus vicieuse qu'un serpent, lorsqu'il sacrifiait la vérité sur l'autel de son progrès, de l'avancement de sa terrible quête... Oui, sous tous les aspects, Rai n'avait jamais été rien d'autre qu'un menteur hors norme, qu'un manipulateur olympique, sinon carrément légendaire. Pourtant, il n'y avait actuellement rien de plus qu'une fascinante spontanéité, à laquelle il n'avait que trop rarement goûté. Le mensonge s'était ancré en lui comme une seconde nature, comme une seconde peau qui recouvrait la première à l'instar d'une armure rassurante et protectrice. Il ne quittait quasiment jamais ce heaume impénétrable, sinon lorsqu'il se savait seul et à l'abri de l'indiscrétion de ses multiples ennemis... La vérité, c'était qu'il avait même peur de faire montre d'honnêteté, parce qu'il avait jusqu'alors eut peur que l'on perce le secret de sa véritable nature. Envers et contre toutes ses précautions, au nez et à la barbe de tous les pronostics, la Leone avait toutefois su contrecarrer ses multiples précautions afin de ravir son cœur et de s'y dénicher une place privilégiée : cela méritait bien un brin de romantisme, non ? Le Nagafuse se rendait compte que leur couple jouissait d'une valeur toute particulière, car il s'était forgé d'une façon improbable, inconcevable, dans le sang et les larmes. C'était là une promesse d'espoir touchante, à laquelle il se raccrochait sans cesse, ces derniers jours...

Lorsqu'elle prit la parole, l'éloignant momentanément du fil de ses pensées, il arqua un sourcil mais demeura silencieux, interdit. Que dire ? Il avait bien entendu perçu l'espèce de lourdeur dont Mizeria demeurait imprégnée, comme si ce qu'elle avait à lui montrer pesait bien trop lourd sur ses frêles épaules... Elle n'était pas capable d'aborder ce sujet avec légèreté : il eut donc l'intime conviction que cela touchait à sa famille, à son propre passé. Avait-il malencontreusement ravivé une douleur ancienne et déchirante en lui faisant part de ses propres chimères passéistes ? Il eut un soupçon de regrets, qu'il conserva toutefois secrètement, précieusement cantonné à son for intérieur : il ne pouvait pas se permettre de lui en faire part. Bien sûr, il ne voulait pas jouer à l'égoïste : il voulait tout sauf cela, en lui exposant les blessures que le temps lui-même n'avait su refermer. Il avait voulu la mettre au courant, par souci de clarté et de transparence, lui montrer ce qu'il était au fond de lui, ce qu'il avait toujours été. Lui montrer qui était réellement l'homme dont elle s'était entichée, en somme... Et certainement pas la ramener à ses propres heures sombres. Comme elle avait néanmoins eut la décence de ne pas l'interrompre, et de demeurer, sage et coite à ses côtés, tandis qu'il n'en finissait plus de lui exposer sa litanie plaintive, il se dit également qu'il n'avait nul autre choix que celui de l'accompagner, quelle que fût la pénibilité sentimentale des moments qu'ils allaient devoir traverser conjointement. Cela semblait être une évidente banalité, mais c'était à la fois étonnamment nouveau pour le Nagafuse, et difficilement acceptable considérant qu'il avait lui-même été remué par sa tirade, quand bien même il n'en montrait quasiment rien. Il savait cependant que Mizeria était forte, et qu'elle n'était pas du genre à s’apitoyer sur son sort sans raison valable... Encore moins lorsque cela risquait d'impacter la bonhomie des personnes qui l'entouraient. Elle se sacrifiait, perpétuellement : elle n'aurait donc pas souhaité s'aventurer sur un terrain aussi glissant et sérieux si elle n'avait pas cru que c'était là le moment le plus propice possible pour s'y rendre. Silencieux, il acquiesça donc d'un simple hochement de la tête, tout en la conservant proche de lui, ses yeux peinés dévorant tout ce qu'il pouvait observer d'elle. L'espère de mélancolie dont elle était imprégnée lui était intolérable, mais il savait qu'il était, de son côté, à peine plus enthousiaste : la vérité, c'était que la vie les avait brisé, l'un comme l'autre, et qu'ils allaient avoir toutes les peines du monde à se reconstruire ensemble. Tout leur avait nui, alors qu'ils ne se connaissaient pas encore : maintenant, ils devaient faire en sorte de panser leurs plaies l'un l'autre.

Lorsqu'elle approuva enfin sa proposition, non sans spécifier au passage qu'elle allait devoir faire un détour par la douche tout en lui glissant délicatement une invitation, il se détendit quelque peu. Le mafiosi avait un réel besoin de s'extraire de cette bâtisse au demeurant charmante, mais soudainement devenue trop étriquée, trop oppressante. Développait-il un semblant de claustrophobie ? Le baiser que Mizeria lui offrit lui prodigua alors des émotions étonnamment contraires : il se sentit bercé, bien sûr, comme à chaque fois, sentit qu'elle lui véhiculait des sentiments sincères et qu'ils trouvaient un écho authentique au sein de son propre cœur, mais il sentit également qu'il avait besoin d'un instant de solitude. Rai se sentait comme une espèce d'animal blessé, farouche au possible, après les sinistres révélations qu'il venait de lui livrer sur un plateau d'argent. Il avait l'impression de s'être amputé d'une partie de son passé, d'avoir trahi l'ensemble des décisions prises autrefois afin de garantir le succès de la mission dont il s'était affublé. Ainsi, le soulagement de n'être plus le seul à connaître le fin fond de sa psyché avait à combattre une sorte de regret, de culpabilité plus profonde... Car maintenant qu'elle savait tout de lui, il était impensable que la Leone en vint à l'abandonner, à lui tourner le dos. Ils étaient ensemble dans la même galère : c'était acté, à tout jamais... Jusqu'à la victoire, ou jusqu'à la mort. Jusqu'à leur mort.

Il demeura muet, alors qu'elle filait vers la pièce adjacente dans la quête d'une tenue vestimentaire. Il la suivit du regard, dans un premier temps, puis se contenta de lorgner du côté d'une peinture clouée sur le mur qui lui faisait face lorsqu'elle disparut enfin de son champ de vision. Une nouvelle émotion, qu'il ne sut analyser avec justesse, vint lui mordre les entrailles et les remuer furieusement. Il l'aimait, bien sûr : il n'était pas permis d'en douter, et il aurait été capable de fracasser sauvagement quiconque aurait osé assurer le contraire. Pourtant, le noiraud sentait quelque chose de moins bienveillant naître en lui, pour la première fois depuis qu'il lui était donné de la côtoyer. Comme la réminiscence de la personne qu'il avait longtemps été, et qu'il avait depuis pris la résolution d'enfouir. Devenait-il fou ? Le criminel qu'il avait incarné toutes ces années durant avait-il fini par prendre vie, considérant les années durant lesquelles il avait été le seul aux commandes ? L'acteur s'était-il perdu dans son rôle ? Un sourire cynique tirant davantage sur le rictus désespéré plutôt que sur l'euphorie candide vint étirer ses lèvres et il passa une main pataude sur son visage, comme pour en chasser la pâleur. Sans succès, bien sûr... Les remords, vicelards, réapparurent dans la foulée de ce geste vain. Que fichait-il ici ? Comment osait-il vivre aussi sereinement, lors même qu'il avait causé la mort de la détresse de tant et tant d'innocents ? Ce chemin était périlleux, il le savait : il risquait de le mener tout droit à l'oisiveté. Goûter à l'amour, ça vous changeait un homme... Et s'il lui prenait soudainement l'envie de tout abandonner, de tout plaquer dans l'optique de ne plus jamais vivre qu'avec elle, pour elle ? En fait, cette interrogation-là n'était plus exacte, car cette envie s'était éveillée en lui des heures, des jours, des semaines auparavant. La vraie incertitude, c'était de savoir s'il allait un jour ou l'autre vouloir la concrétiser... Il n'en avait pas le droit, sans nul doute. Aurait-il néanmoins la force mentale de persévérer à œuvrer pour la promotion de son rêve d'un monde meilleur, d'une société que la mafia ne gangrènerait pas, ou finirait-il par déposer les armes à force de goûte au sucre sur ses lèvres, et à la chaleur de sa proximité ?

Péniblement, il se redressa. Il n'allait pas la rejoindre, malgré l'aspect indéniablement tentant de cette proposition qu'elle venait de lui glisser. Il n'en avait pas le courage, dans les faits : il commençait à avoir peur. Pas de Méphisto, pas des Auditore, pas des Leone : de lui, d'elle, d'eux. Tout avait été jusqu'à présent tellement improbable... Et tout demeurait si précaire... Comment pouvait-il croire un traître instant que tout ceci serait éternel ? Leur amour n'était pas une mascarade : il était véritable, pur et désintéressé. Mais combien de couples de cet acabit s'étaient fracassés contre la réalité, lorsqu'ils avaient dû passer de l'amour occasionnel à la fusion quotidienne ? Il n'était pas le meilleur amant, sous aucun point de vue : se lasserait-elle de lui ? Elle avait sans doute pu bâtir des fragments de sa vie avec des hommes moins instables, plus sûrs d'eux : qu'est-ce qui pouvait lui faire croire, à lui, qu'il parviendrait à la séduire éternellement ? Le sol sembla trembler sous ses pieds, mais il chancela jusqu'à la chambre sans prendre appui autrement que sur ses jambes. Finalement, il entreprit à son tour de sélectionner une tenue plus appropriée : sombre, noire même, elle contrastait avec sa peau pure et immaculée tout en trouvant une profonde résonance dans les ténèbres qui garnissaient sa tête. Un simple jean, un T-shirt et un fin gilet à manches longues : voilà tout ce dont il venait de se vêtir, la mort au cœur. Le plus douloureux, dans tout cela, c'était que le Nagafuse avait pleinement conscience du fait qu'il ne livrerait pas à Mizeria l'ensemble de ses pensées actuelles de si tôt : il n'avait pas spécialement peur de sa réaction mais il savait que toutes ses protestations n'y changeraient rien. Il doutait, sans raison valable, sans argument tangible... Il doutait car, à la vérité, il n'avait pas confiance en lui. Comme toujours, il générait ses propres craintes...
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MessageSujet: Re: What do I do because of you ?    What do I do because of you ?  EmptyDim 10 Fév - 22:58

What do I do with you?
I look at you and I think of you even more


Combien de temps était-elle restée sous la douche ? Surement trop longtemps, quand Mizeria réalisa enfin qu’elle avait perdu la notion du temps… Elle avait réussi à se détendre quelque peu et à prendre soin d’elle bien que Rai ne l’eût pas rejointe. C’est d’ailleurs ce qui l’avait sortie de sa plénitude. Quelques minutes éloignée de lui et il lui manquait déjà ? Puissamment gênée, la blonde se mit à se frotter énergiquement les cheveux pour finir de les laver. Pourquoi diable se mettait-elle à rougir si violemment et en même temps à se sentir frustrée. Elle n’avait jamais dépendu de personne, malgré toutes les relations qu’elle avait pu entretenir et vivre elle ne s’était jamais entichée de qui que ce soit au point de sentir un manque en l’absence de cette dernière. Rai avait réussi à changer ses habitudes, et même ses plus profondes convictions. La jeune femme avait toujours été partisante de s’attacher avec une certaine réserve pour garder son indépendance et son libre arbitre. Désormais, elle imaginait difficilement vivre autrement que en pensant pour deux. Avait-elle justement perdu son indépendance ? Cette idée soudaine la dérangea. Rai ne l’avait jamais retenue ou forcée à quoi que ce soit... Au contraire, c’était elle qui lui avait imposé le plus de choses jusqu’à présent. Alors était-ce plutôt elle qui le conservait jalousement et possessivement ? Qui voulait tout dicter et maitriser, jusqu’à leurs deux vies ? Ce que le brun lui apportait et lui faisait découvrir était profondément enivrant et addictif mais terriblement effrayant également. Elle se retrouvait perdue, incapable de savoir exactement ce qu’elle faisait, si elle suivait le bon chemin, et ce malgré les autres hommes qu’elle avait pu côtoyer avec qui elle avait pu construire des relations diverses et variées. Aucun n’avait jamais pris une place aussi importante à ses yeux, aucun ne l’avait jamais fait tomber amoureuse tout simplement. Elle l’était donc pour la toute première fois de sa vie et ce véritablement. Fini les faux semblants, les illusions de se complaire avec quelqu’un et d’essayer d’y trouver un sens tout à fait idiot et faussé. Combien de fois avait-elle trompé l’ennui dans le creux des bras d’un ami, ou avait-elle tenté de faire comme tout le monde pour rentrer dans le rang ? Bien trop souvent. Et elle se rendait compte de la futilité de ses actions désormais. Elle ne désirait plus que Rai. Encore une fois le constat lui sembla terrifiant mais elle ne songeait pas à changer d’avis. Toute leur relation avait cette dimension d’interdit démesuré, intense et entêtant.

La demoiselle arrivait doucement à faire le point sur ses sentiments et y voir clair mais elle devenait aussi de plus en plus lucide quant à leur environnement. Leur idylle était charmante et vitale, mais perpétuellement en danger. Allaient-ils finir par s’en sortir ou allaient-ils en subir les conséquences au prix de la mort d’un des deux amants si ce n’était pas leur mort conjointe ? Les problèmes et les ennuis n’avaient fait qu’aller en escalade. Quand enfin ils pensaient en voir le bout et avoir tout surmonter, un obstacle encore plus grand semblait se dresser sur leur route... Elle en devenait méfiante, s’attendant toujours à pire, ne voulant plus se reposer sur des acquis mais dieu qu’elle en avait besoin…Ne serait-ce que ces quelques jours à Londres, loin de tout, elle voulait garder l’espoir et surtout l’illusion que rien ne pouvait empirer d’avantage, tout l’était déjà et ils avaient déjà fort à faire. Y arriveraient-ils déjà ? La plus grosse question était là.

Elle coupa l’eau et resta quelques secondes à regarder le sol. Elle n’avait pas le droit au doute. Une seule hésitation pouvait signifier leur fin… Elle devait avoir confiance, en leurs compétences, en eux, en Rai, en leur potentiel avenir. Comme si la douche lui avait permis de regagner un peu de vigueur, elle s’en extirpa l’esprit quelque peu plus léger et elle parvint enfin à se regarder dans la glace. C’était mieux…Beaucoup mieux. Elle avait déjà grandement réussi à arranger ses cheveux, les pauvres avaient été pendant quelques jours à demi-teinte entre le brun qu’elle avait clairement affiché pour leur mission de fortune et son blond naturel. Avoir retrouvé sa vue lui permettait enfin d’arranger tout ça pour de bon et de retrouver son apparence normale en toute sérénité… Ou presque. Il lui restait à se préparer et elle ignorait pourquoi elle se retrouvait à être gênée comme une adolescente en plein émoi face à son premier petit ami et premier rencard… En réalité elle savait pertinemment que ses habits n’avaient pas d’importance, ni son apparence et pourtant elle avait envie que tout soit impeccable pour cette journée… De plus, bien que Rai eût pris soin d’elle durant sa courte cécité, elle avait eu grandement l’impression de s’être négligée elle-même vu qu’elle n’y voyait pas grand-chose… Elle avait confiance en lui. Preuve en était, à part la couleur de ses cheveux et sa mine encore un peu fatiguée elle paraissait en parfaite santé. Qu’aurait-elle fait sans lui ? Clairement rien. Alors stupidement, elle voulait également se préparer au mieux pour le remercier, pour lui montrer qu’elle pouvait se montrer autant en pleine forme et un sourire aux lèvres uniquement grâce à lui. Et aussi futile que cela pouvait être…Elle voulait simplement lui plaire. Un soupire embarrassé s’échappa de ses lèvres et elle passa une main pataude sur son visage. Il était temps qu’elle arrête ses bêtises et qu’elle se prépare.

C’est un petit quart d’heure après ses débats personnels et bien enfantins par rapport à leurs précédents déboires, qu’elle apparut dans le salon coiffée et maquillée, vêtue d’une jupe noire courte et quelque peu plissée, accompagnée de collants ainsi que de bas opaques lui arrivant au-dessus des genoux. Pour le haut elle avait opté, pour contraster, d’un chemisier blanc assez travaillé et élégamment fini par un nœud fluide au col. Et pour compenser la matière assez fine de son haut, elle avait terminé sa tenue par un perfecto noir. Il ne fallait pas oublier que Mizeria restait Mizeria. Elle avait été gênée de choisir sa tenue car jamais elle n’avait eu l’occasion de se montrer ainsi habillée devant Rai, mais pourtant tout cela restait très clairement dans son style…Elle voulait lui plaire mais pour ce qu’elle était et non pour des artifices qui finiraient par s’avérer cruellement faux. D’ailleurs la tenue du brun sembla faire écho à sa manière de penser... Tout comme elle remarqua qu’ils avaient décidément un trop grand amour pour la couleur noire tous les deux… Ne s’arrêtant pas dans son élan elle le rejoignit et déposa un baiser sur sa joue.

« Désolé pour l’attente… J’allais te dire que j’ai essayé de faire des efforts puis je te vois si irrésistible et surement prêt depuis bien plus longtemps »

Gênée elle se gratta un peu la joue, la blonde avait une nouvelle fois l’impression de s’être plongée elle-même dans une mauvaise comédie de jeunes adolescents. Rai aussi avait opté pour un style qui lui ressemblait et surement en se posant beaucoup moins de questions… Elle ne pouvait s’empêcher de le regarder amoureusement. Il était beau ce n’était pas nouveau, mais elle appréciait de le voir dans un contexte si décontracté… De toute façon l’aurait-elle trouvé à un quelconque moment repoussant ? La réponse était jamais… Mais elle ne pouvait vraiment pas nier qu’elle appréciait le voir différemment, tout comme elle ne pouvait s’empêcher d’aimer le voir en noir... Rougissant encore un peu face au charme naturel de son partenaire, l’ex Leone se racla la gorge avant de reprendre.

« Tu es prêt ? »

Elle lui sourit une nouvelle fois encore et attrapa sa main dans la sienne après avoir remis son sac convenablement sur son épaule. Elle l’entraina dehors tout en enfilant une paire de lunettes de soleil. Mieux valait prévenir que guérir… Elle se savait encore convalescente et elle n’oubliait pas que techniquement elle aurait dû encore garder le bandage encore quelques jours… Sans réfléchir des masses, ses pieds prirent d’eux-mêmes une direction et au lieu de se presser elle profita de marcher aux côtés de Rai main dans la main. Elle s’empêcha tant bien que mal de regarder leurs mains entrelacées. C’était normal... Mais pourtant ce simple fait la faisait s’emballer et elle se sentait rougir de plus belle. Leur relation avait toujours été si complexe et difficile à vivre depuis leur début que les choses les plus anodines lui paraissaient bizarres et hors normes bien qu’elles soient en réalité surtout terriblement attractives. Enfin ils pouvaient se comporter comme un couple lambda et rattraper justement le début de leur relation que Méphisto semblait leur avoir volé… La blondinette resta silencieuse malgré sa joie apparente. Elle réfléchissait alors qu’ils continuaient de parcourir les rues… Oui ils étaient de sortie mais elle devait impérativement passer quelque part…

« Rai… Juste pour t’expliquer avant qu’on y aille… Je vais profiter de notre sortie pour passer… Chez moi. J’ai quelque chose à récupérer et surtout... J’aimerais te montrer un peu d’où je viens… Si ça ne te dérange pas bien sûr »

Elle le regarda enfin les yeux dans les yeux. Elle aurait pu comprendre son refus et l’accepter... Pourtant il n’en fut rien. Il avait bien compris qu’elle n’utilisait pas cette sortie comme prétexte et que tout lui tenait à cœur.. Que cela soit d’être avec lui comme de bêtes amoureux transis ou de lui ouvrir une page de son passé. Elle lui sourit de plus belle et commença à parler de choses plus légères, comme où aller manger ou quoi voir dans le secteur.. Après tout ils étaient dans la banlieue de Londres… Ils avaient une quantité folle de choses à faire s’ils le souhaitaient. C’est ainsi que bien loin de ses soucis et de ses interrogations, elle prit la décision de lui faire découvrir la ville sans se soucier de rien d’autre. Lui aussi avait surement besoin de légèreté. Elle resta cependant discrète sur ce qu’avait été sa vie d’avant, elle passa par des lieux remplis de souvenirs mais elle ne les aborda pas… Tout simplement car après les aveux de Rai, cela lui semblait déplacé. C’était une partie de son enfance dorée, que le brun n’avait pas eu la chance d’avoir… Puis de son côté il y avait toujours un facteur douloureux à les évoquer, un reste de regret qui lui restait amèrement au fond de la gorge. Malgré tout… Elle ne put s’empêcher de lui glisser quelques anecdotes… Comme celles concernant son côté garçon manqué à l’époque déjà, accompagnées de quelques détails sur les gaffes qu’elle avait pu faire, des pauvres enfants qu’elle avait quelque peu martyrisés, tout comme les ennuis qu’elle avait pu s’attirer et qui lui avaient valu pas mal d’engueulades... Juste quelques-unes, histoire de détendre l’atmosphère et de se rassurer aussi. Elle rouvrait une page de son passé, cela faisait partie d’elle. C’était des fantômes du passé et non des démons prêts à lui sauter à la gorge, elle devait se réconcilier avec eux, les accepter.

C’est donc presque insouciante qu’elle l’entraina un peu dans toute cette partie de la banlieue de Londres qui était sa ville natale… Cependant à quelques détours elle sembla absente, comme si son attention s’égarait pendant quelques secondes. Une fois arrivés dans une rue plus passante elle sembla même être moins enjouée et plus sérieuse, comme si elle était en mission. Même si cela en devenait presque le cas, elle se rendit compte du changement de son comportement et elle tenta à nouveau de sourire au brun le plus rassurement possible.

« Ca te dit un café ou un chocolat chaud ? Ça nous réchauffera un peu… »

Elle lui montra effectivement un café et comme pour appuyer ses dires, un nuage sembla voiler le soleil un instant. Il faisait relativement bon mais le temps restait frais et il pouvait encore changer puissamment comme cela était toujours le cas à Londres… Ils n’étaient pas à l’abri d’essuyer quelques gouttes de pluie… Sagement elle rentra dans le café, entrainant toujours ce pauvre Rai au gré de ses envies avec un air désolé pour lui. Elle espérait ne pas l’embêter et encore moins lui donner l’impression de le materner. Elle avait simplement son idée derrière la tête, des choses à vérifier. Ils passèrent commande et l’ex Leone sembla insister quelque peu pour s’installer près de la vitrine, comme pour profiter de l’animation de la rue et de s’imprégner de bons vieux souvenirs. Pourtant il n’en fut rien. Ses yeux scannèrent simplement les environs derrière ses lunettes. Elle se mit bientôt à sourire étrangement, entre l’amusement et l’agacement. Enfin, comme satisfaite et comme si elle venait enfin d’avoir une réponse divine, elle finit son chocolat en soupirant.

« Désolé pour la transition assez rapide… On devrait y aller. La… Ma maison n’est pas très loin. »

Elle ne pouvait rien dire pour l’instant, et elle peinait toujours à utiliser les bons qualificatifs pour son ancien foyer. Plus sérieuse que le reste de la journée, elle se leva une fois qu’il eut finit et lui reprenant toujours la main innocemment elle reprit d’autres rues. Elle tacha au mieux de ne pas presser son allure, de rester tout aussi naturelle qu’avant.. Mais il la connaissait, il devait surement sentir sans mal son agacement qui n’était pas présent au début de la journée. Il semblait monter de plus en plus et il atteignit son apogée une fois qu’elle s’arrêta devant une maison. Elle sortit pourtant avec des gestes lents et contrôlés des clefs de son sac. Elle poussa le portillon et monta les quelques marches qui les séparaient de l’entrée.

« Rai… Écoutes moi bien. Ça va dégénérer d’ici peu… On a des Leone sur nos talons. »

Elle venait de lui annoncer ça en ouvrant la porte, mais sans s’inquiéter plus que ça. Ces idiots elle les avait repérés bien avant… Après tout elle les avait formés. Ils ne pouvaient pas la berner si facilement… Rai lui-même les avait peut être déjà repérés. Tout n’était désormais plus qu’une question de temps avant qu’ils ne les abordent. Et pour le coup la visite prévue de sa maison lui avait semblé être le guet-apens parfait. Restait à savoir pour qui exactement…. Des quatre qu’elle avait repéré depuis un petit moment, qui avait réellement envoyé pour entrer en contact avec elle ou la ramener de force ? Elle avait bien sa petite idée mais il lui fallait une confirmation… Et pourquoi les envoyer surtout ?

« Je ne te demande qu’une chose… Ne les tue pas et blesse-les au minimum... Voir pas du tout si tu y arrives mais sinon c’est pas grave. Ils l’auront cherché cette bande d’imbéciles... Je suis vraiment désolée que tu te retrouves mêlé à ça.. »

Cette fois-ci elle se montra clairement exaspérée et elle balança son sac avant d’enflammer sa bague. Elle commença simplement à compter tout en agissant le plus normalement du monde, même si elle paraissait presque désespérée et pressée… Elle allait leur faire la peau et après demander la raison de leur venue. Elle espérait juste que Rai n’en tue pas un seul. Non, cet honneur lui revenait, et pour le coup elle ne laisserait personne lui voler cette joie. 30 secondes... C’est ce qu’elle leur avait appris. Elle veillait toujours à laisser cet intervalle avant de passer à l’action.. Du moins au minimum. Elle avait quelques têtes brulées dans sa section et le seul moyen de s’assurer un minimum de cohérence avait été de leur définir un temps précis à attendre avoir de tenter quoi que ce soit… Mais connaissant ces idiots.. Ils en attendraient plutôt 20 comme pour montrer qu’ils étaient capables de la surpasser…

« 5, 4, 3, 2, 1…. »

Sans crier gare, elle pivota en direction de la porte arrière tout en ouvrant sa boite arme. Elle aurait pu choisir ses poings américains... Mais elle avait opté pour sa faux, histoire de vraiment leur faire mal si possible. Ils pénétrèrent à quatre dans la maison comme elle l’avait prévu et très vite ils se séparèrent en deux groupes distincts pour s’occuper des amants séparément. Elle abattit son arme sur ses deux agresseurs sans plus de cérémonies, dégommant au passage quelques chaises. Les deux figures semblèrent s’immobiliser quelques peu comme surpris, l’effet parvint même à en faire s’arrêter d’un d’office. Au moins un qui n’était pas débile… Quant au deuxième il se précipita de plus belle, ne comprenant visiblement pas à quel point ils venaient de l’énerver. Il avait beau être masqué, elle aurait pu mettre sa main à couper de qui il s’agissait. Depuis leur intrusion et leurs premiers mouvements à découvert, elle savait pertinemment leur identité... Encore plus excédée elle ne se laissa clairement pas faire et bloqua l’attaque sans mal. Un sourire des plus inquiétants passa alors sur ses lèvres et son opposant sembla enfin comprendre que le pire l’attendait. Cependant il n’eut pas le temps de se reculer qu’elle coupa les flammes de sa bague faisant chuter lourdement sa faux avec tout le poids qu’elle représentait. L’autre se sauva de justesse, évitant de finir bloqué au sol par la même occasion sous le poids de son arme. Mais il y avait laissé la sienne également dans la précipitation, ce qui sembla amuser la blonde. Toujours aussi impétueux, son opposant repartit à la charge déterminé à la battre même si il devait en arriver au corps à corps. Ce qui était toujours aussi dommage c’est qu’elle venait de l’attirer pertinemment sur son terrain à elle et sur sa faiblesse à lui. Elle avait vraiment bien récupéré, elle arriverait à lui tenir tête sans trop de mal... Mais pourtant, elle n’arrivait pas à jeter un coup d’œil à Rai avec tout ça. Quand elle le voulut enfin, sous-estimant peut-être trop son adversaire, elle commit sa première erreur. Son ancien allié perçut la distraction et en profita pour viser ses lunettes. Il avait vraisemblablement compris sa faiblesse actuelle. Ces dernières volèrent sans mal tandis que la blonde se reculait pour ne pas se faire frapper plus fortement. Le seul problème fut la lumière. Éblouie avec ses yeux encore faibles, elle laissa l’occasion à son assaillant de continuer son offensive. Incapable de riposter et de voir distinctement durant les quelques secondes qui suivirent, elle se retrouva plaquée contre un mur, une main bloquée et la gorge maintenue. Elle grimaça alors que l’autre se mettait déjà à rire. Par chance, elle avait évité de se taper la tête.

« Qui fait moins la maligne ? Arrêtes de frimer alors que t’es blessée apparemment. »

Elle serra les dents.. Il avait vu juste mais elle aussi depuis le début. Avait-elle douté de son identité ne serait qu’à un seul instant de toute façon ? A aucun moment… Il n’y en avait qu’un pour agir de la sorte. Malgré sa mauvaise posture, Mizeria se mit à sourire avec un air arrogant tout en arrivant à discerner enfin les traits de son ex-camarade.

« Et moi combien de fois je t’ai dit de ne pas crier victoire trop vite Ash ? »

Son ton avait été froid et glacial, presque méprisant. Il ne retenait jamais ses conseils… C’était une tête de mule depuis toujours. Rien ne semblait lui rentrer dans le crâne. Fut-ce pour cela qu’elle décida de lui administrer un coup de boule ? Peut-être qu’elle en avait été inspirée… Et qu’elle oublia momentanément aussi que sa pauvre tête l’avait déjà échappée belle quelques secondes auparavant. C’est donc par ce geste peu raffiné qu’elle se dégagea enfin sans problème et qu’elle enchaina. Il était touché et surpris, elle n’allait pas s’arrêter en si bon chemin. Le fameux Ash avait beau commencer à pester, elle était bien loin d’en avoir fini avec lui. Une fois libre, elle l’attrapa pour lui asséner un bon coup de genou dans l’estomac et elle le termina d’un bon coup de coude dans la tête pour le faire tomber. Vu les grognements qu’il commença à lâcher elle songea qu’elle allait être enfin tranquille…. Cependant, ne semblant toujours pas saisir à quel point il jouait avec sa vie, le jeune homme commença à montrer des signes de protestation et une volonté d’attaquer à nouveau. De manière impérieuse, l’ex Leone le pointa immédiatement du doigt et prit la parole afin de l’en dissuader.

« Je te préviens. Tu m’attaques une nouvelle fois…Et cette fois ci je te tue sans aucune retenue et dans d’horribles souffrances. Reste tranquille maintenant et boucle la. »

Il lui sembla entendre un grognement puis le voir ravaler sa salive mais elle était déjà trop occupée à rappeler les autres à l’ordre dans la foulée. Elle n’avait pas un instant à perdre. Elle jeta un coup d’œil à son second assaillant qui pour sa part était resté tout simplement les bras ballants et qui retira enfin sa capuche en soupirant.

« Je t’avais prévenu Ash. Je t’avais dit que ce n’est jamais une bonne idée d’énerver maman. »

Akio... Encore une fois elle avait vu juste. Le fait qu’il soit resté à l’écart n’était pas étonnant non plus. Quand Ash restait la tête brûlée du groupe, Akio était le plus sage et le plus réfléchi. Il avait surement essayé de convaincre les autres de faire les choses plus doucement... Mais comme à l’accoutumée ils ne l’avaient pas écouté et lui n’avait pas voulu se fatiguer à insister plus. Dieu qu’elle les connaissait tous par cœur... Peut-être trop. Toujours dans son empressement elle regarda enfin les deux derniers, elle n’allait même pas relever le pic d’Akio. Si lui et Ash étaient là, il n’y avait pas de doutes non plus sur le troisième qui faisait face à Rai… Quant au quatrième elle avait sa petite idée. Il ne lui restait plus qu’à les arrêter avant que Rai ne finisse par les embrocher… Malgré sa tête et ses yeux qui commençaient à la faire souffrir, elle enflamma une nouvelle fois sa bague. Ses flammes vinrent embrasser un fauteuil qui se trouvait près d’elle et sans réel effort pour le coup, elle le souleva et le jeta au loin pour arrêter l’office des deux derniers Leone non identifiés…

« Gabriel ! June ! Ça suffit ! Arrêtez-vous tous et baissez les armes bande d’idiots… »

Ils s’arrêtèrent tous les deux et se regardèrent. Apparemment elle avait vu juste… Gabriel finissait toujours trainé par Ash et Akio… Quant à June, elle était une nouvelle recrue mais il semblait que les garçons l’avaient bien intégrée et qu’elle avait un fâcheux goût à apprécier les plans foireux et risqués d’Ash… Tous dévoilèrent enfin leur visage au grand jour et elle les regarda à tour de rôle rassurée mais désolée. Le temps sembla s’arrêter alors que tous s’immobilisèrent et la dévisagèrent. Enfin la tension retombait et les choses se calmaient… Personne n’était mort et ils semblaient enfin tous prêts à écouter… La blonde souffla péniblement et se laissa tomber assise en soupirant sur la première marche de l’escalier qui se trouvait non loin d’elle. Elle eut alors l’impression qu’elle venait d’être projetée contre un mur ou d’avoir encaissé une attaque phénoménale… Elle se prit la tête entre les mains et ferma les yeux pour lutter contre les vertiges qui la prenait. Il fallait qu’elle se calme impérativement. Elle en avait trop fait, elle se rendait compte qu’elle avait encore une fois été prétentieuse de croire qu’elle était prête à se battre… Mais le pire, même si elle n’allait jamais l’avouer, elle était angoissée. La pression qui retombait enfin la renvoyait désormais à sa maigre condition. Quatre membres de la Vibrissa étaient dans son salon. Pourquoi ? Surement sur ordre de Mitsuki… Sa parraine avait-elle ordonné son élimination ? Non, elle serait déjà morte de la main d’un gardien si tel avait été le cas. Avait-elle alors envoyé des Leone vérifier son état ? Peu probable même si elles étaient proches… Non. La seule raison de leur présence qui lui paraissait valable, était que Mitsuki n’avait pas eu d’autre choix que de les envoyer pour s’assurer qu’elle n’avait pas changé de camp… Quelques hauts gradés avaient dû émettre des réserves quant à la manœuvre de la Balogh. Mitsuki n’avait donc peut-être pas eu le choix que d’envoyer des membres de la Vibrissa pour en apprendre plus sur le nouveau coup de leur chef quittes à risquer de la compromettre quelque peu... Et qui de mieux pour ça ? Ceux dont elle était le plus proche... Ils avaient du même se porter volontaires d’eux-mêmes, s’ils n’avaient pas été déjà prêts à partir seuls, portés par un sentiment de trahison et d’abandon… La situation lui semblait donc encore plus épineuse et douloureuse qu’au début. Elle avait l’impression que le sol allait se dérober sous ses pieds… Mizeria se sentait mal, tant et si bien qu’elle n’osait pas les regarder de nouveau tous en face. Encore moins Rai. Elle était inquiète pour lui, et elle était déjà rongée par la culpabilité à son sujet. Il allait devoir apprendre son véritable rôle au sein des Leone.. Et ce de force… Fini les tergiversations pour savoir comment lui annoncer et lui expliquer ses intentions. Il allait l’apprendre de la pire des manières.



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Rai Nagafuse
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MessageSujet: Re: What do I do because of you ?    What do I do because of you ?  EmptyDim 11 Aoû - 7:36



Dans les yeux de la vérité.



-Ne te dénigre pas. Ça te va bien. Très bien.

Il eut un sourire timide tandis qu'il complimentait sa chère et tendre : puis il se laissa emporter dans la rue, retrouvant enfin son odeur, sa proximité, sa douce chaleur et le bruit infime mais perceptible de sa respiration. Tout contribua à l'apaiser grandement : c'était comme si elle avait d'ores et déjà généré chez lui un fort sentiment de dépendance... Il avait de plus en plus de mal à se passer d'elle, comme en témoignait ses angoisses et ses remords durant la douche de la jeune femme. La révélation qu'il avait pu lui faire l'avait bien évidemment libéré de bon nombre de ses tourments, certes, mais seulement pour être remplacés par d'autres, plus fourbes et moins inavoués. Elle savait qu'il était un meurtrier. Il avait peut-être d'excellentes raisons, sur le très long terme, d'avoir agi aussi sordidement qu'il l'avait fait : mais il n'en avait pas moins été malfaisant, cela allait sans dire. Y avait-il seulement une façon de légitimer concrètement des actions aussi odieuses ? Plus il avançait, et plus le noiraud se rendait compte d'un fait dérangeant. La vérité, c'était qu'il avançait à tâtons. Il n'était sûr de rien, et certainement pas de la pertinence de ses actions... Mais là où, jusqu'à présent, il se contentait de taire toutes ces craintes et de les tuer dans l’œuf, en s'affirmant à lui-même qu'il œuvrait à des fins plus grandioses qu'une seule poignée de vies humaines, furent-elles parfaitement innocentes, il ne pouvait plus se mentir : ces derniers temps, l'amour inconditionnel qu'il vouait à Mizeria avait été son unique préoccupation, son seul moteur. De fait, il ne put que culpabiliser, à nouveau, tandis que leurs pas les guidaient jusqu'à une destination inconnue, qui s'avéra bientôt être la maison d'enfance de sa compagne. Si, temporairement, cette révélation le troubla suffisamment pour lui faire oublier ses démons, cela ne fut qu'un effet sur le très court terme et ses remords revinrent bientôt à la charge, lui prouvant un fait des plus dérangeants : la présence de la Leone ne lui suffisait plus pour l'apaiser totalement. Quelque chose s'était brisé en lui. Une pudeur, sans nul doute, une fausseté, un masque de mensonge insidieux et pervers... et la force qui lui était associée, sa volonté inébranlable de se couper de tout sentiment, qu'il fut bon ou mauvais. D'une certaine manière, en marchant main dans la main avec Mizeria, il ne faisait rien de plus que revendiquer son humanité : une humanité qu'il avait très longtemps tue, muselée, réprimandée et rouée de coups.

-Non... non, ça ne me dérange pas. Au contraire.

Il était sincère, en cela qu'il avait fort envie de voir de ses propres yeux l'endroit où elle avait pu ancrer une part généreuse de son passé... De surcroît, il savait qu'il valait mieux pour lui d'être présent tandis qu'elle serait confrontée aux démons qui pouvaient peupler son jadis : c'était une mesure de bienveillance assez évidente, compte tenu des liens qui les unissaient. Comment aurait-il pu souhaiter lui faire défaut alors qu'elle voyait tous ses souvenirs les plus douloureux revenir à la charge ? Il allait l'accompagner, cela ne faisait aucun doute : mais il n'allait à aucun moment évoquer la culpabilité dévorante qui lui rongeait l'estomac, lui lacérait les entrailles. Il n'en avait pas la force. Il savait, peu ou prou, ce qu'elle tenterait de dire en substance. Que ce n'était pas sa faute. Qu'il œuvrait dans un but plus grand. Qu'il avait été si seul et si perdu que son comportement en avait nécessairement été impacté, d'une façon fort déraisonnable... Mais on parlait de meurtres. On parlait de vies fauchées implacablement, y compris d'enfants. Quelle justice y avait-il là-dedans ? A quelles fins pouvait-il prétendre avoir agi pour légitimer de tels actes barbares ? Aucun rêve ne lui semblait suffisamment grand pour pouvoir contrebalancer l'opprobre dont il s'était recouvert intégralement... Mais, au-delà de tout cela, le Nagafuse ne pouvait pas se résoudre à lui en apprendre davantage encore sur ce qu'il était, sur les actions nauséabondes qui avaient été les siennes. Elle avait déjà été spectatrice de bien des horreurs, mais elle ne connaissait pas le quart des crimes dans lesquels il avait trempé, directement ou indirectement. Si le passé de la jeune femme macérait dans le regret, le sien était juché de cadavres. Il n'était pas celui qui tirait le plus de mélancolie et de douleur vis-à-vis de ses agissements passés : ce titre de souffre-douleur, il le laissait humblement à la myriade de veufs, de veuves et d'orphelins qu'il avait abandonnés dans son sillage.

Il en avait simplement trop fait. Trop pour que tout lui soit pardonné. Peut-être Mizeria passerait-elle l'éponge, durant un temps à tout le moins : peut-être qu'elle se dirait qu'il valait la peine d'être aimé, envers et contre tout. Mais petit-à-petit, elle se lasserait peut-être de lui. Peut-être que leur passion fougueuse en viendrait à se faner, à s'estomper... et si tel était le cas, peut-être que la perception qu'elle avait de lui, à son tour, se ternirait drastiquement. Peut-être ouvrirait-elle les yeux. Peut-être condamnerait-elle tous ses agissements... Et peut-être cela contribuerait à réveiller en elle la haine première qu'elle avait semblé ressentir à son encontre. Toutes ces craintes étaient palpables, anxiogènes, mais elles n'étaient pourtant pas le dixième de celles qui l'habitaient réellement, à cet instant. Il ne pouvait pas empêcher le visage de ces gamins qu'il avait exécuté ou fait tuer, il ne pouvait pas empêcher une nausée grandissante d'envahir son tube digestif... Finalement, il n'eut pas à vomir son propre dégoût : Mizeria mit fin à tout cela, en lui proposant d'aller s'asseoir à une table pour consommer une boisson quelconque. Trop heureux de pouvoir se détourner un instant de ses démons, le noiraud accepta d'un hochement de tête silencieux et marcha à sa suite. Lorsqu'ils furent enfin installés, il commanda un simple chocolat chaud et dévora sa bien-aimée du regard, quasiment fixement, s'offrant ainsi un moment d'une contemplation sotte et inoffensive lui permettant de penser à autre chose qu'à tout ce qui faisait de lui un être profondément mauvais. Cependant, ce moment ne semblait guère être partagé : il remarqua bien vite que le regard de sa dulcinée se dérobait face au sien, et qu'elle préférait épier du côté de la rue qu'ils venaient de quitter, en s'engageant dans ce bar. Si, dans un premier temps, il éprouva une peur stupide, celle-là même qu'elle se soit d'ores et déjà lassée de lui, il comprit promptement que ce n'était pas une chose aussi triviale qui l'avait amenée à agir de la sorte : elle cherchait à surveiller quelque chose... ou quelqu'un. Le mafieux avait été si déconcentré durant la première partie de leur pérégrination qu'il en avait momentanément omis tout ce qui les entourait alors... Grossière erreur. Ils étaient suivis : un mouvement brusque dans la foule, une silhouette trop subreptice pour être naturelle, c'étaient des détails infimes mais qui parlaient plus qu'une pancarte brandie. Et la Leone lui donna raison, à sa manière, en terminant sa tasse promptement. Il se pressa de l'imiter et s'en retourna dans la rue, dévoré par une crainte qu'il ne pouvait pas réprimer aussi aisément qu'elle : qui ?

Les hypothèses ne manquaient pas. Il aurait presque aimé voir le faciès ou la silhouette connue d'un membre des Auditore : même si cela aurait signifié que Symphony ou, pire, Alda, voulaient les tenir à l’œil, il s'agissait envers et contre tout de figures... relativement amicales. Bien plus, en tout cas, que s'il s'agissait d'agents à la botte de Mephisto. Ce type, l'ancien gardien du désert ne pouvait pas l'avoir oublié : il était pire qu'un furoncle et même s'il semblait s'être évaporé, le risque de le voir revenir à la charge était trop palpable pour être définitivement ignoré. Il était peu probable, toutefois, qu'il ait réussi à les localiser par hasard : d'un autre côté, il n'avait pas pu les suivre depuis l'Italie, puisqu'il devait avoir Eberto aux basques... Mais il était sot de croire que le gardien de la Tempête avait finalement pu s'occuper de son cas. A partir du moment où Mephisto avait réussi à éviter la première charge de son opposant, les chances de le capturer s'étaient volatilisées, purement et simplement... Du moins jusqu'à ce qu'il se mette à nouveau en danger, une prochaine fois.

Alors qui ? Si ce n'étaient ni Mephisto, ni les deux Ciels, qui étaient les véritables responsables de cette filature... Qui ? Cette réponse lui fut bientôt apportée, par la demoiselle qui marchait à ses côtés elle-même. Il avait été si à l'affût qu'il ne s'était pas d'emblée rendu compte du fait qu'ils touchaient au but, et qu'ils avaient atteint la maison où elle avait vécu : mais elle y confirma l'identité de leurs poursuivants, dont il se doutait déjà depuis un petit moment. Des Leone... C'était à la fois rassurant et inquiétant. Pourquoi s'étaient-ils donnés la peine de les poursuivre depuis Venise ? Cette interrogation-ci demeurait aussi intacte que désespérante. Ils risquaient fort de connaître le fin mot de l'histoire dans les délais les plus brefs, en tout cas : Mizeria semblait même estimer que cette filature n'allait pas tarder à dégénérer en un fameux pugilat, puisqu'elle prit la peine de l'avertir au sujet de la teneur mouvementée des agissements que les prochaines minutes subiraient. Et c'était regrettable, par ailleurs... Ils n'étaient pas dans les meilleurs conditions possibles pour se débarrasser de poursuivants en un claquement de doigts. La Leone était à peine remise de ses multiples sévices, dans le meilleur des cas... Et lui ? Il était désormais en assez bonne santé, cela oui... mais privé de sa bague de gardien. Autant dire que la prestation qu'il allait offrir serait bien loin de ce qu'il avait autrefois pu réaliser... Avec un anneau d'une aussi piètre qualité, il lui semblait complètement farfelu d'imaginer piéger un Eberto, à titre d'exemple : il leur fallait donc espérer que leurs poursuivants n'étaient pas le quart de ce colosse puissant au-delà de toute commune mesure...

Aussi étaient-ils à peine entrés qu'il avança d'un pas franc et décidé en détaillant les environs d'un regard attentif et scrutateur. Une idée, un stratagème, une tactique : il lui fallait quelque chose de toute urgence. Ils auraient l'avantage de l'effet de surprise, envers et contre tout... De quoi prendre leurs opposants de court, s'ils s'en donnaient les moyens. Mais voilà : contrairement à Mizeria, le combat rapproché n'avait jamais été sa spécialité et sans sa bague de rang A, il se voyait mal tenir tête à ses ennemis avec un brio remarquable. D'autant plus qu'il n'avait pas pu les compter précisément : il en avait dénombré trois, mais comme il ne les connaissait pas, il lui était plus difficile qu'à la Leone de les dénombrer précisément. Finalement, lorsqu'elle lui demanda de les épargner et lorsqu'elle s'excusa de lui causer de tels soucis, il se contenta de balayer ses frayeurs d'une simple dénégation de la tête.

-Cela ne pouvait que finir par arriver. J'aurais préféré que ce soit plus tard mais... Tant pis. Ce sera fait.

Il procéda par étape, en une dizaine de secondes tout au plus. Il trouva une armoire, face à laquelle se trouvait une fenêtre, rideaux fermés : une entrée potentielle pour ses agresseurs, donc, s'ils ne préféraient pas la porte. En estimant qu'ils voudraient sans doute quasiment tous surgir simultanément, afin de véritablement les prendre de court en arrivant de toutes les directions possibles, le noiraud songea qu'il était fort probable qu'un de leurs agresseurs surgisse par cet accès-ci : aussi invoqua-t-il Shiho juste sous cette fenêtre... Ensuite, il ouvrit l'armoire, et il y planta son gigantesque shuriken, non sans au passage l'abreuver de ses flammes en prenant bien garde à ne pas surcharger sa bague, ce qui aurait eu pour effet incontournable de la faire voler en éclat. Puis il referma l'armoire, ôta son manteau tout en le gardant bien en main, se mit dos à la fenêtre... Et attendit. Le compte-à-rebours s'enclencha bientôt, sous la houlette de sa chère et tendre : et comme cette dernière l'avait précisément calculé, leurs assaillants agir au bout de vingt secondes. Et comme lui-même l'avait prévu, ils multiplièrent les entrées fracassantes, en songeant sans doute que cela contribuerait à mortifier le mignon petit couple... ils n'auraient pas pu se gourer plus lourdement. Rai mima bien la surprise, en réalisant un volte-face brusque et effarouché, mais seulement pour se rendre compte avec satisfaction de l'avantage colossal qui était le sien : l'un des ennemis, un homme à en juger sa corpulence, avait effectivement traversé la fenêtre... Et venait de tomber juste devant Shiho, sans même remarquer la présence du fossa. Donnée un peu plus agaçante : il n'était pas seul et une jeune femme traversa une autre fenêtre, à l'opposé de la pièce. Du deux contre un : il n'aimait vraiment pas ça.

Mais il fit avec. Shiho n'eut pas besoin du signal du Nagafuse : il agit seul, en plantant ses crocs dans le mollet de son ennemi et en imbibant sa jambe des flammes du désert. Le pauvre bougre beugla, mais cela n'empêcha pas Rai de projeter dans sa direction une nuée de flammes, directement grâce à sa bague. Cette nuée, toutefois, progressa trop lentement et avec une intensité nettement trop faible : l'ennemi invoqua ses propres flammes pour les contre-carrer, puis éloigna le fossa en le menaçant d'un coup de pied, avant de tomber à genoux en pestant. L'Auditore était certes débarrassé de cet opposant, mais pour un temps seulement : et la jeune femme sur sa gauche se ruait vers lui suffisamment vite pour que sa satisfaction soit sévèrement éclipsée. D'un geste ample, le noiraud projeta au visage de son ennemie le manteau dont il s'était drapé jusqu'alors : elle l'écarta bien évidemment sans peine... Mais laissa à son ennemi assez de temps pour qu'il s'empare d'une chaise et la lui lance entre les jambes. La jeune femme fut déséquilibrée, chuta vers l'avant lourdement, fit une espèce de rouler-bouler et fut finalement cueilli par un coup de pied en plein visage : puis Rai ouvrit l'armoire à la volée, s'empara de son shuriken et se jeta sur la jeune femme en s'asseyant sur son buste. Il plaça l'une des pointes de son arme sur la gorge de son assaillante, l'immobilisant pour de bon, et cracha à l'égard du type que Shiho avait blessé et qui se redressait déjà, furieux :

-Bouge d'un seul cheveu, et je butte ta copine.

Et, comme prévu, le mec s'immobilisa instantanément, en l'injuriant copieusement. Pourquoi ? S'il n'avait bien sûr en aucun cas pu deviner les liens qui unissaient ces deux ennemis, il avait néanmoins pu les altérer. Les flammes qu'il avait projeté de lui-même avaient bien sûr été inutiles... Mais celles de Shiho, beaucoup moins. L'ancien Gardien des Auditore n'avait plus suffisamment de pouvoir pour causer de réels troubles mémoriels à ses ennemis, pas en un claquement de doigts en tout cas, mais il en avait suffisamment pour altérer des relations déjà proches. Ces types travaillaient ensemble, ils étaient une équipe et avaient été chargés de filature. Ils étaient proches. Tous. Et à leur façon, tous s'appréciaient. Il n'était donc pas difficile de les faire basculer d'un fort sentiment d'unité et de fraternité, au profit d'un sentiment plus romantique, plus amoureux, plus fusionnel encore... D'un regard anxieux, le noiraud s'enquit de l'état dans lequel se trouvait Mizeria : et il fut soulagé en constatant qu'elle aussi avait repris du poil de la bête, s'offrant même l'ascendant sur ses opposants et intimant à tous ses anciens collègues de se tenir tranquilles, désormais. La tension, dès lors, sembla se volatiliser quelque peu : le noiraud se redressa, quittant le buste confortable de la prénommée June, et fit à la fois disparaître son arme et Shiho. Puis il se dirigea instantanément vers la marche où la Leone s'était assise, dans une forme apparemment moins olympique qu'elle ne l'aurait souhaitée... Elle en avait trop fait. Elle n'était pas encore prête à livrer bataille aussi farouchement... Se souciant peu de leur auditoire, le noiraud se mit à genoux, à sa hauteur, et fit montre d'une inquiétude sincère en lui posant une question à voix basse.

-Tout va bien ? Tu aurais dû me laisser gérer...

Il n'aurait pas pu le faire seul. Cela paraissait peu probable, en tout cas : tenir en respect deux de leur quatre opposants avait déjà été un petit miracle, en soi. Néanmoins, il aurait largement préféré être passé à tabac que d'avoir à supporter une vision aussi pénible : il n'aimait pas la constater faible... pas elle, qui semblait être la plus combative de tous ses proches.
Dans le même temps, le prénommé Gabriel sembla retrouver la totalité de ses souvenirs initiaux, à l'instant même où il s'apprêtait à embrasser une June cramoisie, qui se redressait tout juste : il fut cueilli par un claque magistral, chose qui ne sembla le satisfaire qu'à moitié. Voilà qui entamait sa relation avec le Nagafuse sur un bon pied, donc : et il le signifia verbalement, haut et fort, en pointant l'Auditore d'un doigt inquisiteur.

-Putain ! C'est pour ce gars que tu nous as planté ? Cette lavette ?
-La ferme, Gab'. C'est toi qui as tout gâché. T'as rien le droit de dire.
-Moi ? C'est toi qu'il a chopée comme otage, comme une bleue ! Si tu t'étais pas aventurée comme une débile...

A mille lieux de se soucier de cette querelle grandissante, l'ancien Gardien scruta attentivement du côté de la tête de sa moitié, de façon à vérifier qu'elle ne souffrait d'aucun mal trop grand. Ce type de conflits brusques et intenses pouvaient malheureusement raviver d'anciennes blessures, et des anciennes blessures, ça n'était pas ce qui leur manquait, en l'occurrence... Les derniers jours avaient été plus calmes que les semaines s'étant écoulées auparavant, cela allait sans dire, et il n'était sans doute pas une seule partie de leurs corps ayant été totalement épargnée par les contusions diverses et à l'intensité variable. Autant dire que ce type d'examen était d'une précaution incontournable, surtout considérant la lutte musclée que Mizeria avait livrée, comme à son habitude. Elle n'était pas du genre à faire dans la dentelle, au contraire du Nagafuse, et cela se ressentait nécessairement sur l'impact que les rixes avaient sur elles... Une fois rassuré, lorsqu'il eut constaté qu'il n'y avait aucune réelle blessure qui s'était greffée aux anciennes, le mafieux prit un peu de recul et lui offrit un doux sourire, quoi que passablement impacté par l'anxiété qui venait de revenir à la charge. Même s'ils avaient pu les arrêter une première fois, ce n'était pas moins de quatre mafieux qui avaient été envoyés sur leurs traces... Et l'un d'entre eux n'avait pas agi, lors de leur première charge. Si les choses devaient dégénérer à nouveau, il allait sans dire que la situation allait se tendre plus que sévèrement...
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Mizeria K. Balogh
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MessageSujet: Re: What do I do because of you ?    What do I do because of you ?  EmptyDim 18 Aoû - 19:37

What do I do with you?
I look at you and I think of you even more


Si Mizeria entendit bel et bien, et même parfaitement Gabriel, elle ne prit pas la peine de lui répondre. A vrai dire, elle ne parla même pas à Rai tandis qu’il s’enquérait de son état. Elle le laissa simplement regarder sa tête, les yeux toujours clos. Il lui fallait faire le vide, se calmer et reprendre l’ascendant. Si elle répondait à son collègue, elle risquait de se montrer plus virulente que nécessaire, quant à Rai ça ne servait à rien de lui mentir en disant que tout allait bien. Tout comme il était idiot de sa part de prétendre qu’il aurait pu tout gérer seul. Dans l’état des choses, elle avait envie de se montrer pragmatique. Elle réussit cependant à desserrer les dents tandis que le brun continuait son examen. Ses épaules s’affaissèrent enfin quelque peu et elle s’autorisa une profonde expiration. Même si la pression était par la même occasion redescendue, elle n’enchaina pas tout de suite. Elle rouvrit bel et bien les yeux en sentant le Nagafuse se reculer quelque peu, pour le voir lui accorder un sourire. Elle le fixa quelques secondes, y voyant à nouveau toute la pression et le stress qui l’avait tu quelques instants plus tôt. La blonde referma les yeux, et comme une vieille habitude ou rengaine, elle leva une main vers le visage du brun, la posant délicatement sur sa joue, et se guidant de ce contact pour se rapprocher et coller son front au sien. Elle expira une nouvelle fois, tout allait bien se passer, il le fallait. Elle aurait pu le trouver les yeux grands ouverts, le fixer encore de tout son saoul, mais non elle avait besoin de ce simple échange qu’elle avait pourtant été contrainte à faire pendant des jours et des jours quand elle était privée de sa vue. C’était devenu comme une promesse cachée, une certitude qu’elle pouvait le trouver même dans la nuit la plus noire, il était toujours là auprès d’elle.

Malgré tout, ce petit moment privilégié fut bien vite dérangé par Gabriel qui ne cessait de s’époumoner et Ash qui commençait à se moquer de lui… Elle les laissa se prendre le bec quelques instants, constatant que si les deux autres n’intervenaient pas encore, les choses n’étaient pas en phase de dégénérer. Ils lui tapaient déjà simplement sur le système… Et c’était loin d’être fini vraisemblablement. Comme par mauvaise habitude de la part de Ash, ce dernier décida de changer de cible et de se mettre à faire des commentaires sur le couple, Gabriel étant décidément une proie trop facile à provoquer.

« Et sinon vous faites quoi là, les deux ? L’amour psychologiquement ? On vous dérange pendant l’ouverture de vos chakras ou ça va ? »

Ses yeux s’ouvrirent d’un coup mais pourtant elle resta à regarder Rai quelques instants, dans le plus grand calme. Une nouvelle détermination semblait briller dans ses yeux, ou plutôt un énervement grandissant ? Elle se détacha de lui presque précautionneusement et pivota vers son cher collègue.

« Tu veux essayer Ash ? Parce que ça pourrait te faire du bien de baiser un coup, à défaut d’essayer de fermer ta gueule tout seul comme un grand. »

Elle vit les trois autres ravaler leurs salives et Ash se tendre. Si les autres protagonistes ne rajoutèrent rien à ça et se retinrent même pour certains de pouffer de rire, ils pensèrent néanmoins à l’unisson que c’était reparti pour un tour et qu’ils étaient dans la merde si ça continuait. Oui, les échanges entre Ash et Mizeria étaient rarement des plus cordiaux… Bien évidemment, ils arrivaient à échanger normalement, mais il semblait impossible pour les deux de maintenir cela sur le long terme. Il en fallait toujours un pour chercher l’autre, et les deux s’y mettaient alors pour savoir qui aurait l’ascendant.. La blonde et chef de ce petit monde, ne restant jamais en dernière position évidemment… Ash avait comme un besoin irrépressible de faire ses preuves, et Mizeria en avait presque fait un devoir de toujours le recaler au plus possible. Les manières douces ne semblant malheureusement pas prendre effet sur le jeune homme, elle était donc rarement tendre ou polie avec lui… Il semblait également qu’ils soient faits de la même trempe, chose assez désagréable à souligner pour les deux concernés qui commençaient déjà à se regarder de travers. L’ex-Leone se leva dès lors pour faire face à ses anciens collègues. Ash l’imita comme avec un air de défi et une volonté de reprendre leur manche où ils l’avaient laissée. Ce fut Akio qui calma cependant ses ardeurs, ils n’avaient pas le temps d’assister à une autre raclée, et il doutait même un peu que leur chef arrive à en administrer des aussi sévères que d’habitude vu son précédent état sur l’escalier.

« Ash, n’énerve pas Maman. Tu sais que ça va mal finir après, elle va te donner une bonne fessée tu vas chouiner encore, et elle risque te priver de dessert quand elle reviendra.
- Arrêtes de m’appeler maman. »

Ash pivota la tête immédiatement vers Akio qui l’accueilli avec un sourire moqueur. Gabriel soupira de son côté, tout était comme au bon vieux temps semblait-il. Les deux têtes brulées, Akio qui prend un malin plaisir à rester détaché et se moquer d’Ash, et d’ici peu ça serait lui-même qui serait convié à ce petit numéro vu et revu, mais qu’ils effectuaient pourtant tous à chaque fois presque de bon cœur. Comme si Mizeria l’avait senti, elle adressa un micro sourire au grand blond pour le rassurer, elle ne comptait pas s’amuser plus que cela. Encore moins effectivement jouer le rôle de leur mère… Bien que les deux autres auraient mérité de se faire tirer les oreilles, ils commençaient déjà à se chercher verbalement.

« Ash, Akio ça suffit. Ash n’aura pas de fessée mais c’est toi qui va-t’en prendre une si tu continues à l’énerver et à m’appeler maman. Il faut qu’on parle, sérieusement. »

Elle pointa Akio du doigt pour lui rappeler qu’elle pouvait aussi s’en prendre à lui. Bien qu’il fût beaucoup moins pénible à rappeler à l’ordre que Ash…

« Bah vas-y crache le morceau on attend que ça. C’est toi qui a foutu la merde et qui n’explique rien, tu préfères fricoter avec l’autre idiot derrière toi on dirait. Ça, apparemment, t’as eu assez de temps pour ça. »

Évidemment, Ash ne ratant jamais une occasion de se taire jugea bon de parler encore. Et cette fois ci, la jeune femme n’avait pas envie de se montrer magnanime. Sans réellement réfléchir, elle attrapa la première chose qui lui tomba sous la main sur le buffet qui se trouvait à côté de l’escalier et le lui jeta sans hésitation en visant la tête. Il évita de justesse l’album photo assez épais, et il commença à peine à ouvrir la bouche pour se montrer de nouveau insultant qu’un chandelier frôla sa tempe. Cette fois ci, il leva les mains l’air en jurant.

« C’est bon putain, arrêtes et coupe tes flammes.
- Merci. Ça m’aurait embêté quand même de te balancer tout mon salon sur la tête. Déjà que vous m’avez foutu le bordel et que vous avez pété une fenêtre et une porte. »

Elle les sentit se faire tout petits, rien n’allait lui échapper et elle allait surement leur en tenir rigueur à l’avenir… Après tout, c’était sa maison et elle les connaissait, une fois de plus ils s’étaient montrés indélicats et bourrins. Elle soupira face à ce constat, ce n’était que matériel mais c’était les raisons qui avait pousser à un tel bazar qui l’énervait. Tout était véritablement un bordel, l’état du salon, la présence de 4 Leone dans celui-ci, et la raison de leur présence.

« Bref… Qui vous envoie ? Enfin je me doute que c’est Mitsuki mais qui l’a poussée à le faire ?
- Ca a été le bordel quand le premier des captifs est revenu.. Elle a réussi à calmer le jeu, elle avait compris ton message. Par contre quand le deuxième s’est pointé et nous a raconté pareil que le premier.. Certains gardiens se sont emportés… Puis tu rajoutes des doutes, des rumeurs et la boss n’avait plus le choix que d’envoyer une équipe prendre des nouvelles histoire de rassurer tout le monde.
- Laisse-moi deviner le premier qui l’a ramené c’est Wilfried ? »

Elle regarda Gabriel hocher la tête ce qui lui arracha un soupir. Rien d’étonnant… Wilfried Park, gardien de la brume, avait toujours été retissant à son sujet. Il prenait un malin plaisir à lui reprocher la moindre chose et ne ratant jamais une occasion de remettre en question sa loyauté ou son travail. Décidément elle ne pouvait plus voir en peinture les gardiens de la brume, elle avait envie de vomir en pensant à celui de sa famille ou l’ancien des Auditore. Quelques mots peu élogieux sortirent de ses lèvres pour qualifier Wilfried et elle maugréa quelque peu. Sans un con pareil, comme elle venait entre autres de l’insulter, elle aurait eu moins de soucis à l’heure actuelle. Elle n’avait pas besoin de ça. Elle saurait lui faire payer en temps et en heure quand elle reviendrait. Depuis quand avait-elle encore à faire ses preuves auprès des Leone ? Elle se sentait vexée, jamais elle ne leur avait donné une seule occasion de douter d’elle.. Combien de fois d’ailleurs avait-elle risqué sa vie pour ces mêmes personnes ?

« Alors justement, qu’en est-il ? Tu as retourné ta veste pour de bon pour les Auditore ? Pour lui ? »

Sortant de ses pensées, elle releva les yeux sur Ash qui se tenait désormais appuyé contre un mur du salon, les bras croisés et bien plus sérieux que précédemment. Ils se fixèrent puis le regard de l’ex-Leone balaya le reste de l’assemblée, ils étaient tous suspendus à ses lèvres attendant ses fameuses explications. Elle ne pouvait que comprendre... Ils avaient dû se sentir trahis dans tous les cas. Qu’ils croient effectivement que cela soit vrai, ou qu’ils restent persuadés que cela soit une mission de sa part… Ladite mission était par conséquence énormément importante et elle s’y aventurait sans eux, elle les mettait à l’écart. Et une interrogation primordiale devait subsister… Que faisait-elle avec Rai ? Ils semblaient au courant de leur couple… Les prisonniers Leone avait dû entendre des échos ou suffisamment retenir qu’elle était accolée au brun lors du verdict de ce dernier.

« Je ne suis pas avec les Auditore… C’est une manœuvre comme vous devez vous en douter, du moins je l’espère. Et d’ailleurs je vous présente Rai…
-Nagafuse, gardien du désert. Clairement pas un enfant de chœur vu les cadavres qu’il laisse derrière lui. Ça aussi tu comptes nous l’expliquer ou il est un souvenir de « vacances » ? »

Cette fois ci, elle croisa le regard d’Akio, bien plus agressif et sur la défensive pour sa part. Et pour cause, c’était le plus renseigné sur les Auditore… Au final, il ne devait pas savoir énormément de choses sur Rai mais il en connaissait suffisamment de néfastes… Et si Mizeria finissait par dire que Rai faisait aussi partie de la manœuvre, qu’elle l’utilisait pour son but, ce qui était complétement faux, ils en viendraient tous bien vite à la conclusion qu’il en avait trop entendu et qu’il faudrait l’éliminer sur le champ. L’aura d’Akio ne faisait que renforcer ce pressentiment-là. Le jeu devenait serré, et ce n’était pas le moment de le montrer ou ne serait-ce que laisser transparaitre la moindre faiblesse. Bien qu’elle restait momentanément leur chef, elle perdait jour après jour les pleins pouvoirs. Et elle ne pourrait rien contre eux s’ils décidaient qu’il était temps que son règne et sa folle mission s’arrêtent ici. Sa position en devenait presque trop délicate à nouveau, elle ne leur devait rien, elle n’avait pas à justifier sa relation ou leur demander leur approbation, mais elle ne pouvait pas leur balancer ça, ils ne l’accepteraient pas. Il était également inutile d’essayer de faire passer Rai pour un saint… Elle se retint de soupirer et continua de fixer Akio. Il avait dû briefer les trois autres, donc s’il y en avait bien un qui pouvait décider que Rai n’avait plus à être dans l’équation c’était lui.

« - Ce n’est pas un « souvenir de vacances ». Que tu le croies, que tu me fasses confiance ou non, c’est du sérieux. Le pourquoi du comment ne vous regarde pas. Je pense que vous êtes suffisamment réfléchis et que vous me connaissez pour savoir que je ne me risquerais pas à faire des choses bêtement par amour sur un coup de tête. Et même si c’est ce que vous pensez… En fait, je vous emmerde. Le problème n’est pas là. Il est de mon côté, de notre côté désormais c’est tout ce que vous avez besoin de savoir. »

Pas du genre à faire bêtement des choses par amour ? N’était-ce pas exactement ce qu’elle n’arrêtait pas de faire ? Aurait-elle vraiment agi ainsi avant ? N’était-elle pas simplement prise d’une folle passion occultant ses sens et sa réflexion ? Ces doutes s’installèrent en elle, mais elle les balaya bien vite, elle n’avait pas le temps de s’écouter ou de tergiverser… Sa décision était prise depuis le verdict du brun, il n’y avait pas de place au doute. Du moins c’est ce dont elle essayait de se convaincre. Akio continua de la fixer comme s’il pouvait justement voir les failles qu’elle essayait pertinemment de ne pas regarder elle-même. Elle soutint son regard. Pourquoi diable Mitsuki avait envoyé tous ceux qui se permettaient de lui tenir tête ? La réponse était simple pourtant.. Parce que c’était ceux dont elle était la plus proche et qui pourrait voir clair dans son jeu, la comprendre s’ils en faisaient l’effort… Mais allaient-ils le faire pour le coup ? Ils avaient même dû se montrer volontaires d’eux-mêmes les connaissant.

« On ne pensait pas justement que tu pourrais nous faire un coup comme ça Mizeria. On était bien loin de s’imaginer que tu pourrais t’attacher à l’ennemi et infiltrer le camp adverse… Comment on pourrait donc te croire à partir de ça ?
- Tu as raison June. Mais je ne fais pas appel qu’à vos statistiques et vos logiques, je fais aussi appel à votre instinct comme je vous l’ai toujours appris. La question ici n’est cependant pas si vous sentez la mission ou pas, mais plutôt si vous me sentez sincère et sure de mes convictions. »

Un silence s’installa et elle les sonda tous du regard, relâchant enfin le lourd regard d’Akio. Ils se regardèrent tous entre eux, comme pour s’assurer qu’ils étaient du même avis et ils posèrent leur regard successivement sur Akio puis sur Ash. En temps normal, Mizeria se serait permise de déconner que c’était donc à ces deux idiots à qui on se référait après elle... Mais l’heure n’était pas à la blague. Ash bougea la tête comme pour signifier à Akio que ce dernier avait le dernier mot. C’était donc ligué contre elle qu’ils arrivaient le mieux à s’entendre, elle ignorait si elle devait se sentir touchée et ou vexée… Akio cependant de son côté soupira, elle le connaissait presque par coeur. Tout cela commençait par l’embêter profondément, il n’aimait pas les soucis ou les ennuis.

« Ok. Laissons ton Don Juan de côté. C’est quoi ton plan ? »

La blonde se retint de lui sourire, elle se rappela qu’elle ne lui devait rien donc elle n’avait pas à lui adresser de remerciement direct. Jusqu’à preuve du contraire elle restait leur chef... Cependant fidèle à elle-même, elle lui adressa un léger mouvement de tête. Ils restaient ses coéquipiers également.

« En soit il n’y a pas de plan précis… Je suppose que vous avez entendu parler du bordel avec le gardien de la brume ?
- En effet, et j’ai déjà tiqué quand tu m’as appelé pour Fargo. »

La blonde acquiesça, elle s’en doutait déjà, Akio avait dû sentir qu’il se passait quelque chose avec les Auditore au moment où elle l’avait contacté... C’était lui qui l’avait aidé pour le coup de la sœur de Fargo.

« Enfin, finalement ça n’a pas fait autant de bruit que ça, tu es restée la vedette. La conseillère de la lune Leone qui rejoint les Auditore… On a plutôt entendu parler de ça. Et de rumeurs que c’était vous deux qui aviez botté les fesses de Mephisto, ce qui t’avait valu ton intégration dans leurs rangs… »

Mizeria serra les dents. C’était bien joué de la part des Auditore... Non ils n’avaient pas réellement mis Méphisto en échec mais les amants en crevaient véritablement d’envie... Pour le reste elle devait reconnaitre qu’ils s’étaient montrés habiles… C’était une logique assez simple et efficace. Elle jeta un regard quelque peu exaspéré à son cher et tendre, espérant lire sur son visage le même agacement que le sien. Ils n’avaient rien accompli du tout et ils n’avaient clairement pas été remerciés... Leur situation était précaire, ils étaient bien loin d’être traités comme les héros du jour... Surtout Rai. Elle redirigea son attention vers ses collègues en soupirant.

« Surprise mais on a juste fait capoter son plan parce qu’il nous avait pris comme cible ou plutôt comme pantins... Mais bref c’est une autre histoire. Et aussi un autre problème à gérer pour nous… Ce qui en est c’est qu’avec moi dans leurs rangs je peux suffisamment glaner d’informations pour tenter de les faire imploser.. Imaginez un peu, savoir leurs faiblesses, comment fonctionne leur QG et j’en passe. C’est une occasion en or pour s’en débarrasser définitivement… Et Rai œuvrait déjà dans ce but… A deux je suis sure qu’on peut y arriver. »

Il fallait rendre à Rai les mérites de toute l’opération. Il était celui qui avait fait le plus de sacrifices dans l’histoire, celui qui avait déjà pensé à les ruiner. Elle se tourna quelque peu de nouveau comme pour s’excuser silencieusement. Elle avait hésité à dévoiler que c’était son idée à la base, en avait-il envie ? C’était le mettre en péril aussi si ça venait à se savoir… Cependant elle leur faisait confiance. Elle pria que le brun ne lui en tienne pas rigueur. Elle ne voulait pas en dévoiler plus, surtout pas sur les réelles ambitions qui l’animaient et sur ce qu’il lui avait confié il y avait peu. Parler de leur travail d’équipe, de leur couple sembla néanmoins lui redonner une force colossale. Il lui semblait à nouveau possible de tout renverser, de gagner ce pari presque impossible, d’en sortir victorieux et heureux. Oui, s’ils étaient ensembles ils étaient capables de prouesses, ils l’avaient déjà trop de fois prouvé. Ca allait encore être éprouvant, mais ils avaient grandis au contact de l’un et de l’autre et leurs sentiments n’en étaient que plus fort. Une nouvelle force gonfla sa poitrine avant que Ash ne vienne la réduire en miettes.

« C’est une mission suicide. S’ils apprennent ton rôle tu es fichue. »

La tension qui avait pourtant quitté la quiétude du salon revint au galop. Quelques respirations se coupèrent à l’intervention d’Ash. C’était pire que s’il venait de trancher ses espoirs à vif. Son cœur qui semblait, quelques minutes plus tôt, rebattre plus vigoureusement qu’avant, se serra de manière virulente. Elle avait conscience de cet état de fait. Elle jouait avec le feu depuis le début. Mais elle ne souhaitait pas songer au pire, elle ne voulait surtout pas entendre le pire, ou plus. Et pourtant… Ash, plus sérieux que jamais et son regard bien planté dans le sien, lâcha la bombe qu’elle redoutait le plus. Oui, il formula ses peurs et surtout les évidences qu’elle connaissait déjà pour sa part, de manière claire, directe et dans toute la cruauté qui se dégageait de cette réalité. Il utilisa par la même occasion les pauvres mots qu’elle n’arrivait pas à avouer à Rai depuis des jours.

« S’ils découvrent que tu es la chef de la section d’espionnage des Leone, tu es morte. »


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Rai Nagafuse
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MessageSujet: Re: What do I do because of you ?    What do I do because of you ?  EmptyVen 11 Oct - 8:51



Dans les yeux de la vérité.


Lorsque la discussion reprit d'une façon houleuse et musclée, l'un de leurs charmants agresseurs décidant de les héler tandis qu'ils s'offraient une seconde de répit et d'union, le Nagafuse comprit qu'ils venaient de franchir un cap et qu'il allait à présent devoir se contenter du rôle de spectateur. Malheureusement, puisqu'il ne connaissait absolument pas ces personnes qui venaient de faire irruption afin de manifestement ramener Mizeria à la raison, il était tout bonnement incapable de se prononcer avec pertinence. Ses mots et ses phrases risquaient d'être analysés, décortiqués, voire simplement détournés de leur sens initial... On allait lui faire un procès d'intentions, en somme, pour un simple délit de faciès : il était un Auditore, et cela était, selon toute rationalité, une excellente raison pour que les Leone se méfient de lui comme de la peste. Cependant, il ne se contenta pas de prendre une chaise afin d'attendre que les minutes passent, défilent, et que la suite des opérations soit enfin tranchée, en leur faveur... ou en leur défaveur. Il savait évidemment que si les quatre mafieux décidaient de les prendre à nouveau pour cibles, ils étaient perdus, lui comme son amante : il lui faisait donc confiance pour désamorcer cette situation plus qu'épineuse, mais il ne l'abandonna pas totalement, demeurant à ses côtés en tant qu'observateur assidu. Les mots qui s'échangèrent par la suite ne lui échappèrent pas, aucun d'entre eux : et il tenta même d'en apprendre autant que possible sur la psyché de ces interlocuteurs impromptus. Rai, donc, comprit que tout ce petit monde était régi par des rapports sociaux relativement tendus. Pour une raison ou pour une autre, c'était Ash qui semblait écoper du rôle le plus ingrat, puisqu'il semblait être le plus à même de se mettre de lui-même sur le devant de la scène... Ses prises de position radicales et souvent révélatrices lui valaient des gausseries de la part de ses petits camarades. Pas grand chose de bien méchant, pour sûr... mais une information désagréable pour autant. Il était envisageable que ces quatre Leone ne soient pas d'accord quand au verdict... quant à savoir ce qui arriverait à départager leur opinion finale, c'était une autre affaire et il était encore trop tôt pour le savoir, surtout de son point de vue.

Le noiraud ne prêta qu'une attention mitigée à la crise de colère froide de sa bien aimée, qui commença à arroser l'un de ses apparents anciens subordonnés d'objets du quotidien : en revanche, il se fit à nouveau plus studieux lorsque les dires reprirent et échangèrent informations cruciales sur informations cruciales. Ces types ne s'en rendaient pas compte, mais ils en disaient plus que ce qu'ils ne semblaient le vouloir... peut-être était-ce lié au fait qu'ils se sentaient parfaitement en sécurité ? Peut-être estimaient-ils que l'ancien gardien du Désert n'était plus une menace, et qu'il quitterait cette pièce soit en tant que leur allié, soit en que cadavre ? La question méritait d'être posée... Toujours fut-il que, selon l'aveu même de la principale intéressée, Wilfried, gardien de la Brume, semblait éprouver de larges ressentiments vis-à-vis de Mizeria, pour une raison ou pour une autre. C'était une information alléchante, puisque ce n'était pas le genre de bruits que les parrains laissaient courir à propos de leurs subordonnés les plus fiables... Les dissensions décrédibilisaient gravement les familles qui en étaient les victimes, car elles débouchaient trop souvent sur des tensions telles que celles dont le couple avait eu à souffrir récemment. On n'était généralement qu'à un pas de la guerre civile... Les familles prétendument bienfaitrices n'en étaient donc pas totalement épargnées ! De surcroît, l'influence de Mitsuki semblait grande... mais pas illimitée. Si elle pensait avoir compris le message, et si elle était convaincue de l'innocence de Mizeria, elle aurait dû pouvoir enjoindre Wilfried et les autres gardiens les plus méfiants à la confiance la plus absolue, et ce peu importe le nombre de témoignages concordants. Si elle n'avait pas su le faire, et si elle avait concédé que quelques membres de leur famille mène l'enquête, il n'y avait que deux options envisageables : soit elle n'était finalement pas convaincue réellement de l'innocence de Mizeria... soit elle était simplement incapable de réprimer plus longtemps les doutes et les questionnements de ses subordonnés tout en prônant l'inaction et l'attente. Et pour cette question, le Nagafuse avait très ironiquement déjà une réponse en tête. La mafia était un milieu extrêmement sexiste, même si bon nombre des cadors des familles les plus puissantes étaient en vérité des femmes : il n'était pas improbable que les cadres de la famille Leone se soient méfiés du jugement de Mitsuki en considérant qu'elle était trop tendre, trop coulante... trop féminine. Si même les familles dont on vantait généralement les vertus étaient à ce point embourbés dans les tensions et les vices de la société lambda, Rai n'avait peut-être pas besoin de fournir un grand effort pour pousser tout le système à l'effondrement...  

On en savait trop sur lui. C'était la troisième information capitale qui ressortit de cet échange. Ce n'était pas surprenant, compte tenu de son précédent grade au sein de la hiérarchie Auditore : il savait qu'il traînait derrière lui une sale réputation. Les soleils l'avaient quelque fois mis en avant, louant son indépendance, son intelligence et son sens du timing pour décourager leurs opposants et les familles mineures qui tentaient de leur jouer des tours... Mais le prénommé Akio en savait beaucoup. Beaucoup trop. Ce fut la première fois au cours de cet échange que son cœur manqua un battement. Que savait-il, au juste ? La question lui brûlait les lèvres, mais la formuler risquait de lui coûter cher, trop cher : il devait demeurer passif, laisser à Mizeria le luxe de mener cet échange, seule. Il n'était qu'un boulet, s'il laissait ses émotions prendre le pas... Et il était trop maître de lui-même pour seulement s'y résoudre. Aussi demeura-t-il factuellement de marbre, tandis qu'il se demandait quels cadavres, au juste, lui étaient imputés. La Balogh avait-elle envers et contre tout offert de précieux renseignements à ses pairs à la suite de leurs premiers échanges ? C'était possible... Elle parvint néanmoins à sauver la situation en enjoignant ses anciens subordonnés à promouvoir leur instinct plutôt que leur intellect, à miser sur leur impression première plutôt que sur leur réflexion. C'était un pari osé... mais le seul qui pouvait les mener vers une issue heureuse pour tout le monde, en fin de compte. Une idée avait infiltré l'esprit du gardien du Désert dès les premières secondes, mais il s'était bien gardé de la communiquer à l'oral, évidemment : que se passerait-il si on estimait qu'il avait manipulé les souvenirs de la jeune femme par le biais de ses flammes pour la faire agir à sa convenance ? Il savait heureusement d'ores et déjà ce qu'il pourrait répondre à une telle suspicion : elle l'avait à plusieurs reprises tiré de bourbiers tels qu'il n'aurait pas été en mesure de maintenir l'illusion éternellement. Sa captivité, seule, suffisait à prouver son innocence... Mais le croirait-on, pour autant ?

Il aurait aimé qu'on le questionne à ce sujet. Il l'aurait préféré, mille fois. Lorsque Akio fit à nouveau des siennes, apprenant à Rai que c'était lui que Mizeria avait sollicité afin d'obtenir de l'aide pour tenter de prendre Méphisto de court, le cœur du noiraud manqua un battement supplémentaire, un deuxième. Il était trop finaud pour son propre bien, et il commençait à comprendre que l'affaire était louche. Pourquoi Akio, ancien subordonné de Mizeria, disposait manifestement du contact direct de Fargo, ou d'un moyen de lui nuire indirectement, d'informations à son sujet ? Fargo n'était pourtant qu'une petite frappe, qui traitait généralement avec les forces Auditore tout en jouant profil bas... Le tout venant Leone ne devait même pas soupçonner son existence. Ce fut la première fois depuis le début de l'échange que Rai jeta un coup d’œil en coin à sa bien aimée, qui demeurait de son côté focalisée sur l'échange qu'elle devait mener. Il commençait à être hébété, à comprendre sans vouloir savoir : il se doutait qu'une vérité hautement désagréable risquait de lui parvenir d'une seconde à l'autre. Puis vint l'instant où la Balogh fut contrainte et forcée de parler de l'objectif initial du Nagafuse, en minimisant néanmoins sa portée et en affirmant qu'il avait agi dans l'optique de pouvoir un jour détruire les Auditore : c'était partiellement vrai, assurément réducteur, mais c'était surtout tabou et secret. Il se mordit la lèvre inférieure, pour ne rien dire, et conserva un masque aussi impassible que possible. Voir son plan et la vérité être étalée ainsi en public, même face à un parterre aussi réduit, cela l'angoissait. A partir de maintenant, tout allait être répandu. Tout allait être répété, et su. Mitsuki serait mise au courant, bien évidemment : il était absolument stupide de croire que les quatre subordonnés de Mizeria tiendraient tous leur langue. Certains gardiens, sinon tous, risquaient également d'être mis au courant : après tout, c'était à cause de leur frustration que le quatuor avait été dépêché jusqu'à Londres. Et à partir de là... Si le prénommé Wilfried voulait effectivement nuire à la bien-aimée du noiraud, il n'aurait qu'une seule chose à faire : provoquer une fuite d'informations. Faire en sorte que les Auditore l'apprennent. Faire en sorte de les condamner, elle et lui. Et même s'ils survivaient, quelle importance ? Tous ses efforts seraient ruinés. Tous ses progrès seraient balayés d'un revers de la main. Plus que jamais, il était en péril : pas seulement lui, mais tout ce qu'il avait pu accomplir jusqu'à présent. Plus encore que lorsque Méphisto avait décidé de s'interposer au beau milieu du couple...

Mais cela n'était rien. Un troisième battement fut perdu à tout jamais lorsque Ash intervint. Puis un quatrième. Puis un cinquième. Et vint enfin la révélation tant abhorrée, tant redoutée.
Mizeria était la responsable de la section espionnage des Leone.
Cela expliquait tout.
Le noiraud aurait aimé ne pas avoir à y croire, ne pas avoir à l'entendre même : il aurait préféré éternuer à cette instant précis, quitte à en perdre ses tympans, plutôt que d'avoir à soutenir de tels propos. Plutôt que d'avoir à les endurer, à les comprendre, à envisager tout ce qu'ils sous-entendaient.
Elle était la responsable de la section espionnage des Leone. Manipuler autrui, c'était son métier. Elle était le même genre d'individu que lui, en fin de compte, à ceci près qu'elle usait de moyens plus orthodoxes, plus éthiques, moins radicaux. Elle était le genre de personnes qui manipulaient autrui. Qui utilisaient autrui.
Le genre de personnes qui s'aventurait sur le terrain pour dénicher des informations précieuses avant de les ramener à ses compagnons et supérieurs. Le genre de personnes qui n'avait pas peur, en fin de compte, de se salir les mains directement.

Ce fut un déchirement. Comme une trahison... à ceci près qu'elle était tout ce en quoi Rai croyait, tout ce qu'il aimait, pour la première fois depuis des décennies. C'était la première fois qu'il ressentait quelque chose de positif, d'enthousiasmant, à propos d'une personne qu'il avait, petit-à-petit, accepté jusque dans son intimité, lui qui à l'accoutumée était si distant, si méfiant, si hypocrite, si faux. C'était la première fois qu'on piétinait tout ce qu'il avait osé générer de bienveillant, tous les bons sentiments qu'il n'avait exceptionnellement pas réprimé sauvagement.
Son monde venait de s'effondrer.
Elle lui avait menti. Par omission, peut-être : mais elle lui avait menti. Et peut-être avait-elle fait davantage encore. Peut-être l'avait-elle manipulé. Peut-être était-il, en fin de compte, devenu la victime.
C'était une ironie cruelle et grinçante... mais une fois n'est pas coutume, elle ne lui arracha pas la moindre expression. Sans doute était-ce le pire : son expression faciale demeura parfaitement inchangée, parfaitement intacte. Pourquoi ? Parce qu'il était, depuis des années, proprement incapable de savoir comment réagir à ce type de nouvelles foudroyantes. Beaucoup auraient sursauté, beaucoup seraient intervenus, beaucoup auraient larmoyé et auraient tenté de s'enfuir, de fuir cette réalité, de l'oublier. Lui semblait, curieusement, n'en faire aucun cas.
Il avait retrouvé son masque.

Mais son cœur, lui, était broyé. Sa respiration calme et fluide ne trahissait pas le désespoir et la solitude qui, brusquement, s'étaient à nouveau invités en lui. Il était seul. Il l'avait toujours été. Il aurait dû le rester. Il n'avait pas le droit au bonheur. Il avait causé trop de tort. Il était la main du Diable. Il était l'artisan de la détresse des innocents. Il était devenu une crapule, de celles qu'il combattait, qu'il avait juré de détruire.
Il était un monstre. Il n'avait pas le droit au bonheur. Il ne l'aurait jamais.
L'espace d'un instant, il se demanda ce que Mizeria allait répondre. Peut-être allait-elle déclarer qu'il n'était pas censé le savoir. Peut-être allait-elle décréter qu'il n'y avait que la mort, pour lui. Peut-être allait-elle mettre un terme à toute cette mascarade, et le tuer de ses propres mains. Peut-être.
Il ne basait pas son existence sur des peut-être. Il n'aimait pas les hypothèses. Il ne les avait jamais aimé. Elles témoignaient d'une incertitude.
Il abhorrait l'incertitude.
Il n'aimait pas ignorer.
L'ignorance le terrifiait.

Il resta de marbre. Il parcourut cette assemblée d'un regard vide. Ses lèvres ne se descellèrent pas. Il ne leur fit ni le plaisir de se plaindre, ni celui de larmoyer. Ils étaient des mafieux. Ils étaient ses cibles. Ils méritaient la mort. Tous.
Mizeria aussi. Peut-être. Peut-être...

Il la méritait, lui aussi. Peut-être...
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MessageSujet: Re: What do I do because of you ?    What do I do because of you ?  EmptyVen 8 Mai - 20:07

What do I do with you?
I look at you and I think of you even more



« S’il découvrent que tu es la chef de la section d’espionnage des Leone, tu es morte. »

Ash avait osé prononcer les mots les plus durs qu’elle avait sur le bout de la langue depuis des jours et des jours. En une seule phrase, toute la fatalité de son rôle venait de tomber. Tout venait de voler en éclats. Mizeria se sentit tout d’abord mal, comme presque trop lourde soudainement. Son souffle se coupa presque net à la moitié de la phrase de son subalterne et il lui sembla mettre une éternité à le récupérer. Pendant ce temps elle eut l’impression que la pièce se mettait à tourner, que ses jambes allaient lâcher, qu’elle allait chuter et tomber dans le vide. Dans un néant uniquement créé par ses décisions, par son plan plus que périlleux, par ce qu’elle dissimulait, par ce qui la définissait également. Son cœur manqua plus qu’un battement. Oui, elle aurait pu tomber sur le coup, à vrai dire, elle s’écroulait intérieurement. Ce n’était pas qu’elle avait oublié son rôle ou qu’elle en avait peur, bien loin de là. Non ce dont elle avait peur, elle ne pouvait le voir actuellement… Le regard de Rai. Elle n’osa pas se retourner ou lui adresser le moindre coup d’œil. La jeune femme se contenta de rester là, figée, comme abasourdie, imaginant déjà que les yeux du brun devaient creuser des trous dans sa tête, qu’il devait avoir envie de la tuer d’un simple regard, qu’il devait se sentir trahi. Pouvait-elle feindre une mauvaise blague pour s’en sortir ? Bien sûr que non, la seule chose dont elle pouvait rire à ce moment précis était de sa stupidité. Pourquoi avait-elle tardé à tout avouer à son partenaire, pourquoi avait-elle pris tant de risques pour au final se faire damer le pion par Ash ? Tout était de sa faute. Depuis combien de jours, d’heures, de secondes, elle savait pertinemment que la vérité allait un jour tomber d’une telle manière ? Et à cet instant elle ne pouvait pas tout lui expliquer, ils devaient en parler seul à seul et surtout ne pas montrer aux autres une potentielle faille dans leur relation. Plus le temps s’était écoulé, plus elle savait qu’elle ne serait pas celle qui livrerait la vérité au Nagafuse. Au fond ce n’était pas de l’entêtement, de la couardise ou une façon de se voiler la face... Non, la vérité était bien plus sinistre que ça. Sa vérité et son raisonnement surtout. Mais elle ravala ce dernier, comme le reste, comme tout ce qu’elle n’avait pas dit à Rai depuis qu’ils se connaissaient.

Les secondes s’écoulèrent, et elle resta là, le regard braqué sur Ash, ne laissant rien transparaitre. La chef de la section d’espionnage resta de marbre à encaisser son erreur, à assimiler les mots qu’on venait de lui adresser dans toute leur cruelle réalité. Elle ravala péniblement sa salive, ce fut le seul signe qui ne passa peut-être pas inaperçu. Puis, comme vaincue et défaite, un sourire amer étira ses lèvres. A quoi bon essayer de nier ou de cacher davantage la vérité ? Elle était la seule responsable et il était temps de tout assumer, de s’assumer aussi. Elle n’osa toujours pas regarder Rai mais elle balaya le reste de l’assemblée d’un regard pour revenir sur Ash, toute son amertume palpable dans son sourire. Il était temps de faire sortir la Mizeria « chef de la section d’espionnage des Leone » qu’ils semblaient tous si bien chercher et provoquer.

« Sans déconner Ash ? Tu crois que je ne suis pas au courant ? Ou tu crois peut-être aussi que je leur ai gentiment dit et que depuis on est de bons copains ? Que ça leur pose aucun souci tellement c’est des amours ? Merci de me rappeler des choses que je sais déjà et qui sont évidentes. »

Le jeune homme sembla se raidir, sensible à son intonation. Quelque chose clochait en dehors de sa prise de position radicale, mais il ne se doutait pas de quoi il en retournait vraiment, il mit cela sur le compte du risque de sa mission. Il était bien loin d’imaginer que sa supérieure avait en réalité caché ce fait capital à celui qu’elle avait présenté comme son amant quelques instants plus tôt.

« C’était juste pour souligner dans quelle merde tu es… On pourra pas te sortir de là si il se passe quoi que ce soit et tu sais que… »

Elle claqua sa langue contre son palais, retrouvant de sa contenance. Elle était la chef ici en effet.  Puisqu’Ash avait fait l’effort de le lui rappeler elle comptait bien lui en souligner toute l’ampleur, à lui et aux autres aussi d’ailleurs. Au final, peut-être avait-elle trop oublié de se montrer réellement comme telle. Son regard se fit plus incisif, comme si elle défiait ses collègues de faire quoi que ce soit de plus. Il n’était plus l’heure de jouer. Et il lui semblait inutile d’énoncer tous les faits. Si elle était découverte ils ne pourraient pas la sauver ? Elle le savait. Elle n’aurait plus qu’à mourir en ne dévoilant aucun secret aux Auditore ou à se donner la mort ? Elle le savait aussi. Oui son raisonnement était sinistre mais juste depuis le départ.

« Je sais quoi ? J’en sais plus que vous tous réunis. Qui vous a formé ? Qui vous dirige habituellement ? Qui vous donne les ordres ? Qui passe derrière vos déplorables conneries comme l’attaque d’aujourd’hui pour arranger les choses ? Moi. Et vous osez vous pointer chez moi de manière idiote et me faire la leçon et tenter de m’apprendre quelque chose ? »

Cette fois-ci, c’en fut trois qui ravalèrent leur salive difficilement, tandis qu’Akio de son côté resta de marbre mais semblait afficher une étrange satisfaction. La blonde ne le foudroya que davantage du regard. Le brun avait dû essayer de les dissuader mais, comme toujours, il n’avait pas insisté non plus sous peine de s’en fatiguer et il avait fini par suivre le mouvement. Il n’avait rien pour en être fier, aucun « je vous l’avais dit » à sortir. Dans le cas présent, ils s’étaient tous comportés comme des empotés doublés de gamins immatures et ça la démangeait de leur remettre les idées en place. Malheureusement, son salon avait déjà suffisamment subi de dégâts et son état physique ne lui permettait pas de faire davantage de folies.

« Je pars deux minutes et vous ne savez plus réfléchir ? Vous courrez à ma poursuite au moindre ordre ? Vous ne tentez aucune approche et vous attaquez directement sans aucune préparation ? Déjà que je vous ai tout de suite remarqués… Bande d’imbéciles. Vous repasserez niveau discrétion. Bon sang vous n’êtes pas censés être des novices ! Et vous osez remettre en doute ma loyauté parce que ce connard de Wilfried a encore ouvert sa gueule ? Et mieux encore vous comptez me dire comment faire les choses et à quoi je dois faire attention ? Vous vous foutez de moi là. Je vous jure j’ai envie de vous étriper.
- Mais tu ne peux pas par chance… »

Son regard bougea immédiatement sur Gabriel, ce dernier se gratta la nuque l’air penaud et leva une autre main en signe d’excuse. Il tenta d’esquisser quelques mots pour s’expliquer et s’excuser, ce qui ne résulta qu’en quelques mots incompréhensibles et un signe vers ses yeux. Elle allait ouvrir la bouche pour lui répondre de manière franche et directe comme avant, quand on l’interrompit.

« Oui elle a l’air blessée mais en attendant elle a quand même mis une raclée à Ash…
- D’où c’était une raclée !
- Excuse-moi mais elle t’a mis KO sans trop forcer alors qu’elle a l’air d’avoir morflé. Même affaiblie elle arrive à avoir le dessus sur toi.
- Et toi je te rappelle que t’étais sensé m’aider mais t’es resté planté comme un piquet surement parce que tu crevais de trouille !
- Je vous ai dit que c’était une mauvaise idée, qu’il fallait faire les choses autrement. Après vous gérez votre bordel sans moi. Le seul qui pouvait poser problème c’est l’Auditore.
- Oui enfin techniquement le plus ancien Auditore des deux maintenant… Cette enflure là. Rien que pour ça on a quand même bien fait d’attaquer
- Bien fait ? Tu t’es fait battre aussi, et par lui qui plus est. »

Elle soupira et se pinça l’arête du nez tandis que Gabriel semblait désigner Rai d’un coup de menton. C’était repartit pour un tour. Elle se demanda si elle n’avait pas rêvé tout ce temps. Les avait-elle vraiment formés à un quelconque moment ? Ou s’était-elle contenter de s’amuser avec eux ? Ou peut-être justement qu’ils voyaient tout cela comme un jeu… Elle savait que ce n’était pas le cas mais leur arrogance et leur manque de sérieux commençaient à lui mettre les nerfs à vifs. Non seulement ils avaient agi bêtement, sans suivre au plus possible ce qu’elle leur avait enseigné, puis ils osaient l’attaquer pour au final ne rien dire de pertinent et se chamailler. Leurs bêtises pouvaient bien leur faire risquer toute leur couverture, sa couverture. Si les Auditore avaient vent de cette incartade, ils seraient curieux d’en savoir le déroulement et la fin. Pire encore s’ils étaient dans les parages, les deux amants n’auraient plus que le choix que de laisser des corps derrière eux. Elle n’avait pas passé son temps à négocier la libération d’otages Leone pour en tuer quatre autres dans son ancienne demeure, encore moins des Leone encore plus proche d’elle que ceux captifs. Par chance, elle n’avait rien remarqué. Il semblait vraiment que les Auditore leur avaient donné carte blanche pour l’Angleterre… Ou alors leurs espions étaient bien meilleurs qu’elle, mais elle en doutait. Son nom n’avait jamais fuité depuis le temps qu’elle était à la tête de la section… C’était déjà pour dire une preuve de ses compétences. Mais ça lui paraissait étrange. Pourquoi ne mettre personne à les surveiller ? Était-ce un des privilèges de Rai puisqu’il était gardien ou bien était ce qu’ils étaient tous trop occupés à pister Méphisto… ? Certainement un mélange des deux. Ou pire encore, ils attendaient que les deux amants servent d’appâts… Ils étaient des cibles faciles sans surveillance et encore affaiblis. D’autant plus avec Rai qui ne disposait plus de son anneau de gardien et Mizeria qui en était presque au même niveau n’étant pas encore considérée comme une personne de confiance. Restait que ces collègues rajoutaient de l’huile sur le feu et potentiellement des ennuis dont ils pouvaient se passer.

« Ça suffit. »

Sa voix s’était élevée plus forte que prévu, mais elle n’en avait cure. Les quatre joyeux comparses semblèrent revenir à leur conversation initiale et se concentrer sur Mizeria. Elle soupira se sentant comme une mère rappelant ses enfants à l’ordre. Ils allaient vraiment finir par la faire s’arracher les cheveux… Ou vieillir plus vite que prévu, c’était au choix. De son point de vue, c’était regrettable qu’elle ait encore à les canaliser et à les rappeler à l’ordre. Mais en même temps elle ne pouvait nier qu’elle les aimait comme ça aussi... C’était son équipe. Elle en était bel et bien responsable... Même si sur le moment ils semblaient être réellement une bande d’imbéciles, elle savait leurs qualités à tous, leur acharnement, et qu’ils se permettaient d’agir ainsi car elle les avait toujours mis à l’aise et qu’elle fonctionnait ainsi, sans filtre et avec fougue… Mais apparemment, il lui faudrait revoir la notion de fougue de manière plus modérée et réfléchie prochainement. Elle allait avoir du travail quand elle pourrait retourner chez les Leone. Et elle espérait que cela soit très bientôt… Que cela se fasse en vie surtout et principalement, la chose la plus importante pour elle, avec Rai.

« On perd du temps inutilement et on prend des risques. Vous allez devoir filer d’ici peu sinon ça pourrait paraitre suspect bien qu’apparemment il n’y ait pas d’Auditore qui nous surveille… Et j’en ai marre de vous entendre vous engueuler. Donc écoutez-moi bien..»

Elle s’avança un peu vers eux pour avoir toute leur attention et être la plus précise possible. Les prochains mots qui sortiraient de sa bouche seraient décisives pour de bon. Soit ils acceptaient ses directives et la laissaient faire en écoutant ses demandes soit … Ils auraient à subir un nouvel affrontement.

« Bien… Maintenant que vous savez que je n’ai pas retourné ma veste vous allez faire les choses intelligemment et suivre un peu ce que je vous dis puisque ça à l’air de vous manquer... Rentrez chez les Leone. Dites à Mitsuki et au conseil que tout est sous contrôle. Rien de plus vous m’entendez ? Dites-leur que j’ai eu la possibilité de m’infiltrer et que j’ai sauté sur l’occasion. C’est tout. Me suis-je bien fait comprendre ? »

Elle les regarda à tour de rôle, tout d’abord Akio, puis June et Gabriel, et pour finir Ash. Chacun eu une moue différente mais ils semblaient avoir saisi.

« Moins de personnes sont au courant de ce qui se passe vraiment, mieux c’est. Notre sécurité dépend de vous donc ne dites rien. Mitsuki comprendra, et les autres ça ne les regarde pas pigé ? Et surtout. Vous pouvez comprendre mieux que quiconque qu’une telle infiltration nécessite de rester secrète au maximum, que cela soit dans son but ou dans son déroulement. Donc ne répétez rien d’autre. Ne parlez pas de ma relation avec Rai, ne parlez pas de lui tout court et pas non plus de notre plan, surtout pas. Dites-leur simplement que c’était une opportunité et que je les contacterais quand je le pourrais, qu’ils ne doivent pas essayer de le faire… Dites leur simplement que tout se déroule et finira comme pour la mission « Shura »… Rappelez leur juste ce nom. Mitsuki comprendra. »

Elle vit à leurs têtes surprises qu’ils ignoraient de quoi elle parlait, mais ils n’avaient pas à savoir. Peu de personnes étaient au courant de cette fameuse mission Shura, seulement les hauts gradés l’étaient à vrai dire… Mais c’était un moyen suffisant pour faire pression, pour leur rappeler son allégeance aux Leone, son travail et ses méthodes. Elle leur demanda ensuite simplement s’ils avaient tous bien suivit le plan. Les réactions se firent diverses. June hocha la tête vigoureusement quand Gabriel se contenta de lâcher un petit « oui », Akio resta silencieux et Ash émit un grognement qui semblait positif si la blonde se referait à son décodeur personnel des grognements de Ash. Elle soupira de plus belle et se détendit enfin quelque peu.

« Je compte sur vous je ne plaisante pas… Si vous voulez que j’arrive à rentrer il faut que vous la fermiez. Et par pitié… En attendant faites les choses correctement ! Pas comme aujourd’hui. Vous valez mieux que ça. »


Elle les regarda une nouvelle fois à tour de rôle, elle savait leurs capacités et de quoi ils étaient capables sauf qu’elle ne les avait jamais laissés de la sorte. Elle pouvait comprendre leur sentiment de trahison mais ils restaient tous des mafieux, que cela soit des Leone ou non. Ils ne pouvaient en définitive que compter sur eux et leur bon sens, que cela soit face à un ennemi ou une ancienne connaissance ils se devaient d’être prudents et d’agir de manière réfléchie.

« Bon on devrait y aller maintenant, ça fait déjà longtemps comme tu le disais… Il est temps. Et on ne dira rien. On te fait confiance ne nous déçoit pas. Mais tu auras des comptes à régler en rentrant… Auprès de tous et de nous. »

Elle hocha simplement la tête, elle comprenait et ne comptait pas en faire autrement. La jeune femme n’ignorait pas que son retour allait s’avérer compliqué également et qu’elle aurait à tout expliquer et à s’acheter le pardon de sa famille. Plus inquiétant encore et préoccupant, elle allait devoir faire intégrer Rai… Tout cela ne s’annonçait pas être une mince affaire mais une fois qu’ils en seraient rendus à ces épreuves-là, elle osait penser que le pire serait déjà derrière eux. Elle les regarda se rassembler pour enfin partir par l’arrière. Elle s’approcha un peu plus d’eux et posa une main sur l’épaule de Ash. Ce dernier haussa un sourcil, se demandant déjà quel coup il allait recevoir et sur quel motif.

« Attendez néanmoins. Une dernière chose. En mon absence vous allez devoir suivre des directives…. Ash sera le chef. »

Les réactions furent un peu plus virulentes qu’avant. Ash ouvrit grand les yeux, tandis que June et Gabriel s’exclamaient déjà. Akio de son côté resta terriblement neutre, même quand il fut mentionné par Gabriel.

« Attends tu nommes Ash chef là ?! Mais… Mais pourquoi pas Akio ? Tu le dis toi-même Ash est une tête brulée.
- Oui c’est vrai pourquoi pas A.. EH ! Mais ferme là !
- Ca sera Ash, c’est mon dernier ordre jusqu’à mon retour. »

Elle jeta un dernier coup d’œil à Akio pour confirmer qu’il suivait aussi son idée.

« Akio ne prendra pas la peine de s’opposer aux autres s’il le faut… Trop d’ennuis pour lui et de fatigue n’est-ce pas Akio ? Tandis qu’Ash malheureusement... Me ressemble. Il saura l’ouvrir et taper du poing sur la table. Puis Akio sera en second n’est-ce pas ? Il conseillera Ash… Et pour toi mon cher Ash.. Quelle merveilleuse opportunité. Tu vas devoir apprendre à faire plus de concessions sans trop en faire, écouter ton équipe, écouter les conseils d’Akio et prendre des décisions les plus justes possibles. Puis toi qui te plains toujours des autres hauts gradés tu vas voir comme c’est sympa de bosser avec eux et d’essayer de faire au mieux entre ce que tu veux faire, ce que tu sais, ce qui doit être fait et leurs idées à la con qui ne vont pas dans le même sens du tout parfois. Bonne chance à toi »

Elle lui fit un énorme sourire et lui tapota l’épaule. Ce dernier la regarda choqué, comme si elle venait de lui raconter la pire histoire de sa vie. Son sourire grandit davantage. Il critiquait toujours qu’elle était trop douce au conseil et qu’elle ne revendiquait pas assez l’utilité de la section d’espionnage… Il allait apprendre à la dure que les choses n’étaient pas si simples… Tout était un savant art de diplomatie, de self-control et de responsabilités. Néanmoins elle savait qu’il pouvait remplir son rôle. Il fallait quelqu’un qui ne se laisse pas faire non plus, et peut être quand elle reviendrait, il comprendrait mieux sa position et ce qu’elle devait parfois traverser. Elle lui fit un clin d’œil.

« Bon courage mon chou. Et surveillez moi Wilfried aussi hum ? Je compte sur vous. »

Elle poussa Ash légèrement vers les autres pour leur signifier de partir. Elle regarda simplement Akio une dernière fois pour le voir lui faire un signe de tête, ils s’étaient compris dans ses paroles. Elle pouvait être rassurée désormais… Elle les regarda une dernière fois en leur faisant un vague signe. Au fond, elle avait envie de les étreindre au cas où.. Mais c’était s’avouer potentiellement vaincue voire morte, et elle ne le souhaitait pas. Ils partirent enfin en silence et disparurent subtilement.

Le silence retomba dans la maison, un vide énorme qui lui arracha un pincement. Depuis combien de temps n’était-elle pas venue ? Pire encore depuis combien de temps la maison n’avait-elle pas été aussi animée ? Depuis des décennies… Elle regarda la porte tristement, songeant désormais à la suite. Le calme était retombé mais pour laisser place à l’angoisse. Ses yeux se baissèrent sur le parquet, il était temps de parler… D’aborder les sujets douloureux et épineux, d’essayer de recoller surement les morceaux. Elle se baissa d’ailleurs pour ramasser le chandelier puis l’album photo qu’elle avait jeté sur Ash, elle remit quelques photos qui s’étaient envolées çà et là à l’intérieur et se dirigea vers la table du salon pour les poser. Ce ne fut qu’à ce moment qu’elle leva enfin les yeux sur Rai et qu’elle osa le regarder.

« Inutile de te dire qu’il faut qu’on parle il me semble… Ou inutile d’attendre que tu me le suggères… »

Elle soupira et s’appuya contre la table en croisant les bras. Elle ne voulait pas se montrer fermée à la discussion, elle cherchait plutôt par où commencer. Directement par le plus dur ? Faire plutôt une introduction ? Il n’y avait pas réellement de meilleure solution ou de discours adapté…

« Tu as donc rencontré mes collègues… Mes subalternes… Je suis désolée que tu l’ai appris de la sorte réellement. »

Elle le fixa, le plus sincèrement possible. Elle ne mentait pas, elle était peinée au plus haut point que les choses se soient déroulées de cette manière. Son regard se fit plus sur néanmoins et elle sembla dégager une certaine assurance d’un coup.

« Rai. Je suis la chef de la section d’espionnage des Leone… Ou plus simplement pour nous, de la Vibrissa. »

Aurait-elle du se présenter ainsi dès le début ? Elle ne l’aurait pas pu lors de leurs premières rencontres... Peut-être après l’incident du tableau ? Oui, cela aurait pu se faire, elle aurait même dû alors même qu’ils se découvraient à peine... Elle aurait au moins laissé le choix au brun de la repousser le plus aisément possible. Elle en ferma les yeux un instant à cette idée. Il pouvait très bien la rejeter là maintenant, ça ne serait que mérité.

« Je répondrais à toutes tes questions si tu en as… Je vais juste t’expliquer ce qui me semble important avant que tu ne les poses… Je pense que tu dois imaginer que je t’ai approché dans le cadre de mon travail. C’est faux. J’ai certes bel et bien cherché à me renseigner sur toi après notre première rencontre mais je n’avais pas du tout prévu la deuxième... Ni ce qui allait se passer entre nous. Jamais, à aucun moment l’idée de me rapprocher de toi pour te manipuler ou apprendre des choses sur l’Auditore m’a effleuré l’esprit. J’aurais pu c’est vrai… Mais je savais que tu étais un électron libre et je sais voir quand quelqu’un ne m’apportera rien comme information… Et en dehors de ça. Je n’avais pas prévu de tomber amoureuse de toi… Crois moi ou non désormais mais j’ai fait la part des choses entre mon travail et mes sentiments pour toi… Et j’ai choisis mon cœur, je t’ai choisi toi. »

Elle lui sourit du mieux qu’elle put, quelque peu tristement malgré tout. Elle avait peur, elle venait de potentiellement tout faire voler en éclats, l’avoir déçu, blessé, avoir perdu sa confiance… Ces idées lui étaient insupportables. Son cœur se serrait à y penser, et il allait bientôt arrêter de pouvoir battre face à la suite. Elle devait tout lui avouer désormais, elle ne pouvait plus cacher la plus dure partie. Ce n’était pas qu’elle voulait se racheter ou se lancer des fleurs, non. Mizeria devait simplement lui livrer la vérité, la sienne et son sinistre raisonnement.

« Tu te demandes surement pourquoi je ne t’en ai pas parlé avant… A vrai dire je l’ignore moi-même. Peut-être au début par méfiance ? Puis quand nous étions seuls dans cet appartement à Venise je pense que j’ai eu peur de tout gâcher, et ce n’était pas ce que je voulais te livrer avant tout… Puis... Après l’affaire de Méphisto j’ai... C’est quand je t’ai retrouvé que mon instinct est revenu au galop, que je t’ai proposé ce plan, que je puisse te rejoindre au sein des Auditore pour t’aider… Parce que c’est ce à quoi je suis la plus douée, espionner de l’intérieur... A ce moment-là j’étais motivée pour t’aider, pour anéantir les Auditore et te sauver de là, t’offrir après une nouvelle vie. Les jours sont ensuite passés, il me semblait délicat de t’en parler au QG mais tu ne peux pas savoir comme ça me rongeait… Vraiment. Après ton verdict quand je me suis évanouie c’était en grosse partie lié à ça. Je réfléchissais à comment te le dire à… à te faire comprendre que j’avais un lourd secret que tu ignorais encore. Mais au fil des jours la peur a grandi, m’empêchant de dire quoi que ce soit... Puis je me suis mise à y réfléchir plus encore pour en arriver à un seul constat. »

Elle serra ses bras, gardant sa position fermée. Elle n’avait que trop pensé à tous les détails, elle avait étudié toutes les possibilités, les scénarios, les mots à lui dire, les explications… Tout. Et la seule solution qui lui semblait la plus sure était au final bien horrible et cruelle. Mais elle avait pris sa décision doucement au fil des jours, même si elle restait dans l’hésitation de tout lui avouer. Elle s’était convaincue que de ne rien en faire était la meilleure option.

« La mission est périlleuse, je risque de me faire prendre à n’importe quel moment mais si cela venait à arriver... Si tu n’étais pas au courant de qui je suis… Cela m’offrait encore une fois la possibilité de te préserver, en feignant de t’avoir utilisé. Je me suis mise à penser que si j’étais découverte ils te tueraient immédiatement… Sauf si tu n’étais « qu’un pion » pour moi. Et si tu l’apprenais en même temps qu’eux, quoi de mieux pour feindre la surprise qu’être réellement surpris ? »

Elle sourit amèrement à nouveau et ferma les yeux. Oui, elle avait déjà pensé à tous les cas de figure. S’ils découvraient son identité, ils l’enfermeraient et la torturaient jusqu’à que mort s’en suive ou qu’elle se donne la mort elle-même, dans le but d’obtenir toutes les informations qu’elle connaissait. Elle savait ce qui l’attendait et en paierait les conséquences, par contre elle ne pouvait assumer le sort de Rai. S’il leur semblait suspect dans cette affaire il en était fini de lui et bien plus rapidement que pour son cas… Alors que s’il n’était que victime d’une supercherie, il serait peut-être la risée de ses collègues et la honte de sa famille, mais ils ne l’élimineraient pas sur le champ pour trahison, ils le garderaient pour l’utiliser. Il aurait la vie sauve. Car oui Ash n’avait pas besoin de le lui rappeler, seule la mort l’attendait si son identité était révélée. Mais cela ne devait pas forcément rimer avec leur mort conjointe. Et alors... Rai aurait moins de mal à tourner la page en songeant qu’il avait été trahi et utilisé. Elle lui ferait pour sûr la pire des blessures, la Leone en avait pleinement conscience mais il pourrait continuer de vivre et de mener son but à bien. Il serait détruit, surement encore plus motivé par cette trahison aussi, mais en vie. Lui cacher la vérité était lui assurer une porte de sortie. Elle s’assurait sa haine et de perdre son amour, mais il vivrait. Peut-être même aurait-elle le luxe d’être tuée de ses mains. Il pourrait alors se venger et racheter sa place chez les Auditore tandis qu’il lui offrirait une certaine paix. L’aurait-elle volé ? Non. A cette idée elle enfonça ses ongles plus profondément dans la chaire de ses bras. Son raisonnement était bien sinistre mais tenait la route, si elle tombait, autant lui faire le plus de mal possible pour assurer sa survie… Mais ce plan venait de tomber quelque peu à l’eau. En son for intérieur elle espérait qu’il comprenait, qu’il saurait surtout pardonner cette erreur et continuer à avancer avec elle. Elle ne voulait rien d’autre... Mais elle attendait cependant une dernière chose qu’elle lui demanda dans le plus grand des courages, la voix légèrement cassée.

« Rai. S’ils apprennent qui je suis… Promets-moi de feindre que tu n’étais pas au courant, de l’apprendre en même temps qu’eux, de leur faire croire de découvrir que je te manipulais au final… Laisse-moi seule assumer mon sort, promets-le-moi. »




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Rai Nagafuse
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MessageSujet: Re: What do I do because of you ?    What do I do because of you ?  EmptyMer 3 Juin - 13:06



Dans les yeux de la vérité.
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La discussion qui s'ensuivit entre Mizeria et ses anciens compagnons ne le vit pas s'exprimer davantage. Il ne fut pas même tenté de le faire et, alors qu'on pouvait lui destiner une brève œillade, il était même permis de douter qu'il écoute seulement les propos qui étaient échangés devant lui. Certes, il ne montrait rien des tourments qu'il habitait en son sein, de ce marasme sentimental qui le broyait, qui écrasait son cœur et générait en lui un sentiment terrible d'une impuissance crasse : la détresse qui le piétinait ne se manifestait aucunement physiquement, et les subordonnés de Mizeria pourraient tout simplement considérer qu'il se remettait à elle, qu'il avait compris humblement que la suite de cette discussion n'était de toute manière plus de son ressort, qu'il n'avait aucun moyen d'y prendre part pertinemment, sans être un boulet d'aucune sorte pour l'un ou l'autre des intervenants. Mizeria, elle, pouvait justement imaginer qu'une telle idée était loin, bien loin de pouvoir se vérifier. Elle savait que le noiraud venait d'apprendre, contraint et forcé, son allégeance véritable et les responsabilités qui allaient de paire. Elle savait qu'il comprenait, ou croyait comprendre qu'on avait pu le duper... Et c'était en fin de compte bien plus que ce qu'il n'était en mesure d'encaisser, a fortiori après toutes les épreuves qu'ils avaient traversé, après tous les sacrifices qu'il s'était résolu à accomplir. Il venait d'entendre la Balogh délivrer à ces ennemis une version édulcorée de ses intentions, qu'il avait jusqu'à présent su tenir secrètes : ils savaient désormais qu'il prévoyait de détruire les Auditore et qu'il avait toujours œuvré à cette fin, même s'il n'imaginait probablement pas que son esprit malade et ivre de vengeance visait à l'annihilation de la caste des mafieux dans son absolue globalité. Après qu'il eut mis Mizeria dans la confidence, cette dernière venait donc de vendre la mèche : puis on l'avait planté face à ce constat glaçant, terrible, qu'elle était la responsable de la branche d'espionnage des Leone, l'une des plus redoutables familles mafieuses de l'Italie actuelles.

Il ne savait qu'en penser. Il ne pouvait pas omettre qu'elle l'avait construit, ou plutôt reconstruit, après toute une décennie au cours de laquelle il s'était oublié, au cours de laquelle il avait sciemment gommé tout ce qui faisait de lui un individu à part entière, de ses désirs les plus inavouables à ses envies les plus triviales, les plus insignifiantes et les plus inoffensives. Il ne pouvait pas omettre qu'elle l'avait guidé, accompagné, alors que les péripéties de ces dernières semaines s'étaient montrés toujours plus abruptes et périlleuses, à mesure que leurs ennemis s'étaient démultipliés et qu'ils avaient, à chaque instant, manqué de faucher leurs vies, de les briser, de les souiller. Il ne pouvait pas omettre qu'elle avait pris de nombreux risques en demeurant à ses côtés, loyale et aimante, tendre et empathique, plus que nul n'avait jamais pu l'être à son égard... mais il ne pouvait désormais plus omettre non plus une idée simple, insidieuse et sournoise : ces risques qu'elle avait encourue étaient peut-être tout-à-fait calculés, et ce depuis les fondements de leur relation. Cette crainte qu'il aurait aimé taire s'amplifia, et engendra en lui un autre sentiment, encore plus destructeur : il se sentit soudainement vulnérable, fragile et menacé, comprenant qu'elle savait tout de lui et que, sachant tout de lui, œuvrant potentiellement pour le compte d'ennemis, elle jouissait désormais d'armes pour le neutraliser dès lors qu'il se montrerait trop gênant, trop encombrant, ou simplement trop instable pour qu'elle puisse continuer à le manipuler tel qu'elle avait pu le faire au cours de ces derniers jours.

Rai ne pouvait pas se résoudre à croire que cela soit le cas. Cela lui semblait tout bonnement impossible, saugrenu, pour la simple et bonne raison que sa fierté le poussait à croire qu'en tant que maître manipulateur, il était à même de distinguer une posture de faussaire et celle d'une amante véritable. Mizeria ne donnait pas l'impression de feindre les sentiments qui la parcouraient, loin de là... De surcroît, l'idée de se retrouver précisément à la place de ceux qu'il avait manipulé au fil des dernières années écoulées l'horripilait, l'horrifiait. Il n'était pas une victime. Il n'en était plus une, plus depuis qu'il avait quitté l'orphelinat, voire même plus depuis qu'il avait enterré son père et s'était abandonné aux rues inhospitalière de l'agglomération propre et ordonnée de Tokyo. Il ne pouvait pas concevoir qu'elle ait été à même de le renvoyer ainsi en arrière, à une condition infamante qu'il pensait avoir laissée derrière lui irrémédiablement... car cela reviendrait à concéder que tous ses efforts avaient été vains. Que tout ce qu'il avait jamais pu entreprendre, dans le fond, n'avait été rien de plus qu'une tentative insensée et funeste de nager à contre-courant. En somme, que tous les morts qu'il avait causé avaient perdu la vie sans raison valable, puisque leur sacrifice ne mènerait à aucune espèce de forme de rétribution, puisque leur meurtrier n'était pas en mesure de poursuivre sa quête initiale et d'obtenir des résultats probants la concernant...

Ses pensées étaient confuses. Trop pour qu'il puisse seulement comprendre ce qui lui arrivait réellement, actuellement. Trop pour qu'il puisse, de facto, prendre une décision ou une résolution cohérente, s'accordant à cette situation extraordinaire et imprévisible sous plus d'un aspect. Il se sentait faible, fragile, démuni et accessible, parce qu'elle savait tout de lui et qu'il prenait la mesure, pour la première fois depuis qu'ils s'étaient unis, qu'il ne tenait pas les rênes de leur relation comme il aurait pu l'imaginer. Il se sentait dupé, malmené et manipulé, parce qu'elle avait pu ou aurait pu, si elle en avait décidé ainsi, réduire à néant tous les efforts qui avaient été les siens en ébruitant sa duplicité, en racontant aux Auditore qu'ils étaient menacés de l'intérieur. Il se sentait énervé et outré qu'elle ait choisit sciemment de garder le silence, de ne rien révéler de ses obligations lors même qu'il avait pris la décision coûteuse, de son côté, de tout révéler de son passé morbide.
Puis vint l'étincelle.
Une étincelle d'ego, un sursaut d'orgueil, de détermination, de folie sans doute.
Il pouvait tirer profit de cette situation, aussi invraisemblable cela puisse-t-il paraître... puisque maintenant qu'il savait à qui il avait affaire, maintenant qu'elle pouvait légitimement croire qu'elle le maintenait sous son emprise et pouvait user de lui comme d'un outil aiguisé et docile, il était tout-à-fait en mesure de retourner la situation et de profiter d'elle pour atteindre les Leone de l'intérieur.

Il n'avait fait que le sous-entendre, aussi sans doute ne l'avait-elle pas réellement compris : il prévoyait de les détruire, eux comme tous les autres. Qu'ils fussent prétendument animés de bonnes intentions à l'égard du tout-venant n'était pour lui qu'une mascarade grossière, destinée à endormir leurs remords. Ils étaient aussi responsables que les Van Sidéris de la misère humaine que la criminalité induisait, parce qu'ils dérogeaient au règle, même si cela n'était certainement pas fait aussi directement et odieusement que d'autres familles aux réputations d'autant plus calamiteuses. En montrant aux citoyens qu'une autre voie était possible, qu'une autre existence pouvait être embrassée, y compris dans l'impunité la plus absolue, la plus insolente, ils pouvaient engendrer chez autrui des pensées infâmes, immondes. En somme, ils encourageaient l'égoïsme et la brutalité rien que de part leur existence... Existence qu'il était plus que jamais prêt à supprimer.
Il pouvait la duper. Elle était maligne, certes, et il le reconnaissait humblement : sans cela, sans doute n'aurait-il jamais pu tomber sous son charme. Il aurait bien du mal à faire en sorte qu'elle tourne les talons face à son obédience passée, qu'elle décide seulement d'embrasser une autre voie, de renier ses anciennes responsabilités, à en croire le mal qu'elle se donnait pour donner à la Vibrissa un avenir potentiellement salutaire, ne fut-ce qu'en donnant à ses anciens subordonnés la hiérarchie qui régirait désormais leurs rapports sociaux, au moins au fil des temps à venir. Mais il pouvait toujours agir sans qu'elle ne le sache... Il avait fait cela toute sa vie, en fin de compte. Tromper les autres. Les mener là où il l'entendait.
Elle pouvait être son arme, la clé de voûte de ses stratagèmes conduisant à la mort du Ciel Leone, à la ruine de sa famille dans son ensemble.

Son regard se fit imperceptiblement plus incisif, tandis que les subordonnés de son amante quittaient enfin la bâtisse, les y abandonnant comme deux lions en cage, redoutant l'un comme l'autre ce qui se dirait au fil des minutes qui suivraient. Le Nagafuse, de son côté, n'était pas certain d'avoir pris sa décision : mais il savait, au fond de lui, que cet événement laisserait tout de même des stigmates indélébiles et qu'il serait stupide d'imaginer qu'il pourrait les ignorer indéfiniment.

Et elle parla. Sans doute Mizeria comprenait-elle qu'il n'attendait que cela : le regard posé sur elle, patient et tranquille, le teint aussi blafard qu'à l'accoutumée, il s'était replacé sur les marches sur lesquelles la demoiselle avait pris place quelques instants auparavant seulement, afin de récupérer de sa faiblesse inopinée. Elle lui expliqua ce qu'il lui fallait savoir, et plus encore : elle dévoila effectivement qu'elle avait été prise de court par les épineux problèmes qu'ils avaient rencontré, n'oubliant pas de mentionner au passage qu'elle n'avait pas, un seul instant durant, réussi à oublier cette omission et à vivre paisiblement avec elle. Finalement, elle alla même plus loin, et ce fut à compté de cet instant que le noiraud fut réellement déstabilisé : lorsqu'elle lui admit qu'elle songeait depuis lors à utiliser ses responsabilités pour donner l'impression de le trahir en cas de problème majeur, dans le cas de figure où leurs vies elles-mêmes seraient frontalement menacées, il écarquilla ses paupières muettement. Il demeura là, à l'écouter et à la regarder, tandis qu'elle dévoilait simplement qu'elle était prête à se sacrifier pour qu'il puisse lui survivre, qu'elle s'apprêtait à vivre ses derniers instants en étant convaincu qu'il se mettait à la détester pour la simple et bonne raison qu'elle ne voulait que le protéger, quitte à se parjurer à ses yeux. S'il eut besoin d'un instant pour encaisser cette révélation, le noiraud revint bien promptement sur ses gardes, en imaginant qu'il pouvait tout simplement s'agir là d'un mensonge destiné à l'endormir à nouveau, à récupérer ses faveurs, à lui faire croire que tout ceci avait été prévu, d'une certaine manière, et qu'elle ne subissait pas la révélation importune de ses subordonnée aussi durement qu'elle n'aurait pu le craindre. Il imagina, quelque part, qu'elle continuait à lui mentir et à le manipuler afin de le renvoyer à son caractère initial, celui d'homme-objet, qu'elle pourrait continuer à utiliser impunément malgré la bourde de ses sous-fifres trop bavards et trop inconséquents... puis il gomma de son esprit cette idée tordue, excentrique, à laquelle il avait temporairement cédé du terrain.

C'était improbable. Tout ceci était trop invraisemblable pour être vrai. Si elle avait réellement été la manipulatrice qu'il craignait qu'elle soit, elle n'aurait pas pris la peine de se donner en spectacle, encore maintenant. C'était trop risqué. Fut-il en proie à une furie inextinguible et imprévisible qu'il se serait jeté à sa rencontre afin de la poignarder, de venger cet affront qu'il pensait commis à ses dépens. Une manipulatrice née et avisée n'était pas du genre à courir des risques aussi drastiques pour le compte d'un mafieux de seconde zone, ayant récemment perdu tout l'attrait et toute l'influence qui pouvaient être les siens, autrefois, alors qu'il était encore gardien. Elle n'aurait pas pris la peine de congédier les siens, dans la mesure où ils auraient pu représenter une marge de sécurité; elle aurait probablement fait en sorte que le Nagafuse trouve la mort, même, pour qu'elle puisse sereinement retrouver ses fonctions au sein des Leone tout en rapportant au Ciel les informations confidentielles qu'elle avait pu glaner, notamment au cours de la détention qu'elle avait subie.

Elle disait vrai. Tout comme le noiraud, elle s'était engagée, bien que dans des dimensions plus modérées et moins impardonnables, sur une pente glissante et relativement inextricable. Elle avait manqué le coche, n'avait pas su lui dévoiler ces informations compromettantes au cours d'une situation qui aurait pu s'avérer propice... et elle devait désormais s'expliquer, pour qu'il comprenne qu'elle n'avait jamais souhaité le duper, ou le blesser de quelque manière que ce fut. Le mafieux était suffisamment lucide pour le comprendre... et il s'en sut gré, tant cela instilla en lui un sentiment de réconfort, de soulagement. Cela étant, il n'oubliait que très partiellement sa terrible impression de fragilité : parce que même s'il croyait en elle, il savait désormais que quatre Leone se baladaient librement dans la nature et qu'ils savaient la duplicité de l'Auditore, qui fomentait la destruction de sa propre famille depuis le jour où il s'y était invité.

Toutefois, Rai n'était à cet instant pas encore totalement au bout de ses peines. Il restait à Mizeria une dernière poignée de mots à prononcer, une ultime demande à tisser : hardie, voire effrontée, la demoiselle souhaita lui faire promettre qu'il pourrait, le jour où la situation l'exigerait, la laisser derrière lui sans l'ombre d'un regret et la jeter en pâture pour assurer sa propre survie. D'abord déconfit, le jeune homme se renfrogna finalement. Il demeura silencieux, taciturne, tout en restant immobile alors que les secondes, impitoyables, s’égrainaient en laissant une tension magistrale s'enraciner et prendre possession des lieux. Finalement, il se redressa et se rapprocha de la jeune femme à pas feutrés. Il se planta face à elle, approcha son visage de celui de son amante et, tout en la fixant droit dans les yeux, lui opposa une réponse si ferme qu'elle n'invoquait évidemment aucune espèce de contradiction possible.

-Alors fais en sorte que cette information ne fuite jamais. Parce que si tu meurs, je te suis, Mizeria.

Il se détacha, fit quelque pas en lui tournant le dos, s'aventurant dans cette pièce dévastée par la confrontation brève mais intense qui s'y était déroulée quelques minutes auparavant seulement. Il redressa la chaise qu'il avait utilisé en guise de projectile improvisée puis, sans se donner la peine de regarder à nouveau la demoiselle, s'exprima plus concrètement au sujet de cette demande insensée et inacceptable qu'elle lui avait soufflé.

-On est dans la même galère, maintenant. Il n'est pas question que tu prennes des risques pour mon compte si je ne suis pas fichu de te rendre la pareille. Quant au reste...

Il pivota enfin, plantant à nouveau son regard dans celui de son interlocutrice et chère amante. Il la dévora d'un regard plus froid, plus animal qu'à l'accoutumée : parce qu'il ne s'adressait finalement pas tant à elle qu'à la fatalité dans son ensemble. C'était comme une promesse qu'il jetait à la figure du destin...

-Rien de ce que je ne pourrai apprendre à ton sujet ne pourra me faire fuir. Je resterai, Mizeria, même si tu devais décider de te passer de moi. Et je continuerai à me battre pour détruire la mafia.

Viendrait finalement l'instant plus fatidique, au cours de cette promesse déjà ébauchée, mais incomprise. D'un doigt froid et impitoyable, il indiquerait la porte que les subordonnés de la Balogh avait refermés quelques instants auparavant, comme s'il cherchait à les désigner eux, directement. Sa voix se ferait mécanique, insensible, voire inhumaine et monstrueuse sous un certain angle : et les propos qu'elle porterait, quant à eux, viendraient clarifier sa posture pour faire en sorte qu'aucune zone d'ombre ne puisse encore subsister entre eux.

-Leone y compris.

Elle avait omis. Et il avait été à deux doigts de lui en vouloir mortellement pour cette omission... il n'était pas question qu'il réitère la même erreur irresponsable et égoïste. Elle avait pris la décision de tout apprendre à son sujet... il décidait par voie naturelle de conséquence d'exposer tout ce qu'il avait à lui exposer. Et tant pis si cela devait instiller entre eux les origines d'un mal-être potentiellement croissant, qui déboucherait peut-être même sur les prémices de leur éventuelle rupture : il était l'homme qu'il était, et si cette honnêteté qu'il avait décidé de manifester à son encontre devait lui être fatale, il acceptait d'être damné pour tous les crimes qu'il avait pu commettre.

-Aucune famille n'en réchappera. Je les détruirai toutes, ou je mourrai moi-même en essayant. Je commencerai par les Van Sidéris, qui m'ont tout pris. Je continuerai avec les Auditore, qui suivent leurs traces et causent au moins autant de malheurs. Et je finirai par tous ceux qui, pour le compte d'une liberté parjurée ou mensongère, désobéissent et utilisent leur force à des fins égocentriques.

Finalement, il écarta ses bras, comme pour dévoiler son torse à la vue de la Balogh, comme pour la convier à l'y frapper avec violence si elle entendait mettre un terme à cette folie vengeresse. Il ne manqua pas, enfin, de compléter ces gestes avec des mots clairs et limpides, aussi sûrement que le début de sa petite tirade :

-Alors, si tu préfères veiller à la survie de ta famille plutôt qu'à la mienne, tue-moi ici et maintenant. Tu as dit que tu m'avais choisi... Maintenant que la situation est claire, tu vas devoir réitérer ce choix. Ce sont eux, ou moi. Il n'y a pas de compromis.

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MessageSujet: Re: What do I do because of you ?    What do I do because of you ?  EmptyVen 26 Juin - 2:01

What do I do with you?
I look at you and I think of you even more

Mizeria était restée silencieuse et interdite après avoir formulé sa requête. Son souffle sembla presque coupé, imperceptible, tout comme la réaction du brun qu’elle redoutait. Espérer qu’il dise oui et que tout ce débat s’arrête là était utopique. Au fond d’elle, elle savait pertinemment qu’ils ne commençaient qu’à en parler et que de lourdes paroles pouvaient potentiellement suivre. Ils allaient devoir s’accorder sur la marche à suivre, se dire absolument tout pour éviter d’autres déconvenues comme celle qu’ils venaient de rencontrer. Elle en venait même à tout se repasser en tête, avait-elle encore oublié quelque chose ? Avait-elle autre chose à lui avouer ? Même si elle risquait surement de creuser ainsi sa propre tombe et peut être les mener à leur fin, elle ne devait plus rien omettre, ni maintenant ni dans cette demeure. Ils passeraient la porte de la maison et ils n’auraient plus l’occasion d’aborder autant de sujets… Ils partiraient conjointement d’accord ou pas. Jamais elle n’aurait songé que la maison qui avait vu ses rires d’enfants et qui contenait autant de précieux souvenirs, si bien qu’elle la fuyait comme la peste, serait, finalement après les drames qu’elle avait habité en son sein, un terrain neutre et un endroit sûr. Mais est ce que ces mêmes murs n’allaient pas voir d’autres horreurs ? D’autres cris ? Et surtout abriter un autre déchirement pour la mafieuse ?

Son cœur rata un battement quand Rai se leva enfin mais son regard demeura fixé sur sa silhouette et elle ne cilla pas, même pas quand il se rapprocha dangereusement d’elle et qu’il prit enfin la peine de lui répondre. Mizeria encaissa silencieusement ses mots, même si au fond elle était presque incrédule. Faire en sorte que ça ne se sache pas ? Elle n’avait fait que ça mais elle n’était pas à l’abri... Trop de gens pouvaient lui nuire, leur nuire. Toutes leurs péripéties en étaient la preuve... Combien de personnes s’étaient dressées sur leurs routes respectives ou même conjointes ? La liste en était trop longue entre Ox, leur ravisseur du tableau, ce délirant collègue du savant fou et vieux démon de la blonde et enfin Méphisto qui terminait le palmarès haut la main pour l’instant. Rien que ce dernier avait tout à gagner à découvrir cette information et à la livrer aux deux Ciels Auditore. La chef de la Vibrissa n’était pas naïve, elle avait pris un énorme risque avec ce plan et elle savait dès le départ qu’elle ne maitrisait pas les potentiels rancœurs et coups bas. L’ancien gardien de la brume allait pour sûr chercher à se venger, à les annihiler, et encore il ne s’arrêterait pas là. Elle le sentait, il n’aurait de cesse de les faire souffrir, de les mener à leur perte… C’était son genre et déjà sa manière d’opérer la dernière fois. Il fallait être fou pour imaginer qu’il ne tenterait pas pire. Il ne devait plus que vivre avec l’envie de se venger et de leur faire payer. C’était précisément là un premier danger à cette entreprise : trouver le réel rôle de la Balogh et balancer l’information aux Auditore dans le but de se racheter, que cela fonctionne ou pas, serait de toute évidence un cadeau du ciel pour ce fou furieux. Il était même peut être déjà au courant et entrain d’œuvrer. Elle ne pouvait pour l’heure qu’avancer à tâtons et rester prudente, elle ne pouvait pas faire plus que ce qu’elle avait déjà fait actuellement. Alors les mots du brun firent naitre une pointe de colère en elle. Malgré tout elle n’en montra rien, comme si sa volonté de mourir avec elle la rassurait quelque peu même si elle ne le souhaitait pas pour le moins du monde. Aucune réponse ne sortit néanmoins de sa bouche et elle continua de le suivre du regard. L’ancienne Leone l’écouta religieusement. Elle avait suffisamment pris la parole, il était temps de laisser son amant s’exprimer pleinement, qu’il ait envie de l’insulter ou non, c’était le moins qu’elle puisse faire. Elle se détendit légèrement quand il la rassura qu’il ne comptait pas fuir, qu’il ne changerait pas d’avis. Elle en baissa même sa garde, erreur qu’elle regretta par rapport à la suite.

Quand il pointa la porte et prononça le nom des Leone, elle resta une première fois abasourdie. Cette fois ci incapable de cacher sa surprise. Son expression demeura inchangée au fil de son discours. Elle ne le dévisagea pourtant pas, au fond elle était déjà au courant de cette cruelle vérité. Il fallait s’en douter, c’était une suite logique ou plutôt un raisonnement qui ne pouvait s’arrêter aux Van Sidéris et aux Auditore. Oui, au fond elle l’avait surement toujours su depuis qu’elle était au courant de ses ambitions mais avait-elle fait l’autruche jusqu’à maintenant ? Avait-elle bêtement espéré qu’il place des espoirs en elle et daigne changer d’avis ? Qu’il se fasse moins radical ? Ses yeux le fixaient toujours tandis qu’il ouvrait les bras. Elle mit un certain temps avant de tout encaisser et de se repasser les mots qu’il venait de lui adresser. Ses oreilles ne lui faisaient pas défaut, ni ses yeux. Il était bien là devant elle, tendu mais sûr, vindicatif et froid… Les secondes passèrent, peut-être trop longuement au gout du brun. Elle resta un moment comme interdite. Ce fut finalement ses lèvres qui bougèrent en premier. Non pour lui répondre, mais pour s’étirer dans un semblant de sourire étrange. Aucun mot ne franchit ses lèvres, juste un rire après quelques instants. La blonde se mit à rire tout aussi étrangement qu’elle avait souri. Ses yeux quittèrent enfin le regard de cet homme qu’elle aimait tant et pour qui elle avait tant risqué. Ils trouvèrent refuge dans le plafond tandis qu’elle était maintenant presque dos à lui, toujours appuyée sur la table avec les bras croisés. Elle s’arrêta enfin de rire et ferma ses yeux quelques instants encore. Devenait-elle folle ? Elle n’avait pourtant pas ri aux éclats, il n’avait surement jamais dû la voir ainsi. Le même sourire étrange qu’au début demeura sur ses lèvres. De manière presque féline elle baissa enfin la tête en rouvrant les yeux, un dernier éclat de rire, cette fois ci presque nerveux, se fit entendre avant qu’elle ne décide d’enfin s’écarter de la table. La jeune femme décroisa les bras et se fit aussi droite que l’Auditore avant de lui faire face.

- Vraiment Rai ?

Mizeria conserva son sourire mais son attitude était cette fois-ci claire. Il était sur une pente glissante, ou plutôt il était en train de s’y enfoncer alors qu’elle-même s’embourbait dans un marasme sans fin et dans une colère froide.

- Liberté parjurée ? Utiliser leurs forces à des fins égocentriques ? Que connais tu de nous réellement.

Elle insista bien sur le « nous » pour lui montrer son appartenance et affirmer sa prise de position évidente. Son regard se fit plus dur et elle se mit à faire quelques pas sur le côté sans le quitter du regard. Comme un prédateur jaugeant sa proie.

- La liberté parjurée dont tu parles, c’est la liberté qu’on m’a accordé après qu’on ait assassiné mes parents et qu’on m’ait pris pour une putain. Si c’est ça la liberté parjurée alors je la prends sans hésiter.

Elle savait son passé tout comme il connaissait aussi le sien. Ils avaient souffert tous les deux par le biais de la mafia. Le dénouement par cette dernière avait malheureusement été assez favorable pour l’une et toujours aussi dévorant pour l’autre. Mais c’était là toute la beauté et la cruauté du monde tout court, tout n’était pas forcément blanc ou noir. Une dualité effroyable et implacable à laquelle ils ne pouvaient échapper. Il avait raison le monde de la mafia n’était pas merveilleux et bon, mais il pouvait aussi parfois ne pas tomber dans la brutalité et dans l’abomination. Eux-mêmes étaient ainsi faits au final, partagés entre lumière et ténèbres, de par leur parcours, leurs expériences et leurs actes. L’avait-elle jugé une seule fois sur tout ce qu’il avait pu faire ? Lui de même l’avait-il jugée ?

- Tu veux être impartial ? On ne peut même pas nous même ! Tous nous sommes ainsi faits. Avec autant de bonnes choses que de mauvaises. Mais c’est valable dans la mafia ainsi que dans la rue. Ce n’est pas parjuré que dans notre environnement, surprise c’est ça la vie tout court. Tout est mensonger si tu raisonnes ainsi. Toi et moi y compris. Il en va de même pour ce que tu appelles des « fins égocentriques », n’importe qui dans la rue peut faire quelque chose en pensant faire le bien mais cela semblera égocentrique à quelqu’un d’autre ou il pensera que cette personne fait ça pour son propre bien. Le monde extérieur peut se montrer pire que la mafia.

Ses pas s’arrêtèrent enfin et son regard se fit plus acéré. Elle n’était pas là pour le descendre ou le juger, elle ne voulait pas de ça et elle était très mal placée pour lui faire la morale. Néanmoins, à ses yeux, il semblait bon de remettre un peu d’ordre et de bon sens.

- Tu veux tout détruire ? Alors très bien mets tout à feu et à sang. Que veux-tu que je te dise sérieusement ? Si tu réfléchis posément tu trouves ça logique ? Éradique la terre entière à ce moment là. Tout le monde.

Elle se planta enfin face à lui mais en gardant une certaine distance. Le sourire qui était resté sur ses lèvres disparu enfin et elle se montra aussi froide et détaché que lui. L’ambiance s’en trouva alourdie, le sentiment du prédateur prêt à bondir encore plus palpable et visible. Elle semblait dans une colère froide et en même temps dans un détachement inédit. Ce n’était même pas son discours sur les Leone et le monde de la mafia qui l’avait si profondément énervée. Non, d’autres mots avaient été bien plus graves. Ils avaient été se loger dans sa poitrine comme des lames, la mutilant puissamment, la blessant plus fortement qu’il ne l’avait surement voulu. Et ces fameux mots avaient été les derniers.

- « Eux ou moi. Il n’y a pas de compromis ».

Mizeria articula bien ses mots pour les appuyer, bien lentement et distinctement. Puis le temps fila à nouveau, comme trop long et trop pesant. La tension ne cessait de monter dans la pièce. Elle avait démarré son ascension avec le brun mais pour l’instant la blonde ne faisait que la faire grimper crescendo. La mafieuse n’avait plus rien de la femme aimante qu’elle avait été à ses côtés des jours durant. Si on devait la comparer, elle se serait surement plus rapprochée de la personne qu’elle était à leur toute première rencontre : ferme, sûre, provocante et prête à en découdre. Il n’était plus question de lui montrer tout son amour, elle l’avait déjà assez fait et justement il lui semblait qu’il venait de piétiner ces preuves. Une fois encore elle lui répéta les mêmes mots, ses mots. C’était comme si elle en faisait un mantra, mais auquel elle ne pouvait croire. S’était-il rendu compte de sa demande ? De ce qu’il avait osé dire ? Avait-il sciemment dit ces mots ? De tout ce qu’il avait pu dire, c’était de cette partie dont elle restait la plus sidérée.

- Dis moi. Qui ai-je choisis de sauver d’Ox au prix d’épreuves tordues et de blessures ? Qui ai-je voulu faire passer avant tout dans ce putain de tableau, prête à y rester piégée seule si un seul pouvait en sortir ? Qui ai-je suivis, dans une bataille qui visiblement était perdue d’avance, face à un gardien de la brume complètement timbré ? Pour qui ai-je accepté au fond de rejoindre une des pires familles avec tous les risques que tu connais désormais ?

Ses yeux se plantèrent dans les siens avec un air de défi. Elle ne voulait pas le faire culpabiliser, loin de là, mais simplement lui rappeler les faits. Elle ne l’avait jamais fait passer avant tout pour avoir tous les honneurs ou les remerciements de la terre ou encore moins dans l’optique qu’il lui renvoit l’ascenseur. Elle n’avait pas agi dans le but d’avoir son amour inconditionnel et sa reconnaissance éternelle. Elle l’avait fait par folie peut être, par amour pour sûr. Mais elle l’avait fait surtout. Tout comme lui. La jeune femme n’oubliait pas qu’il l’avait sauvée en premier, qu’il avait achevé Ox et pris soin d’elle, qu’il avait tué de sang froid pour elle, qu’il avait risqué tout ce qu’il avait entreprit toute sa vie face à Méphisto pour préserver leur histoire. Simplement, elle avait fait son lot également. Elle avait pris ses mots comme une demande de gage de loyauté qu’elle ne jugeait plus devoir donner après toutes les cicatrices et les risques qu’elle avait enduré pour lui.

- Tu me parles de compromis. Même chose. C’est impossible ? Pourtant j’en ai bien fait. Pas assez ? Ils ne valaient pas le coup ? Tu crois que c’était facile d’aller faire un tour chez les Auditore ? D’accepter de les rejoindre ? Je vais répondre pour toi. Ce n’est pas facile. Mais non je ne changerais pourtant rien à tout ça parce que c’est ce que je souhaitais, parce que ce que je souhaite c’est toi, je te veux toi. Et c’est justement pour ça que les compromis je peux en faire et je n’ai pas eu le choix d’en faire. Je ne te demande pas d’en faire de même pour l’instant, tout comme je ne te rappelle pas tout ce que j’ai fait dans l’espoir que tu en fasses de même. Tu as suffisamment fait aussi, trop fait. Je n’attends rien de toi à part une chose… Que tu me fasses confiance et que tu arrêtes d’être si tranché. J’aimerais que tu prennes un problème à la fois, les Van Sidéris et les Auditore et juger de la suite une fois que cela sera réglé. Les Leone c’est ma famille, c’est moi. Sinon…

Ses muscles se raidirent un peu plus et son menton se releva quelque peu. Tout de son attitude démontrait qu’elle était vraiment prête à passer à l’action même si elle restait désormais d’un froid et d’un calme olympien. La blonde enflamma sa bague après avoir pris sa boite arme. Ses poings américains allongés apparurent dans sa main et elle en jeta un négligemment sur la table sans quitter pour autant le brun des yeux. Le bruit de la lame rebondissant sur le bois sonna presque comme le début d’un combat.

- Il n’y a pas de compromis Rai ? Une Leone et un Auditore qui tombent amoureux c’est déjà un compromis de base. On est qu’une foule de compromis toi et moi. Dans tout ce qu’on représenter et être. Dans nos meurtres, nos actes tout courts. Mais aussi dans notre façon de vouloir faire le bien quand même et de nous aimer … « Pas de compromis » ? Soit.

Sa main droite ne cessait de jouer avec le dernier poing américain, jonglant presque avec, s’amusant à le faire tourner. Tout dans son attitude pouvait laisser penser qu’elle allait l’attaquer d’une minute à l’autre. Son visage, son expression, ses yeux, tout, étaient devenus impassibles. Allait-il l’attaquer de lui-même par précaution ? Ça n’aurait pas été idiot. Néanmoins elle n’avait pas envie de lui laisser ce luxe. Elle se rapprocha de lui sans esquisser d’attaque mais toujours en jouant avec son arme. Elle ne s’arrêta qu’une fois que ses pieds furent à quelques centimètres de ceux du brun. D’un geste habile elle envoya une dernière fois la lame quelque peu en l’air comme si elle voulait l’endormir pour mieux la rattraper et le blesser par la suite. Mais Mizeria n’en fit rien, il n’avait rien à craindre il devait le savoir. Elle rattrapa effectivement la lame avec un certain élan, sa main se rapprochant bel et bien de la prise mais ne s’y plaçant pas. Comme si elle y laissait de la place. D’un geste plus vif elle attrapa la main du brun qu’elle posa, sans lui demander son avis, dans son encoche. Et toujours sans le consulter ni le quitter des yeux, elle guida son bras vers sa gorge. Elle plaça d’elle-même la lame sur sa jugulaire tout en maintenant la main du jeune homme dans l’arme. Elle pencha même quelque peu la tête pour lui laisser le champ libre et lui faciliter la tâche.

- Pas de compromis hein ? Alors tue moi.


La blonde appuya un peu plus sur son bras pour que la lame soit au plus près de sa peau, la tranchant presque et elle regarda le brun avec un air de défi.

- Je serais toujours avec toi ET avec eux. Une Leone qui est tombée amoureuse de toi et qui veux tout. La paix au plus possible, vivre heureuse et t’avoir toi. Mais si ce n’est pas réalisable alors tue moi. Débarrasse-toi d’une autre putain de mafieuse qui se bat au nom d’une liberté parjurée et pour ses propres intérêts.

La détermination brillait dans ses yeux, elle ne plaisantait pas et restait sans peurs, prête à subir son sort quel qu’il soit . Elle acceptait son sort, qu’il soit favorable ou non. Elle non plus n’avait pas envie de faire de compromis finalement. Elle voulait tout. Sa famille, lui, leur bonheur à tous… Et ce qu’elle désirait par-dessus tout c’était qu’il lui fasse confiance, qu’il baisse enfin sa garde et accepte d’essayer de voir du bien un peu plus.. Ne serait-ce que chez les Leone. Elle le savait elle-même, une fois les Van Sidéris et les Auditore disparus leurs activités ne seraient déjà plus les mêmes… Mais elles resteraient, la famille ne disparaitrait pas, elle ne pouvait lui mentir. D’autres familles bien moins influentes avaient besoin d’être surveillées, et elle n’était pas dans la désillusion non plus, d’autres prendraient le relais… Il lui dirait surement que cela ne serait que le fruit de leurs actions seules, que si des familles restent, d’autres viendront surement. Mais elle n’y croyait pas. Elles pouvaient toutes être éliminées, un autre cycle infernal prendrait place avec de nouveaux acteurs. C’était inévitable… Puis, elle aimait les Leone, c’était sa famille. Mizeria voulait croire qu’elle pouvait aider Rai, l’aimer d’avantage, panser ses blessures, l’accompagner dans sa vengeance contre les familles qui méritaient clairement leur destruction puis lui faire voir un autre monde, lui montrer le sien, lui montrer que d’autres armes que la vengeance existaient. Elle voulait croire en cela, ou bien autant mourir. A ses yeux, au fond la fin restait malgré tout la même. Dès qu’elle avait parlé face à l’assemblée Auditore elle avait mis un pied dans la tombe, alors si c’était pour le perdre parce qu’il ne voulait pas croire dans le même avenir qu’elle, la perspective que Rai l’achève pour de bon en était presque délicieuse. Elle n’acceptait pas l’échec, la seule solution à ses yeux étaient qu’ils s’en sortent et qu’ils vivent ensemble ou elle préférait mourir. Combien de fois finalement avait-elle montré qu’elle le choisissait lui par-dessus tout le reste ? Il ne pouvait lui demander de choisir entre lui et les Leone, pas ce dernier sacrifice, cela faisait partie d’elle. Elle l’avait rencontré grâce aux Leone, elle était en vie, la femme qu’elle était, et aussi celle qui l’aimait à en mourir grâce à eux. Une dernière fois, elle exerça une pression sur son bras contre sa propre peau pour l’inciter à répondre ou à agir. Ses yeux toujours plongé dans les siens.



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MessageSujet: Re: What do I do because of you ?    What do I do because of you ?  EmptyLun 30 Nov - 9:55



Dans les yeux de la vérité.
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Ils se répondaient par tirades interposées, en laissant libre cours à leurs émotions, en prenant le temps de s'écouter, avec la maturité inébranlable de ces couples qui s'aiment ardemment mais traversent les pires épreuves successivement. Même pour Rai, qui ne s'était jamais, ô grand jamais retrouvé dans une situation pareille, ou même vaguement similaire, l'exercice semblait naturel. Au fond de lui-même, il était reconnaissant à Mizeria de lui laisser suffisamment de place pour s'exprimer, pour mettre ses pensées à l'oral, pour accoucher de ses propos et pour avoir le temps de les défendre... mais il ne pouvait pas endormir sa défiance et son amertume viscérales sous le simple prétexte qu'elle prenait, de son côté, le temps de l'écouter. Il savait qu'ils traversaient en l'occurrence une crise sans précédent, et que leurs deux philosophies, jusqu'à présent vaguement compatibles, se heurtaient à une adversité jusqu'alors inégalée. Le mal-être qu'ils exprimaient et le duel qu'ils se livraient avait toujours existé, d'une certaine manière. Ils avaient simplement fait de leur mieux pour l'ignorer, pour le repousser, tout en profitant avec délectation du bonheur quotidien que leur union pouvait leur offrir... mais cela ne pouvait pas durer éternellement. Le Nagafuse ne pouvait plus s'octroyer une vie ordinaire, plus se cantonner à des plaisirs simples, s'enchaînant et se faisant suite sans logique et sans contrepartie. Il avait fauché trop d'existences pieuses et innocentes, avait trop souvent craché sur les souffrants et les miséreux, trop souvent heurté, souillé, brisé autrui. Tout ce qu'il avait commis de nauséabond, de purulent, d'ignoble, il l'avait commis à des fins qu'il espérait glorieuses. Son dessein ultime, la destruction des mafias sous toutes leurs formes, suffisait à légitimer les souffrances d'un milliard d'âmes qui ne lui avaient rien demandé : parce qu'il savait qu'il pourrait, en faisant souffrir cette myriade d'individus-ci, en protéger une infinité.

Mais détruire les Van Sidéris ou les Auditore ne pouvait pas suffire. Parce que s'il se contentait de si peu, il n'y aurait pas à attendre longtemps pour que d'autres ne surgissent des basfonds des gigantesques bidonvilles et autres tripots, où la force faisait office de loi. D'autres Mephisto, d'autres Eberto, d'autres Symphony surgiraient tôt ou tard, asserviraient les foules, s'octroieraient le droit de jouir d'autrui et d'utiliser des innocents à des fins égoïstes, comme on utilise des outils pour construire un empire. Ces corps innocents seraient détruits, déformés, imbriqués pour devenir les piliers qui bâtiraient les fondations de ces immondes palais, louant la grandeur de la pègre et du monde criminel.
Il fallait tout détruire. Tout. Pour qu'il ne reste, au bout du compte, plus rien. Ni famille se gaussant d'être unique et désintéressée, ni mafieux reconverti dans une vie civile n'ayant rien oublié de ses exactions passées, ni anneau oublié et n'attendant qu'à retrouver un possesseur plus ou moins malfaisant... Tout détruire. Pour que plus personne n'ait même plus en tête la définition exacte du mot mafia.

Et c'était là que la logique de Mizeria et la sienne ne pouvaient que se heurter. Elle ne comprenait pas, ou faisait semblant de ne pas comprendre où il voulait en venir. Certes, rien de tout cela ne serait simple. L'entreprise dans laquelle le Nagafuse s'était investi jusqu'à présent semblait même perdue d'avance, d'un point de vue tout-à-fait pragmatique. Comment un seul homme pourrait-il parvenir à détruire un système s'étant installé au cours des siècles précédents, ayant été progressivement affiné et amélioré par les esprits savants et machiavéliques de ces dernières décennies ? Comment un seul homme pourrait-il mettre sur pied un poison assez néfaste et virulent pour détruire les anneaux et les boites que des scientifiques de renom avaient inventé, qu'une force mystique qu'on leur insufflait animait ? En décidant de se battre pour détruire la criminalité sous sa forme la plus crasse, ce n'était pas seulement contre ses contemporains que Rai entendait lutter. C'était aussi contre une histoire lourde, contre les flammes elles-mêmes, contre tous ceux qui avaient contribué à répandre les familles mafieuses aux quatre coins du globe. Il devait briser un système, une philosophie, un héritage... Il devait réinventer l'humanité.

Il ne bougea ni tandis que Mizeria se laissait aller à un éclat de rire mécanique, nerveux, presque angoissant, ni tandis qu'elle entreprit de lui répondre en parachevant sa tirade d'un geste grandiloquent, l'invitant physiquement et explicitement à lui trancher la gorge s'il ne se sentait pas capable de consentir à ce que les Leone survivent à sa vindicte mortifère. Cette ultime supplique, par ailleurs, sembla dans un premier temps le laisser de marbre. Il se contenta de soutenir le regard de sa dulcinée de ses yeux froids et ternes, et la laissa user de son bras sans chercher à se soustraire à son emprise. Allait-il effectivement lui trancher la jugulaire et laisser la mort la faucher ? L'idée aurait pu lui traverser l'esprit, d'autant plus qu'il aurait potentiellement pu tirer profit de ce sacrifice et de la mise-à-mort des Leone ayant quitté la bâtisse quelques secondes auparavant pour retrouver les bonnes grâces des Ciels Auditore. Mais il n'en fit rien, parce qu'il savait que tout ceci n'avait aucun sens : il ne pouvait plus prétendre lutter contre ses sentiments aussi froidement qu'auparavant. Aujourd'hui, il ne se sentait plus capable d'ôter la vie aussi violemment et insensiblement qu'il n'avait plus le faire autrefois. L'image de la gamine étripée à Venise lui revint à l'esprit, et il lutta contre les nausées qui lui revenaient fréquemment ces derniers temps lorsque ces fragments de son passé revenaient à la charge pour le tourmenter. Il avait été ignoble. Il en avait même fait sa marque de fabrique, sa principale source de fierté... Il ne l'était plus. Il était inutile de mentir, ou de prendre une posture aussi froide et machinale que possible : il avait changé, lentement mais sûrement, au contact de la Leone. Lui qui n'était autrefois qu'une nuance de gris monochrome et glaciale avait, progressivement, été teinté d'une couleur plus douce, plus chaude, plus agréable. Elle avait infusé en lui l'humanité qu'il avait essayé d'enterrer définitivement des années plus tôt.

D'un mouvement sec, tout en faisant évidemment attention à ne pas la blesser, le noiraud se libéra de son étreinte et jeta l'arme de sa compagne au sol. Il la darda d'un regard noir et répondit par les premiers mots qui lui vinrent, même s'il regretta instantanément leur froideur et son impulsivité.

-Ne fais pas l'idiote. Tu détournes le problème de son sens initial. Je ne te tuerai pas, et ce n'est pas parce que je fais le choix de t'épargner que tout est soudain résolu. Les choses ne sont pas aussi simples.

Il s'autorisa un soupir, mais seulement long d'une demi-seconde. Il imaginait sans peine que sa belle, prompte à des accès de colère, risquait de répondre sur le champ s'il lui laissait suffisamment de répit pour ce faire ; aussi prit-il le parti de renchérir immédiatement pour qu'elle comprenne bien qu'il n'en avait pas fini avec toute cette histoire, et qu'il avait encore à expliciter sa posture, sa philosophie, pour qu'elle sache une bonne fois pour toutes à quoi s'en tenir le concernant.

-Les Auditore et les Van Sidéris ne sont rien que des brutes et des psychopathes s'étant trouvés au bon endroit au bon moment, ayant utilisé leurs ressources à bon escient pour gravir les échelons à la place d'autres petites frappes. Lorsque je les aurai détruit, d'autres ne manqueront pas de récupérer leur part du gâteau, et de surgir à leur tour pour faire entendre leur égoïsme. Ce serait une lutte sans fin. Il faut les tuer plus vite qu'ils ne voient le jour. Et cela nécessite de tuer même ceux qui sont bons, ou qui prétendent l'être.

Elle ne comprenait pas. Elle ne pouvait pas comprendre. Car même s'il ne lui viendrait jamais à l'idée de nier les malheurs véritables que Mizeria avait subi au cours de ses jeunes années, elle avait eu la chance, au bout du compte, d'être accueillie par autrui. Les Leone lui avaient fait une place, lui avaient ouvert les bras, avaient fait en sorte de la bercer, de l'apaiser, de lui rendre le sourire. Certes, elle portait encore les stigmates de ses démons d'autrefois, mais elle avait grossièrement et globalement été guérie, retapée, remise sur pieds par une bonne rencontre, faite au moment où elle en avait le plus besoin. C'était de là, par ailleurs, que venait l'adoration qu'elle vouait à sa famille. Tout cela n'était en rien rationnel, parce que cela n'avait pas à l'être : c'était affaire d'émotions, rien de plus. Et c'était sans doute pour cette raison que le Nagafuse se permettait, à ce sujet précisément, de ressentir à l'encontre de sa chère et tendre un soupçon de mépris.
Elle ne comprenait pas parce qu'elle n'avait aucunement intérêt à comprendre. Lui n'avait bénéficié d'aucune bonne rencontre. On lui avait tout pris, et on l'avait froidement laissé crever dans les caniveaux de Tokyo, cette belle ville où les riches touristes étrangers se pavanent en vantant la propreté et la richesse endémique des locaux, mais où on laisse mourir les gueux et les miséreux infortunés n'ayant pas eu le bon goût de naître dans une belle famille. Combien d'autres se trouvaient être dans la même situation que lui, peu ou prou, actuellement ? Et combien d'autres souffriraient du même destin si rien n'était fait pour l'empêcher, à l'avenir ? Certes, il luttait pour offrir à l'humanité dans son ensemble un avenir plus optimiste, moins entaché de la criminalité qui l'avait saignée à blanc au cours des deux millénaires passés... mais il luttait aussi et avant toute autre chose pour ces quelques rares âmes à qui on prenait tout, à qui on ne laissait rien, qu'on condamnait à une agonie lente et à l'oubli définitif. Il luttait pour les victimes, les souffrants.
Et tant qu'il en existait, même un bonheur insouciant était un crime, d'une certaine manière.

-Ce n'est pas seulement le système archaïque de familles mafieuses que j'entends détruire. C'est le concept de mafia en tant que tel. Les boîtes, les flammes, les familles, les anneaux, c'est tout cela que je veux abattre. Alors, oui, ça passera par la destruction des Leone. Et si tu essayes de m'en empêcher, je...

Sa voix se brisa, se perdit dans un éclat maussade qu'il n'assuma pas jusqu'au bout. Son regard se perdit dans le lointain, même si ses yeux semblaient encore braqués droit sur ceux de sa chère et tendre. Il oublia le présent, une seconde durant, et ses lèvres demeurées ouvertes se refermèrent avec une lenteur amère. Ce spectacle étrange et hors du temps ne se prolongea finalement qu'une poignée de secondes durant ; mais cela semblerait probablement durer une éternité du point de vue de Mizeria, qui risquait fort de demeurer pendue aux lèvres du noiraud en attendant qu'il daigne enfin reprendre sa phrase là où il l'avait laissée.
Et il reprit, effectivement, avec moins de force et de certitude néanmoins qu'il ne l'aurait espéré ; son regard se fit même fuyant, dans un premier temps, avant de se teinter d'une détresse ineffable. Ses mots, toutefois, furent prononcés d'une voix ferme, d'une détermination tangible.

-Alors je finirai par te tuer.

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MessageSujet: Re: What do I do because of you ?    What do I do because of you ?  EmptyJeu 3 Déc - 22:59

What do I do with you?
I look at you and I think of you even more

Est ce qu’un coeur pouvait faire du bruit en se brisant ? Est ce qu’il pouvait tout simplement même tomber par terre et éclater en des milliers de morceaux ? C'est les questions que Mizeria se posa alors que quelques instants auparavant elle avait été suspendues aux lèvres de Rai pendant de trop longues secondes. Il avait enfin fini par sortir les mots qu’il semblait peiner à lui adresser. Et elle était restée là, face à lui, stupéfaite… Avait-elle bien entendu ou bien affabulait-elle ? Peut-être avait-elle mal entendu, après tout ses oreilles sifflaient et son coeur semblait se lancer dans un concert de batterie. Ou bien était-ce réellement le bruit que faisait un coeur quand il se brisait justement. Comme s’il se lançait dans une myriade de battements avant de s’éteindre à jamais. Elle avait eu l’impression que ce dernier s’était délogé de sa poitrine pour se briser au sol dès l’instant que son amant avait prononcer ces 6 petits mots. Sinon, comment expliquer son souffle coupé et l’abime qui était entrain de l’engloutir ? Pourtant, elle l’entendait très bien ce fameux coeur, il semblait encore fonctionner mais comment le pourrait-il désormais ? Comment pourrait-elle encaisser et faire l’air de rien ? Absorber ses dires, cette déclaration morbide au possible et hostile à son encontre. Soudainement une rage immense commença à gronder en son sein. Sa première envie fut de lui répondre haineusement, sa seconde de le frapper le plus violemment possible. De le pousser, de le mettre à terre et de le rouer de coups en hurlant sa peine jusqu’à en perdre la tête et oublier le mal qui semblait se propager en elle. Oui, un excès de violence comme rarement s’empara d’elle. Mais elle n’en fit rien. A quoi bon. Elle ouvrit bel et bien la bouche amorçant ce qui pouvait s’annoncer fatal pour le brun, mais elle n’alla pas plus loin. Tout se volatilisa. Amèrement, elle ferma ses lèvres et sembla déglutir difficilement, son regard fuyant au loin dans le fond du salon.

« Alors fais le… »


Comment pouvait-il encore la regarder ou du moins faire semblant puisqu’il avait l’air ailleurs ? Elle restait choquée par son audace… Une première grimace de dégoût s’afficha sur son visage. Qu’attendait-il exactement par la suite ? Imaginait-il qu’ils allaient reprendre leur journée paisiblement ? Rentrer ensemble innocemment en flânant main dans la main, l’embrasser comme si de rien n’était, lui dire qu’il l’aimait en pensant qu’elle était un poids sur sa route, la serrer contre lui comme s’il ne l’avait pas imaginée un traitre instant comme un cadavre, lui faire l’amour comme s’il n’avait pas déjà songé aux façons de la tuer. Pensait-il réellement pouvoir encore oser agir comme avant ? Une foultitude d’images défila devant ses yeux, de leurs prémices au début de cette matinée ci. Ces doux souvenirs qui semblaient désormais si amers et lointains l’achevèrent et lui arrachèrent une deuxième grimace mais de douleur cette fois-ci. Le temps sembla s’étirer, comme arrêté sur ce moment interminable et douloureux. Avait-elle mérité de tels aveux ? Elle lui avait certes proposé de la tuer mais elle ne s’était pas attendue à une telle déclaration. Elle lui avait bien dit une fois qu’elle le détestait sous le coup de la colère, mais était-ce une raison pour un tel retour de flammes ? Non. Quand ses mots avaient dépassés sa pensée sous l’effet de la peur, elle n’en avait jamais pensé un traitre mot, elle l’avait énoncé sous l’émotion, prise au piège par la toile de Méphisto et le danger qu’il avait placé sur leur couple. Rai en revanche n’avait aucune excuse de ce type pour lui faire une déclaration si enflammée… Il avait pensé ses mots puisqu’il avait pris le temps de les dire. Elle ferma les yeux un instant, toujours aussi amère et incrédule. Sa tête était pleine de questions, remplie de choses, de souvenirs, de dires, de paroles, qui désormais étaient d’une incohérence monstre. Elle s’était fourvoyée… Doucement elle se baissa et ramassa son arme, elle parla enfin de nouveau mais pour elle même. Les seuls mots qu’elle émit à voix basse par hilarité et stupeur, étaient plus une note personnelle à elle même plus qu’un sarcasme à l’encontre du brun.

« Qui est l’idiot… Cinq occasions ratées. Et même six… »

Elle alla récupérer son deuxième poing américain sans lui adresser le moindre regard. Elle n’en avait plus la force. L’ancienne Leone avait eu le temps de compter pendant ce temps qui avait paru si long. Pendant que des milliers d’éléments étaient brassés par son esprit, elle avait pris le luxe de passer leur parcours en revue. Il souhaitait la tuer si elle s’interposait ? Il savait depuis le début qu’elle le ferait forcément. Il la connaissait, il savait avec qui il s’engageait et potentiellement sur quel chemin. Et pourtant… Il aurait pu la laisser se faire blesser dans cette cave lors de leur première rencontre, peut être le coup aurait été fatal avec un peu de chance et de dextérité. Il aurait encore pu la laisser dans cet entrepôt en Hongrie, épuisée et blessée par balle, peut être se serait-elle vidée de son sang avec encore plus de chance. Et à quoi bon l’avoir secourue dans le tableau face aux ravisseurs au prix de multiples sévices. Pourquoi diable encore ne l’avait il pas laissée se faire étranglée dans ce maudit appartement. Cerise sur le gâteau, pourquoi ne l’avait-il pas laissée aux mains de Méphisto puisqu’elle semblait être un poids dans son entreprise dont il devrait se débarrasser tôt ou tard ? Et désormais dans sa propre maison… Alors qu’elle lui offrait l’occasion de se débarrasser du fardeau qu’elle représentait vraisemblablement pour son entreprise, il ne saisissait pas cette chance… L’idiot de l’histoire ce n’était pas elle face à ce constat. Elle enflamma sa bague mais seulement dans l’optique de ranger ses armes. Mizeria n’avait plus la force de le regarder et encore moins de se battre, il pouvait bien la tuer là maintenant. Elle s’en moquait… A quoi bon se débattre ? C’était comme si elle ne ressentait plus rien plus les minutes passaient. La jeune femme se sentait brisée, comme si son corps n’était plus le sien, ni sa vie. Elle n’avait plus envie. Malgré tout elle reprit la parole, d’un ton totalement calme et détaché, presque mécaniquement. A l’évidence, elle n’était pas loin de ressembler à un robot. La machine fonctionnait, par contre les émotions et son âme venaient de s’éparpiller avec les morceaux de son coeur sur le plancher.

« Tu prends le problème à l’envers… Que comptes tu faire quand tu auras réussis à tuer tout le monde ? Tu comptes te vanter d’avoir évité la mort de milliers d’innocents pour le sacrifice d’autres milliers ? Et après. Tu vas te gracier toi même ? Tu vas me l’accorder aussi si je te suis ta chute bornée dans le désespoir ? Nous avons tué des gens, en quoi on mériterait de vivre plus que les autres. »

D’un geste lent, ses boites regagnèrent la poche de sa veste et elle ne lui accorda qu’un vague mouvement de tête dans sa direction. Ses yeux ne se posant toujours pas sur lui. Elle ne pouvait pas croire que c’était le même Rai qu’elle avait regardé amoureusement des jours durant, sur lequel elle avait veillé, celui qu’elle contemplait comme son autre moitié. Pire encore, celui qu’elle était encore si heureuse, il y a quelques heures, de revoir enfin dans son intégralité et si nettement après avoir été plongée dans la nuit de longs jours durant.

« Dans chaque cas, si on suit ton raisonnement, je mérite la mort. Et dans tous les cas aussi…. Tu ne feras pas mieux que ceux que tu décries et déteste. Ton plan ne vaut pas mieux que les Auditore ni les Van Sidéris sans vouloir t’offenser. Tu vas tuer des gens qui ont certes péché mais comme la totalité des humains sur cette terre… Tu ne fais qu’appliquer ton propre égoïsme, ta seule vision des choses de manière impartiale et autoritaire… Tu vas aussi briser des vies, des couples, des familles, rendre des enfants orphelins… Arriveras-tu à regarder ces derniers dans les yeux et leur dire que tu as simplement fait ce qui était juste parce que leur père ou leur mère ont fauté selon Ta logique divine ? Alors que peut-être on pouvait régler la situation autrement ? Et crois tu qu’après tout ça ils seront forcément plus heureux que tu ne l’as été ? »

Ses mots étaient durs mais pourtant ils sortaient de sa bouche le plus calmement possible, sans aucune animosité à son encontre, sans volonté d’appuyer là où il pouvait avoir mal même si elle avait conscience du parallèle qu’elle venait d’installer… Elle aurait pu encore développer ses arguments mais il ne l’écoutait pas, et elle ne souhaitait plus essayer de lui faire comprendre quoi que ce soit, il s’y refusait. Elle ne faisait que répéter ce qu’elle lui avait précédemment dit au bout du compte. Personne n’était dieu, personne ne pouvait se targuer de savoir ce qui était juste et qui méritait d’en pâtir… Elle se refusait à son tour à se montrer aussi radicale que lui. Elle ne cachait pas que certains méritaient la mort dans tous les camps.. Mais ils ne possédaient pas ce pouvoir. La seule chose qu’ils pouvaient faire était de se battre sans relâche pour venir en aide à ceux qui en avaient besoin. Elle était entrée chez les Leone dans ce but… Protéger les citoyens. Cette idée lui fit tourner la tête plus rapidement vers le fond du salon. Son regard se braqua sur le mur du fond et une autre grimace de douleur étira ses lèvres. Au milieu des divers cadres suspendus au mur, se trouvait une photo de son père, en uniforme, le jour où on l’avait nommé inspecteur. Que dirait-il comme arguments ? Lui qui avait juré sur sa vie de protéger les autres. Par sa figure et son exemple, Mizeria savait que les efforts n’étaient pas simples, qu’ils seraient surement épuisants et colossaux, que la ligne entre le bien, le mal, la justice et le crime était fine voir disparaissait parfois… Mais elle voulait croire qu’on pouvait améliorer le monde et rendre les gens heureux à la force des bras et à la sueur des fronts, et en aucun cas par la mort de toute une tranche de la population sur la simple base d’une appartenance, d’une étiquette. Elle souhaitait continuer à se battre pour tous, d’essayer de faire de son mieux dans chaque situation, de venir en aide à quiconque en avait besoin, d’inciter les autres à la bienveillance… C’était une lourde tache mais ce qu’il fallait à ce monde en perdition, c’est ce qu’on lui avait inculqué… Son regard resta posé sur son père. Elle avait voulu lui ressembler, suivre ses pas tout en donnant autant de chaleur que sa mère… Avait-elle échoué ? Devait-elle continuer ? Que penseraient-ils ? Les forces lui manquaient.

« Détruis les anneaux et tout ce que tu veux, toute la mafia et ceux qui en font plus ou moins partie si ça te chante aussi. Ça n’arrêtera rien du tout… Comme tu l’as dis d’autres surgiront. Ils n’auront pas besoin d’une flamme pour faire exactement pareil. Crois moi… Les pires pourritures n’ont pas besoin d’un anneau pour faire du mal… »

Son expression se fit songeuse et ses yeux se baladèrent sur les tableaux. Il lui était dur de savoir quelle position adopter désormais… Pourquoi avait-elle fait tout ça ? Par amour ? Par courage ? Par folie ? Elle ne savait plus, tout comme elle ignorait ce qu’elle voulait au fond d’elle, pour eux deux, pour son propre compte également. Rai avait laissé une plaie béante qui continuait de saigner même si elle n’en montrait rien. Elle aurait pu fondre en larmes, s’écrouler là, enfin visiblement abattue, mais elle n’en avait plus la force. Pouvait-elle d’ailleurs encore se battre ? Elle pouvait très bien tout arrêter et rentrer chez les Leone… Mais à quoi bon. La fin restait la même.

« Puisque je vais mourir dans tous les cas… Promets moi deux choses. »

Sa posture sembla changer subtilement et se raffermir, et pourtant son regard resta froid et vide, comme si l’étincelle qui y était il y a peu et la caractérisait si bien, était morte sans prévenir. Dans l’état actuel des choses rien ne pourrait la faire revenir, aucun mot de la part du brun, encore moins la moindre attention… Ni les Leone. Son esprit ne cessait de lui crier : « A quoi bon ? ». Toutes ses interrogations ne trouvaient que cette réponse… Alors s’il fallait partir sur un manque d’enthousiasme et un lot d’incertitudes, pouvait-on dire qu’on se fichait des conséquences peu importe les choix ? La blonde avait déjà été trop loin, beaucoup trop pour rebrousser chemin. Et justement à quoi bon ? Si elle abandonnait Rai là maintenant et qu’elle s’en allait rejoindre sa famille, elle n’aurait plus qu’à compter jusqu’à trois pour voir les Auditore se lancer à sa poursuite… Elle ne vivrait pas tranquille ni les siens. Sa vie d’avant était finie. Elle ne voulait pas non plus jouer un jeu avec Rai, elle n’avait jamais été à ses côtés en tant qu’espionne, le coeur ne lui en disait toujours pas. Du moins du peu qu’il lui en restait, et par respect pour lui et les sentiments qu’elle lui avait voué, peut être vainement et bêtement. 

Les options restantes étaient faibles… La seule plus ou moins viable était de continuer son plan, récupérer le plus d’informations, détruire les Van Sidéris et faire imploser les Auditore… Et après… Sûrement se faire tuer par Rai. Cette triste conclusion ne lui arracha aucune expression, juste une impression d’un long coup de couteau qui venait d’élargir la blessure faite par le brun… L’ancienne Mizeria, celle qui lui avait dit qu’il avait intérêt à aimer la vie et à le crier sous peine d’être frappé, lui aurait certainement crié également qu’elle allait le tuer en premier avant qu’il ne la tue… Mais l’actuelle blondinette ignorait bien où cette alter ego était partie, et d’ailleurs elle s’en fichait éperdument à ce moment précis. Elle était fatiguée. Elle l’aimait ou l’avait trop aimé. Que devait-elle penser ou dire désormais ? Où en étaient-ils ?
La jeune femme n’en souhaitait pas pour autant la mort de son amant, rien ne servait de se voiler la face. Jamais elle n’y avait songé contrairement à lui et l’idée ne naitrait jamais en son sein. Même si elle avait bel et bien eu envie de le tabasser.
Combien de nuits avait-elle dormi par morceaux et si mal depuis le début ? Combien de fois avait-elle été rongée par la peur de le perdre, d’être tuée avec Rai par Méphisto ou quelqu’un d’autre, ou bien par la peur d’être découverte et torturée jusqu’à que mort s’en suive ? Combien d’insomnies et d’angoisses ? La réponse était presque toutes les nuits. Dévorée par ces horribles angoisses justement, elle avait déjà commencé à n’être plus que l’ombre d’elle même. Elle était épuisée et Rai venait de lui donner le coup de grâce.

Au final, elle allait mourir. Par Mephisto, par un Auditore, par Alda ou Symphony, par Rai… Et jamais elle ne pourrait reprendre sa route et prétendre à un semblant de normalité comme avant. Vu sous cet angle, il n’y avait plus rien à perdre, plus besoin d’avancer avec une boule au ventre. Et elle connaissait déjà trop bien ce sentiment. Elle en savait les dangers mais également les bénéfices. Elle n’avait pas survécu à Hado des années durant et réussit à la fin à lui mettre une balle entre les deux yeux sous l’impulsion de l’amour… Non, elle y était parvenu car elle n’avait plus rien à perdre. Mourir ne lui avait pas fait peur, cela aurait été même un soulagement puisqu’elle avait cherché à y accéder.

« Laisse moi te raconter une petite histoire avant mes requêtes… »

Il fallait qu’il comprenne toute l’histoire pour de bon pour savoir à quel point ces deux promesses étaient si importantes pour elle. Il n’y avait plus d’autres choses à demander que ces deux-ci à bien réfléchir. Un long soupir s’échappa de ses lèvres. Elle avait plus ou moins prévu de lui raconter cette fameuse petite histoire plus en détails qui était la sienne, mais pas dans ces conditions. Elle n’avait pas imaginé qu’elle aurait à tourner ce qu’elle voulait lui livrer en promesses, comme son seul et unique testament… Peut être était ce mieux que prévu au fond ? Il n’y aurait pas à larmoyer devant la triste vérité, pas besoin de s’épancher sur ce qui était passé et ne pouvait plus changer. Il n’y avait plus de réconfort à chercher, ne restait simplement qu’un simple constat. La vie semblait vouloir lui montrer qu’il n’y avait certes plus rien à faire pour les événements de son passé mais que c’était également valable pour son futur. Il ne lui restait plus qu’à en soupirer, il n’y avait plus rien, elle n’était plus rien. Le destin s’acharnait à tout lui arracher et à la renvoyer à cette condition. Tant et si bien que désormais elle ne voulait plus rien attendre de qui que ce soit et encore moins ressentir quoi que ce soit. Rien.



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MessageSujet: Re: What do I do because of you ?    What do I do because of you ?  EmptyVen 4 Déc - 10:49



Dans les yeux de la vérité.
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Quelque chose s'était brisé, mais Rai n'arrivait pas à savoir quoi précisément. Pourquoi s'était-il senti obligé de justifier sa position et son raisonnement jusqu'à ce stade ? Pourquoi n'avait-il pas plutôt choisi de fuir l'inéluctable, ou à tout le moins de le repousser autant que possible ? Ce n'était pas demain que les Van Sidéris et les Auditore allaient finir par tomber. Le temps qu'il trouve un moyen fiable de nuire aux Leone et aux autres familles, des années se seraient écoulées par paquets ; et il lui faudrait au moins autant de temps pour trouver un moyen d'éradiquer boîtes et anneaux de la surface du globe, qu'il trouve un moyen scientifique de le faire ou qu'il décide de tout supprimer progressivement, manuellement. Alors pourquoi ? Certes, il ne pouvait le nier, son comportement et la position de Mizeria étaient absolument incompatibles sur le très long terme. Si elle refusait de céder du terrain, si il était à ses yeux absolument inenvisageable que les Leone finissent par passer l'arme à gauche, ils se heurteraient tôt ou tard à la dureté des ambitions du noiraud. Leur couple ne pouvait pas finir heureux. Il finirait par voler en éclats, tôt ou tard... pourquoi avait-il fallu, également, qu'elle dispose de tant de responsabilités au sein de sa famille ? Pourquoi avait-elle choisi sciemment de le lui cacher, ou plutôt de ne pas le lui avouer à un instant où la situation était encore propice à ce type de révélations ? C'était son choix de ne rien assumer qui venait de les placer dos au mur. C'était son choix de tout taire lors même qu'elle avait eu une foultitude d'occasions de placer des mots sur sa véritable identité qui les avaient contraint à hausser le ton de la sorte, et à pousser le Nagafuse à réaliser cette horrible confession. Allait-elle lui reprocher d'avoir la lucidité et l'honnêteté qu'elle n'avait jusqu'à présent pas osé manifester à son encontre ? La frustration, l'amertume et l'emportement commencèrent à gronder, mais se turent bientôt, face à la rage qui transparaissait clairement chez sa chère et tendre.
Elle était tout ce qu'il avait eu de positif au cours de ces dernières années. Depuis le début de sa vie, même, peut-être. Pourquoi devait-elle, elle aussi, finir par lui tourner le dos ? Pourquoi devait-il continuer à progresser au sein des ombres, seul, sans personne pour lui apporter un brin de chaleur et de douceur ?
La vérité était cuisante, mais il ne pouvait plus la nier. Il l'avait mérité. Il l'avait simplement mérité, et elle tâcha de le lui rappeler après s'être éloignée quelque peu, après avoir rangé ses armes, en lui signifiant qu'il n'avait aucune prédisposition miraculeuse qui pouvait lui permettre de savoir qui méritait la mort, et qui méritait de continuer à vivre.
Et elle franchit même le cap périlleux qu'il avait toujours fixé avec appréhension en lui demandant s'il était prêt à se gracier lui-même.

Le restant de ses propos, le contexte au sein duquel elle les avait prononcés, tout ce qui enrobait cette question jetée à brûle-pourpoint disparut subitement aux yeux du noiraud. Il ne restait plus que cette question insidieuse, pernicieuse, face à laquelle il n'était pas en mesure de se soustraire. Cette question, elle se terrait au fin fond de son âme depuis qu'il avait choisi d'arpenter ce chemin hideux. Cette question, elle ne le quittait jamais des yeux, le suivait et le détaillait scrupuleusement même lorsqu'il dormait, n'attendant que son heure et une opportunité de reprendre ce qui lui était dû.
"Je me tuerai."
"Je me tuerai."
"Je me tuerai."
Cette pensée, il la formula un milliard de fois en une fraction de secondes. Ses lèvres s'agitèrent même, l'espace d'un instant, sans pour autant que ses cordes vocales ne prennent le relai afin d'extérioriser ces trois mots lourds, attachés à sa cheville comme le boulet d'un prisonnier. Il n'avait pas le droit d'être heureux. Il ne l'avait jamais eu. On lui avait ôté toute chance de l'être dès l'enfance, et il avait décidé que sa rédemption, que son chemin de croix, serait d'empêcher d'autres de suivre ses traces à l'avenir. En détruisant la mafia, il s'assurerait que personne ne posséderait la force de s'arroger des familles, des communautés entières, et d'en disposer librement, avec froideur et sadisme. Certes, il ne briserait ni le mal, sous toutes ses formes, ni la criminalité en tant que tel ; mais il ôterait des armes, de celles qu'une minorité odieuse manipule pour écraser la masse silencieuse et souffrante qui compose l'humanité.
Il avait tué. Des innocents, des criminels, des femmes enceintes, des enfants, des vieillards, que le temps aurait fini par faucher avec la même insensibilité que lui. Il avait tué, bien trop pour avoir le droit à un lendemain heureux. Il n'était certes pas différent des Van Sidéris ou des Auditore : il songeait même être largement pire. La fin ne peut pas justifier les moyens ; il ne croyait pas à cette maxime populaire, n'y croyait plus. Plus depuis qu'il avait commis son premier meurtre, plus depuis qu'il avait du sang sur les mains, innocent de surcroît, plus depuis qu'il avait vu toute trace de vie s'éteindre dans les yeux de fillettes incompréhensives et apeurées. Il aurait aimé croire en une forme de justice divine, d'au-delà, pour promettre à ces gamins qu'elles avaient vécu la souffrance pour mieux s'en libérer... mais il n'y croyait pas.
Il n'y avait rien. Rien d'autre que la mort, que l'injustice, que le néant. Il avait contribué à faire de cette mort, de cette injustice et de ce néant les principes fondateurs de l'existence d'un lot conséquent d'individus. Les desseins qui résidaient derrière cette vérité pouvaient bien être louables et vertueux, dès lors qu'ils autorisaient cette barbarie, ils ne pouvaient que le désavouer, le désapprouver.
Il était ce qu'il avait combattu, et ce qu'il allait continuer à combattre. Et il savait qu'il finirait par se tuer, ultimement, lorsque le reste du monde mafieux aurait rencontré ce funeste destin qu'il lui réservait.

Une larme silencieuse roula sur sa joue, que Mizeria ignora sans doute, trop occupée à ne surtout pas poser ses yeux sur sa silhouette blafarde, maladive.

Puis vint le revirement de situation : elle changea de posture, et entreprit de se montrer plus brave, plus combative. Voilà quelle était la différence fondamentale entre eux deux ; elle avait appris à être une fauve, à ne jamais courber l'échine... lui n'avait rien appris d'autre qu'à être un serpent. Il évitait les dangers, et frappait en traître. Il ne savait faire que cela.
Il se tourna en craignant qu'elle ne le dévore du regard, en craignant de céder et d'être vidé de toute sa force s'il devait l'affronter de face. Il déposa son regard vide sur un pan de mur, sans le voir pour autant. Il demeura plongé au creux de la danse infernale de ses démons, et resta même muet lorsqu'elle annonça vouloir lui raconter une histoire.
Encore une fois, il ne trouva aucun mot à prononcer. Il fit preuve de consentement, par défaut ; il allait écouter ce qu'elle avait à lui dire, et il prendrait sa décision en fonction. Mais quelle décision pouvait-il bien prendre, de toute manière ? Partir sans un mot, en essayant de ne plus jamais se souvenir de son existence et de ce qui venait d'avoir lieu ? Continuer à vivre comme s'il ne s'était rien passé ? Encore évoluer à ses côtés, en faisant comme si le malaise qui s'insinuerait entre eux ne le gênait pas ?
Il y aurait une fracture. Ce moment était une fracture. Un moment de basculement intense et sans retour. Une possible mise-à-mort prématurée pour lui, le criminel taciturne et secret, qui avait longtemps fait de sa solitude un crédo. C'était précisément pour éviter ce type de drame qu'il avait fait en sorte de ne se lier à personne...
Mizeria avait raison sur un point, au moins : il était effectivement le plus grand des idiots. Leurs vies n'étaient pas compatibles. Sa vie à lui n'était que souffrances, parce qu'il s'était abandonné depuis longtemps à une rancœur qui n'avait rien d'humain.

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MessageSujet: Re: What do I do because of you ?    What do I do because of you ?  EmptyMar 29 Déc - 0:32

What do I do with you?
I look at you and I think of you even more

Mizeria ne vit ni Rai se décomposer, ni la tristesse dans son regard et encore moins les larmes qui roulèrent sur ses joues. Et pour cause, elle n’arrivait toujours pas à le regarder, c’était trop douloureux. Elle sentait surtout qu’elle basculerait pour de bon si ses yeux croisaient les siens. A cet instant même, elle donnait l’impression de garder la face, de rester brave et inébranlable… Mais si ses yeux se posaient de nouveau ne serait ce que sur les traits du brun qu’elle aimait si follement, et semblait-il, également si vainement et sottement… Elle allait fondre en larmes et s’écrouler définitivement. Pour le moment, elle arrivait à contenir cette idée. Ses paupières se fermèrent et le calme s’instaura dans la demeure. Aucune réponse ne se fit entendre de la part de l’Auditore, sa partenaire en tira donc la conclusion qu’elle pouvait y aller. Elle avait son feu vert pour lui livrer ce qu’elle voulait lui dire et formuler ses promesses… Ce qu’il se passerait ensuite, elle l’ignorait. Tout comme l’attitude actuelle de son amant. Était-il là à l’écouter le plus calmement du monde comme si de rien n’était ? Ou bien était-il devenu glacial et détaché au point de considérer lui laisser quelques dernières paroles avant de l’achever ? Peut-être lui aussi n’arrivait plus à la regarder… Peut-être, peut-être… Son coeur se serra à nouveau. Apparemment il ne s’était pas encore tout à fait fracassé au sol en milliers d’éclats, il semblait vouloir rester en son sein et la faire souffrir davantage.

Comment en étaient-ils arrivés là ? Comment avait-elle pu se fourvoyer de la sorte ? S’imaginer une vie normale, tomber amoureuse si éperdument au point d’être bernée et si blessée… Les réponses lui échappaient. Tristement elle rouvrit les yeux sur le plancher et le fixa quelques secondes. Elle était fatiguée du brouhaha dans sa tête, une véritable tempête y avait pris place et rien ne semblait l’en faire sortir. Rien ne le pourrait jamais plus à priori. Et pourtant… Elle avait bel et bien des derniers mots à lui adresser. Ce n’était en rien la journée que la blonde s’était imaginée, néanmoins elle allait en suivre quelque peu la trame. Leur présence ici relevait de deux buts, le premier, celui qu’elle s’apprêtait à faire, lui raconter plus en détail son passé, dans ce lieu qui en avait été témoin, le second : récupérer quelque chose de bien particulier… Mais désormais l’un ou l’autre lui semblaient fades et dénués de sens. Réflexion faite, peut être toute sa vie entière n’avait aucun sens. Son regard las et épuisé remonta les lattes du parquet pour aller se poser de nouveau sur le mur en face d’elle, rempli de diverses photos. Tous les supports étaient à disposition… Sans aucune exception pour ce qui allait venir.

« Il était une fois un jeune policier… Plein d’idéaux mais surtout avec un grand coeur, il n’avait qu’un seul rêve : faire son possible pour aider les autres… Idiot hein ? Pas de rêve de carrière glorieuse ou quoi que ce soit, juste aider. Cela paraissait bien simplet aux yeux de beaucoup de monde. Surtout aux yeux de son frère, Hado… Quand l’un n’était que lumière, l’autre n’était qu’obscurité. L’un représentait la justice, et comme pour marquer d’autant plus le contraste et comme ultime provocation, le second touchait à tout ce qui pouvait être illégal.. Du moins pire au plus horrible… Je te passe le refrain sur la jalousie que mon oncle entretenait envers mon père, tu dois t’en douter. »

Mizeria soupira, ses poils s’en hérissaient à nouveau. Etait-il possible de détester à ce point quelqu’un de son propre sang ? Quelqu'un de sa famille, qu’on était sensé aimer ou avoir aimé ne serait ce qu’un peu même au fond du fond dans un lointain passé ? A ses yeux c’était impossible, et pourtant… Son passé en était la preuve. Malgré tout, elle ne comprenait pas. Même à cet instant, après les terribles révélations de Rai, et à quel point elle lui en voulait, jamais elle n’aurait songé à lui faire du mal. Peut-être lui coller une bonne droite certes.. Mais jamais au grand jamais souhaiter sa mort.

« Sebastian, mon père, resta malgré tout là pour mon oncle. Du moins il fit ce qui lui paraissait le plus juste jusqu’à un certain point. Puis cause perdue pour cause perdue, il a juste continué sa vie de son côté finissant par l’ignorer, après tout c’était même ce que son frère semblait réclamer. Il mena donc sa vie paisiblement, montant les échelons dans la police, lui qui n’y apportait pas tant d’attention, il trouva l’amour également, fonda une famille… Il rencontra ma mère après une bête histoire de vol de sac à main. Une jeune traductrice japonaise venue travailler quelques temps à Londres et qui finalement ne rentra plus jamais au pays par amour pour celui qui deviendrait très vite son mari... Une belle histoire d’amour, tout ce qu’il y a de plus niais. »

Un rire nerveux lui échappa mais elle sourit malgré tout. C’était vrai, c’était niais à souhait mais dieu qu’elle chérissait leur histoire, c’était celle de ses parents. La bête histoire trop mielleuse qui l’avait amenée à voir le jour. D’habitude, une énorme gratitude englobait son coeur à cette idée, mais en ce jour, elle se disait de nouveau « à quoi bon ». Son coeur sembla chuter de nouveau dans sa poitrine… Néanmoins elle aimait ses parents et leur histoire trop fleur bleue…

« Ils avaient tout pour eux. C’est donc normal qu’au fil des années, après un mariage dans les règles de l’art, ils décidèrent de fonder leur petite famille… Deux garçons pour commencer, William et Ives. Puis évidemment, ils voulaient tenter d’avoir une fille… Juste une. C’est ainsi que je suis née. La petite dernière… Mais seulement pour quelques années, ma petite soeur Naru, vint au monde 6 ans plus tard. Ils avaient promis de s’arrêter à trois enfants mais ils n’avaient pas su renoncer à un quatrième imprévu. Et nous voilà, la famille Balogh. Tout ce qu’il y avait de plus normal, une vie banale, agréable et routinière. Un quotidien heureux… Jusqu’à un certain point.»

Ses yeux se posèrent sur une photo de famille. La jeune femme devait être âgée de six ou sept ans à ce moment là, la petite dernière était encore dans les bras de sa mère… Ses lèvres se pincèrent. La belle époque… Ils étaient tous si heureux à ce moment là, tout était encore si chaleureux. Elle s’égara un long moment sur ses parents, son père semblait si fier, et sa mère.. Ce sourire. Par le passé, il suffisait que Mizeria le voit pour s’apaiser ou oublier ses peines et reprendre courage. Là, rien n’y faisait… Elle n’arrêtait pas de se demander ce qu’ils pourraient penser ou dire s’ils étaient encore vivants. Seraient-ils toujours aussi fiers et heureux ? Aurait-elle finit par ressembler à sa mère avec le temps, en dehors de leur ressemblance physique si frappante ? Dur à croire, elle avait complètement hérité du caractère de son paternel… Une multitude de souvenirs revinrent d’ailleurs en flèche, une quantité impressionnante d’images, de sons, de fragments… Certains semblaient même prendre vie devant ses yeux par l’intermédiaire des cadres. Ils avaient été heureux. Elle se revoyait apprendre des « rudiments » pour se battre avec son père, regarder sa mère bercer Naru, jouer avec ses frères, le début de son adolescence et essayer de trouver ses marques… Et même le premier drame.

« On a perdu William quand je venais d’avoir 12 ans… »


Elle avait sortit cette phrase de nul part, comme un couperet. Aucune transition ou narration pour ce cas précis… A vrai dire, plus elle avançait dans son récit plus elle avait l’impression de s’y perdre alors elle préférait aller vite, omettre les détails. Non pas qu’elle oubliait des choses ou ne savait plus ou donner de la tête… Elle s’y replongeait simplement comme si elle voulait y être engloutie et ne jamais en sortir. Après l’affaire d’Ox, l’ancienne Leone avait passé des jours à regarder les cassettes que ce pauvre fou avait récupéré sur elle… Cassettes qu’il avait récupéré par l’associé d’Hado. Tout avait pris sens dans le tableau… Un enchainement d’événements malencontreux à nouveau, une suite de drames qui au final s’étalait sur plusieurs années et qui ne semblait jamais vouloir s’arrêter. Oui, elle avait l’impression que sa vie entière n’était que ça quand elle en faisait le constat. Preuve supplémentaire, elle pensait avoir trouvé sa place auprès de Rai, pour le perdre ici même où elle avait déjà tout perdu… Difficilement, elle ravala sa salive et poursuivit. 


« Il a disparu à ce moment là… Accident de la route, meurtre… Nous n’avons jamais su… Mon père a cherché sans relâche mais sans succès. Ça l’a anéantit mais il a tenu bon. C’était une première blessure inguérissable. C’est ce moment qu’Hado a choisi pour refaire surface… Il est revenu quelques fois à la charge, plus ou moins gentiment. Mon père, fidèle à lui même est resté droit et n’a cédé en rien… Après j’ignore si c’était par débordement, chagrin ou accumulation, ou un mélange de tout ça, mais il a finit par le foutre à la porte un soir. C’est ce soir là qu’Hado a juré à mon père qu’il se vengerait… Qu’il lui volerait son bonheur. Je l’entends encore tellement distinctement… Au final, il ne fit pas que le lui jurer, il mit sa menace à exécution quelques temps plus tard. » 



Pour la première fois depuis le début sa voix craqua quelque peu mais elle tenta de rester calme et de ne rien laisser paraitre. Comment oublier ? L’enfant qu’elle était à ce moment là en avait été presque traumatisée… Des jours durant elle s’était repassé la scène en boucle, revoyant les traits furieux et emplis de haine de son oncle, des nuits durant elle avait juré entendre des pas dehors et l’imaginait sans mal rôder, avec son regard prêt à tuer comme il l’avait eu ce soir là. Jamais elle n’avait réussi à oublier son visage, quelque chose l’avait percuté violemment, un espèce d’instinct avait voulu la prévenir du danger. Si seulement elle avait su… Ce soir là il avait basculé dans une folie sans retour. Si seulement elle avait su où tout cela allait les mener. 

Son regard trouva à nouveau refuge sur le sol, comme si un voile venait de tomber sur les cadres. Un épais rideau qui l’empêchait désormais de contempler le bonheur qui avait été le sien pendant les premières années de sa vie. Avaient-ils justement été trop heureux ? Elle essayait de trouver encore et encore une logique à tout cela, à toute sa vie. Peut-être était-ce un châtiment mérité et écrit dans le marbre, une rageante destinée, une triste trajectoire dont elle n’arriverait jamais à se soustraire. Tous ses proches finiraient par se faire déposséder leur bonheur un jour ou l’autre, par perdre la vie. Un seul et unique sort les attendait tous…. Le sien semblait être tombé aujourd’hui, le même que celui de sa famille. Celui ci même qui s’était déroulé dans cette maison 15 ans plus tôt. Mollement, Mizeria bougea enfin de sa position. Il était temps…. Comme toujours, elle appréhendait ce moment, et c’était bien pour ça qu’elle avait essayé de le reproduire le moins souvent possible et qu’elle avait fait ce qu’elle avait fait. Comme pour marquer d’autant plus le principe d’ultime urgence. C’était aussi à cause de ça qu’elle était venue avec Rai dans cette maison, il était le premier à l’accompagner et serait surement le dernier mais il était inutile de lui en faire le constat. 

Sans dire un mot, elle le convia à la suivre. Comme une ombre elle se dirigea vers le fond de la maison, vers la cuisine si Rai regardait bien quelle pièce manquait au rez-de-chaussée… Il n’aurait pas pu le deviner en arrivant devant la porte de toute évidence, la dite pièce était fermée et la porte barricadée. La jeune femme enleva quelques planches sans réel entrain, au contraire, et elle déverrouilla les quelques verrous qui les empêchaient d’entrer.

« Quand je rentrais de l’école, j’avais l’habitude de rentrer par l’arrière de la maison… C’est ce que je fis ce jour là, comme toujours. Sauf que, comme si c’était digne d’un mauvais film.. Tout était silencieux, beaucoup trop. Et la porte arrière était restée ouverte. »

Elle fit sauter la dernière sécurité et ouvrit enfin la porte. Mécaniquement, elle alluma la lumière. Les fenêtres avaient également été cloisonnées comme pour s’assurer que jamais plus personne ne pourrait y pénétrer… La cuisine était devenue un morbide bunker. Sa respiration se coupa un instant, dieu qu’elle n’aimait pas venir ici. Dans cette maison pour commencer, mais dans cette pièce… Elle avait du y aller moins d’une dizaine de fois depuis ce terrible jour… Des fois pour pleurer au début, d’autres pour essayer de nettoyer et tout boucler, et une dernière il y avait de cela quelques années pour y cacher quelque chose.
Elle resta à l’entrée un instant, nullement dérangée par l’odeur de renfermé qui venait de se dégager de la pièce, encore moins par la légère poussière qui s’était levée quand elle avait ouvert la porte. Ses yeux n’en regardait même pas les fragments qui virevoltaient avant de disparaitre sur le sol… Elle était trop occupée à fixer le parquet de nouveau. On y devinait sans mal diverses taches plus ou moins conséquentes dans toute la pièce… Trois plus ou moins étendues se trouvaient autour de la table au centre de la pièce. Ses yeux les balayèrent une par une avant de se lever sur le mur du fond ou une constellation de taches s’y trouvait. C’était ici qu’elle avait perdu quatre membres de sa famille. Trois par Hado, et le dernier, son père, par suicide… Les traces en étaient encore les sinistres rappels. Le plus discrètement possible, elle reprit difficilement son souffle avant d’entrer dans la pièce. Venir ici avait toujours le don de la mettre dans un état second, de la renvoyer quelques années en arrière comme si elle était de nouveau une enfant découvrant les corps sans vie de sa famille, hurlant à la mort mais n’obtenant aucune réponse, aucune aide. Elle n’avait pas le droit de céder à nouveau, elle se l’était juré. En ce jour, elle avait même fait le voeu de ne plus rien ressentir. Mizeria le savait, elle devait agir mécaniquement, ne plus penser, ne plus réfléchir, ne plus ressentir. Elle n’avait plus qu’un seul but, elle ne devait plus qu’en avoir un seul et elle devait oublier tout le reste, s’oublier elle même.

« Hado… Hado a tué mon frère, ma soeur et ma mère ici. C’est.. Moi qui les ai trouvés. »

Elle se laissait aller malgré tout, elle se gifla intérieurement. C’était il y a 15 ans, elle ne pouvait rien y changer, jamais. Toutes les larmes qu’elle pourrait verser ni changerait rien, tous les cris ne les ramèneraient pas, tout comme tous ses efforts pour dépasser ça ne mèneraient à rien. Ignorer, c’est tout ce qu’il lui restait à faire. Comme un robot peu convainquant elle alla vers le vaisselier et ouvrit ce dernier. Un seul but, c’était tout ce qu’il lui restait et pour s’aider à y parvenir elle avait besoin peut-être d’une certaine chose. A vrai dire, elle ne pouvait plus que compter sur elle même désormais.

« Ce jour-là, j’ai également trouvé mon père complètement sonné dans le salon. Je ne sais pas comment Hado a fait mais il a bien maquillé ça… En très peu de temps, la police était là et en concluait que mon père les avait assassinés. Avec le temps je pense qu’il avait versé des pots de vins surtout. Mais l’histoire en reste la même. Mon père fut mis en prison et moi… On donna ma garde au seul proche qui me restait, à mon très cher oncle… »

Un rire amer s’échappa de ses lèvres tandis qu’elle sortait une boite d’un placard. On l’avait confiée à Hado… Au meurtrier de ses parents. Il avait pris soin de lui faire vivre un enfer et de la briser encore plus morceaux par morceaux. A l’heure actuelle, son coeur hésitait encore à savoir si le pire drame de sa vie avait été de perdre ses proches ou les années qu’elle avait passé avec son oncle. En vérité, les deux réunis… Le meurtre de sa famille avait été une tragédie, la suite n’avait été qu’une mauvaise comédie. Jamais elle n’avait pu prendre part au jeu, elle avait été reléguée au rôle d’actrice forcée et passive, privée du moindre droit, abusée. Et personne n’y pouvait donner objection.


« « Il va prendre soin de toi » qu’ils m’ont dit… Quelle plaisanterie. J’ai hurlé ce que j’ai pu mais rien n’y fit…. Il obtenu ma garde, comme il l’avait exactement prévu. Il lui fallait un Balogh encore en vie pour toucher l’héritage. Et comme il finirait par me le répéter au fil des ans, mes parents ne pouvaient pas servir, mon frère était trop vieux, ma petite soeur trop chiante à gérer vu son jeune âge… J’étais donc l’heureuse gagnante de son macabre plan. »

Elle posa la fameuse boite sur la table de la cuisine et l’ouvrit. La jeune mafieuse commença à en sortir quelques bêtises avant de la vider complètement et poursuivre sa besogne pour retirer un faux fond. Le souvenir de sa vie avec Hado venait de tellement lui donner la nausée et froid dans le dos qu’elle avait lancé sans réfléchir les objets un peu trop fort à droite à gauche. La lumière avait beau être allumée, elle avait l’impression que la pièce devenait de plus en plus sombre. Il fallait qu’elle sorte d’ici, qu’elle mette surtout un terme à son histoire avant de se laisser happer complètement par les ténèbres.


« La suite tu la connais à peu près du tableau. Il a eu une Balogh, cerise sur le gâteau j’étais celle qui lui rappelait tant son très cher frère donc il pouvait continuer de se défouler. Le meilleur bonus ne s’arrêtait pas là… Je pouvais lui servir. Hado a passé les meilleures années de sa vie très certainement à ce moment là, avec son partenaire qu’on a tué dans le tableau. Il avait tout réussi, sa vengeance, avoir un défouloir et les affaires était fleurissantes… Trafic d’être humains, drogues, corruptions, bordel… Son empire était vaste mais personnellement je n’ai connu que le bordel. J’y ai passé des années à subir les coups de cette pourriture, aussi bien physiques que psychologiques d’ailleurs. Egalement à suivre, enfin pardon plutôt subir son « entrainement » pour pouvoir satisfaire ses putains de clients quand je serais en âge… Bref un vrai paradis dont je voulais à tout prix partir. »


Elle enchainait tout comme ça lui venait, entre la précipitation et le cynisme comme si une bombe à retardement n’allait pas tarder à exploser et qu’elle devait s’enfuir. Comme si quelqu’un la poursuivait encore et n’allait pas tarder à l’attraper. C’est avec cette même précipitation qu’elle fit enfin sauter le faux fond de la boite et récupéra enfin ce qu’elle était venu chercher. Il y avait une chose qu’elle avait caché à l’intérieur à l’abri de tous, en secret, au pire endroit où personne ne penserait jamais chercher. Qui aurait l’audace de cacher quelque chose là où sa famille aurait perdu la vie ? La seule et unique réponse valable : quelqu’un de désespéré. Mizeria savait qu’une seule carte d’urgence absolue lui serait offerte si elle en avait besoin et que dans le cas échéant sa meilleure cachette serait ici. Si d’aventure elle devait la récupérer, c’était vraiment qu’elle n’aurait plus le choix… Qu’elle se trouvait au pied du mur et qu’affronter les fantômes de son passé serait le dernier de ses soucis. Cette carte maitresse elle venait de la faire tomber dans sa main. Une bague. A priori elle n’avait rien d’extraordinaire, sa vraie valeur ne pouvait se mesurer que dans le feu de l’action. Des années auparavant elle avait gagné à la sueur de son front cet anneau de rang A, encore bien loin d’en avoir le niveau mais misant sur une possible future utilisation. Elle ignorait si elle avait désormais le niveau mais elle s’en rapprochait déjà beaucoup plus qu’avant. De toute façon elle n’avait pas le choix. Finalement c’était la seule maigre aide qu’elle pouvait se procurer. Elle joua un peu avec la pierre incrustée et repensa à ce qu’elle venait de dire à Rai. Son récit n’avait rien à voir avec le premier qu’elle lui avait livré à Venise sous cette douche… Il avait été plus mouvementé, plus rythmé par ses émotions et plus sombre que la première version. Elle se rendit compte de son empressement pour cette version ci et reprit quelque peu son calme, obnubilée par les éclats de la bague. Et maintenant ? Elle avait une bataille à mener, et dans tous les cas sa vie à perdre. Ses yeux suivirent les reflets du bijou pour se poser sur le mur face à elle. Des fragments de lumières contre de sombre taches… Une constellation de clarté contre une autre de sang. Dans un souffle, elle reprit ses paroles.

« A tout prix… J’ai essayé de m’enfuir, j’ai essayé de me tuer. Hado ne m’a laissé aucun choix, il n’en avait pas décidé ainsi… »

Se tuer… Oui, auparavant elle y avait songé, elle avait tenté de le faire, désespérée. Et finalement, elle était là, témoin de l’absurdité de sa vie, face aux preuves du suicide de son père tout aussi désespéré. Elle se mit à se demander si après ça il s’était sentit soulagé, s’il avait arrêté de s’en faire, s’il avait arrêté de souffrir de tout ce qu’il avait subit, s’il avait été libéré du poids de ne pas être certain que l’avenir soit meilleur. Quel avenir… Son regard s’assombrit, ses pensées aussi et elle demeura un moment silencieuse. Rien ne servait de s’apitoyer ainsi, de se demander si mourir ici et maintenant pouvait tout arranger. Une fois de plus sa vie ne lui appartenait pas… Elle avait eu envie de vivre ces derniers temps, elle avait imaginé un futur, mais ironie du sort cette fois-ci on ne lui réservait que la mort. Et cette fois-ci elle acceptait le verdict avec grand bonheur. A quoi bon se tuer, quelqu’un allait bien s’en charger d’ici peu. Peut-être même Rai lui même. D’ailleurs il était toujours là. Elle serra la bague dans sa main avant de la ranger dans sa poche. Il était temps de savoir le verdict. Peut être allait-elle mourir dans les 5 prochaines minutes. Comme si de rien était, elle reprit son masque précédent. Détachée et composée, tandis qu’elle rangeait de nouveau la boite.

« En vrai, la suite tu la connais plus ou moins… J’ai bien réussi à m’enfuir sur une tentative désespérée, et j’ai réussi grâce à l’aide d’un mafieux. C’est lui qui m’a tout appris et m’a recommandé les Leone… J’ai appris, je suis revenue pour découvrir le suicide de mon père. Tu étais même là quand j’ai découvert que j’aurais peut-être pu empêcher ça… Mais c’est un autre débat, une autre longue histoire. Dans tous les cas j’ai été régler son compte à Hado par la suite. C’était la meilleure partie, ou du moins le début… Ce n’est qu’après que j’ai rejoins les Leone. Et… Me voilà. Chez les Auditore »

Un léger rire nerveux s’échappa de ses lèvres. La boite retrouva sa place et elle en sortit une autre pour récupérer quelques armes lambda comme une arme à feu et quelques couteaux. Elle referma le tout et se retourna de nouveau en rangeant l’arme à la taille dans son dos. Ses yeux ne s’étaient toujours pas posés sur lui. Elle trouvait tout et n’importe quoi à regarder… Mais surtout et uniquement les taches de sang. Il ne lui restait plus qu’une chose à faire, lui faire ses demandes.

« Voilà tu sais tout Rai… Pardon, c’était long. Même trop long pour pas grand chose…. Maintenant libre à toi de me tuer ici ou plus tard. Sache juste que je continuerais ce dans quoi je me suis lancée avec toi, je ne peux pas rentrer chez les Leone comme ça. Et je te l’ai promis. »

Rentrerait-elle même un jour ? Elle en doutait fortement. Elle soupira et vint appuyer ses mains sur la table. Elle avait juré de l’aider, et elle tiendrait parole même si elle se sentait épuisée, moralement plus que physiquement.

« Dans tous les cas… Ce que j’ai à te demander après tout ça… C’est de continuer ton oeuvre à tous les domaines si ton plan marche si bien pour la mafia. Etends le aux pourritures comme Hado également… Car lui il n’avait pas d’anneau du tout, ni ses partenaires. Il n’était pas de la mafia. Voilà pourquoi je t’ai dis de me croire sur parole.. On peut très bien faire du mal sans ça, j’en suis la preuve vivante.. Alors. Quand je ne serais plus là ni aucun autre mafieux, fais moi cet hommage là, occupes toi d’eux… Et peut-être, au grand peut-être tout le monde pourra vivre heureux par la suite. »

Même si son ton avait l’air ironique, il n’en était rien. Elle n’avait pas envie de lui préciser, il était assez grand pour lire entre les lignes… Il n’y avait pas une énième provocation dans ses mots, juste une curiosité à vrai dire. Si tout éradiquer était si simple, si tout ne se résumait qu’à blanc ou noir.. Alors il pouvait bien tuer tous les meurtriers et manipulateurs de la terre. Vu comme ça, peut-être qu’aucune autre petite fille n’aurait à subir ce qu’elle avait vécu… Mais pourtant. Elle savait que ce n’était pas réalisable. L’humanité entière était condamnable. Même ses parents avaient forcément fait quelque chose un jour qui aurait justifié leurs morts et celle de leurs enfants… Peut-être était-ce ce qu’ils avaient fait à Hado. Cette idée lui glaça le sang. Il était temps qu’elle arrête de cogiter… Il était temps qu’elle en finisse pour de bon. Ses yeux s’arrêtèrent sur ses mains cette fois ci, puis elle les ferma. Elle tenait à cette dernière requête, depuis longtemps au fond mais elle ne l’avait jamais formulé, elle n’avait jamais songé avoir besoin de le faire à vrai dire, ou du moins pas de si tôt.

« Ma deuxième requête et dernière… Ramènes moi ici. Quand ça sera fini, quand je serais.. morte. Ramènes moi ici. Que ce soit ma dépouille ou des cendres, je m’en fiche… Ce qui sera le plus pratique. Mais je veux finir ici. »

Retourner auprès des siens… Voir les choses sous cet angle les rendaient moins terribles. Mais encore une fois c’était l’ironie du sort. Quand elle l’avait souhaité on l’en avait empêchée et désormais qu’elle n’en avait pas forcément envie, qu’elle commençait à avoir d’autres rêves… On l’en privait. Depuis quelques temps, elle s’était imaginé une vie, un futur. Elle s’était vue mourir autrement que seule et après une stupide mission. Elle s’était imaginée mourir de vieillesse, mourir aux côtés de Rai… Aimée, heureuse et ayant tellement vécu et traversé à ses côtés. Leur histoire n’avait rien eu du démarrage fleur bleue de celle de ses parents mais elle avait voulu rêver que cela pouvait venir par la suite. Au final, elle avait été bien niaise. Elle rouvrit les yeux et le regarda enfin, elle en avait besoin. A cet instant précis, à cette seconde ci, elle avait besoin de le voir, de se rappeler que ce qu’il s’était produit avant n’était pas un mauvais rêve, d’espérer qu’il lui dise qu’elle avait mal compris, que tout n’était qu’un malentendu… Et pourtant. Elle le regardait bel et bien, mais elle ne voyait plus que ce qu’elle venait de perdre. Tout était vrai, il ne voulait pas l’écouter, il voulait suivre son plan sans faire de concessions, il était prêt pour cela à la tuer… Qu’elle ne le gêne plus. L’horreur de la situation et de ses mots la frappèrent de nouveau et comme jamais de plein fouet, sublimés par le contexte et l’endroit où ils se trouvaient. C’en était trop, elle ne pouvait plus respirer, elle ne le voulait plus non plus. Quelque peu maladroitement elle se redressa, garda une posture impassible en apparence et le dépassa pour sortir de la cuisine. Elle ne lui adressa que quelques mots en passant à sa hauteur.

« On se retrouve à l’appartement ce soir… »

Elle partit, reprenant son habitude de courant d’air. Cependant, cette fois ci ce n’était nullement par jeu… Elle ne pouvait plus jouer, encore moins jouer la comédie. Il était libre de la tuer sur le champ alors qu’elle avait le dos tourné, elle s’en moquait éperdument. Il fallait juste qu’elle parte, qu’elle prenne de la distance, qu’elle s’isole, qu’elle s’écroule pour de bon... Ce n’était pas prévu à son programme de la journée mais elle allait devoir composer. Ce matin encore elle s’était imaginé un autre scénario… Elle avait songé à une toute autre après midi : quitter cette maudite maison, la bague en poche et main dans la main avec Rai, discutant déjà avec lui de ce qu’ils pourraient faire par la suite pour profiter de leur journée. Mizeria n’avait pas imaginé une seule seconde passer la porte plus seule que jamais et surtout la passer surement pour la dernière fois. Toujours avec cette maudite ironie collée au corps et à l’âme, la porte était restée ouverte le jour où elle était rentrée pour découvrir qu’elle avait tout perdu… Désormais elle partait en laissant la porte ouverte alors qu’elle allait tout perdre.



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MessageSujet: Re: What do I do because of you ?    What do I do because of you ?  EmptySam 9 Jan - 16:15



Dans les yeux de la vérité.
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Il la suivit placidement, toujours en veillant à éviter son regard, conscient du fait que la moindre étincelle risquait de faire vaciller sa résolution fraîche et trop peu ancrée en son âme. Sa volonté était encore chancelante, alors il se décida à la suivre en silence, en ne répondant pas tant qu'elle ne lui demandait pas de le faire ; ils parvinrent finalement devant une petite pièce qu'elle entreprit de desceller d'une façon fort peu orthodoxe. Il demeura en retrait, jusqu'à ce qu'elle commence enfin à déballer toute son histoire, la plus sordide qu'elle ait jamais vécu, celle qui avait forgé ses jeunes années.

Plusieurs fois, il eut l'intention de l'interrompre. De mettre un terme prématuré à son récit terrible et lourd, lequel avait l'air de la malmener rien que d'y penser. De lui signifier qu'il avait compris son point de vue, qu'il était prêt à l'adopter même. De la prendre dans ses bras, de lui murmurer des mots doux, de lui jurer qu'il ne laisserait plus personne lui nuire de la sorte. Que tout était fini, en somme, et n'appartenait à rien d'autre qu'au passé...
Mais il ne le fit pas. Parce qu'au fond de lui, le Nagafuse savait pertinemment que le passé de Mizeria, aussi dramatique puisse-t-il être, ne disqualifiait pas le sien. Leurs histoires étaient arrivées toutes les deux. Le nuire n'aurait eu aucun sens, y compris pour tenter de panser les plaies de sa chère et tendre, qu'il aimait fiévreusement, envers et contre tout. Cela n'aurait fait que déplacer ou repousser le problème. La vérité, c'était que même s'il souhaitait ardemment lui signifier qu'il était là pour elle, qu'il était une béquille sur laquelle elle pouvait se sentir libre de prendre appui, la crise aigüe que leur couple traversait ne l'autorisait pas. Ils devaient, cette fois-ci, s'affronter avec dignité et maturité... ils en ressortiraient grandis ou brisés. Mais ils n'en ressortiraient pas sans savoir parfaitement ce que l'autre pensait, jusqu'aux tréfonds de son âme. Ils avaient pénétré dans cette bâtisse en se cachant encore bien des informations, pourtant cruciales. Il avait appris qu'elle faisait partie des hautes strates de la famille Leone, et elle avait su qu'il aspirait à détruire la mafia sous toutes ses formes, y compris celles qui, a priori, avaient l'air bénéfiques au plus grand nombre. Ils se connaissaient mieux que la veille... mais, ironiquement, cela pouvait leur être fatal à tous les deux.

Il la laissa donc dérouler son récit, sans piper mot, sans broncher d'aucune manière, sans même esquisser le moindre geste à son égard. D'aucuns auraient qualifié sa conduite de tragiquement cruelle ; lui préférait au contraire y voir de la clémence et de la patience. La Balogh avait souhaité, par sa volonté propre, lui livrer cette page particulièrement sombre de son histoire. Ces événements ayant eu cours naguère et l'ayant marqué à tout jamais n'étaient pas de son fait, et il n'avait pas souhaité en prendre connaissance... Tant qu'elle souhaitait faire montre de sincérité sur ce point, il se devait de demeurer à l'écouter sans troubler son récit.
Et il demeura de marbre lorsque la porte s'ouvrit, lorsqu'elle mit la main sur une bague, lorsqu'elle indiqua par des gestes évasifs et souvent inconscients les tâches de sang qui parsemaient plafond et sol, comme des reliques indélébiles de tragédies qui n'auraient jamais dû survenir. Elle avait vécu une histoire au moins aussi traumatisante que le noiraud, Rai était bien incapable de le nier. De son côté, il avait eu la chance inouïe de vivre les pires drames ayant eu cours au sein de son existence durant sa petite enfance... il n'en gardait donc que très peu de souvenirs. Sa mère lui manquait, parfois. Son père, beaucoup moins ; il le tenait pour responsable. C'était beaucoup plus commode... beaucoup plus confortable. Cela étant, il savait que son manque ne pouvait pas être aussi acide, aussi corrosif et destructeur que celui de Mizeria. Il regrettait ce qu'il n'avait jamais connu, déplorait de ne l'avoir jamais vécu... Elle avait tout eu, et on lui avait tout pris, de la plus odieuse des façons. Leurs deux histoires étaient aussi injustes l'une que l'autre, pour sûr... mais le noiraud avait sans doute plus d'armes pour relativiser la sienne.

Puis la sentence vint, sous la forme d'une moralité à peine voilée qu'elle lui étala au visage sans faire montre d'une réelle pudeur, ou d'une délicatesse notable. Elle lui signifiait, en somme, que le crime existait sans armes ; ce qu'il ne pouvait évidemment pas nier. Ensuite, elle tâcha de lui signifier deux requêtes, auxquelles il aurait été mal avisé de ne pas donner suite... mais c'étaient des requêtes qu'il se savait incapable de mener à bien, dans l'absolu. Depuis qu'ils s'étaient aussi intimement liés l'un à l'autre, il avait compris une chose dramatique mais indubitable : il ne lui survivrait pas, pas longtemps. Si elle devait passer l'arme à gauche... il ne manquerait pas de la suivre d'assez près. Si elle voulait réellement éradiquer le mal sous toutes ses formes, et si elle voulait faire en sorte d'être inhumée dans cette maison, elle allait devoir veiller à le rendre possible par ses propres moyens.
Mais là encore, il ne se prononça pas. Pas tout de suite. Il n'en avait pas la force... pas la volonté. Il était comme un phare brisé, en panne, bien incapable d'envoyer sa lumière salvatrice vers le navire à la dérive qui l'appelait pourtant avec désespoir. Il avait besoin de temps... de vide. De réflexion. Tout ce qui avait eu lieu dans cette maison avait au moins le mérite d'ébranler la moindre de ses convictions... Il ne serait plus le même homme. Une fois encore, il se fit ce constat, définitivement bien juste : ils faisaient tout deux face à une fracture, et devraient apprendre à composer avec celle-ci, ou changer de destin drastiquement.

Puis elle partit, l'invitant à la rejoindre à l'appartement le soir-même. Serait-ce suffisant ? Ils n'avaient pas trop le choix. S'octroyer quelques heures de solitude, c'était déjà bien assez, compte tenu des circonstances dans lesquelles ils s'étaient retrouvés plongés à leurs corps défendant... Les Leone et les Auditore pouvaient continuer à les épier, pour s'assurer les uns et les autres de leur loyauté. Se séparer pendant plusieurs heures, c'était jouable... mais plusieurs jours ? Impensable, pas sans risquer d'attirer l'attention et les soupçons.
Alors ils devaient prendre une décision, et prompte. Faire en sorte de réfléchir aussi puissamment que possible à ce qu'ils pouvaient faire l'un de l'autre. Leur couple survivrait-il à cette crise ? Devraient-ils couper les ponts, une bonne fois pour toute ? Recommencer à se traiter en ennemis, envers et contre tout ce qu'ils avaient vécu jusqu'à présent ? Elle disait vouloir continuer à l'aider dans sa quête vengeresse, pour l'heure. Tiendrait-elle parole jusqu'au bout ? Si elle voyait une opportunité de lui tourner le dos... le ferait-elle ? Il aimait à croire que non ; mais il n'avait en vérité aucune façon d'en être absolument certain. Son pragmatisme pessimiste voire paranoïaque aurait eu tendance à l'encourager de la liquider sur le champ. En la mettant à mort, il pouvait facilement se racheter une pudeur auprès des Auditore, en leur annonçant qu'il avait été dupé, qu'elle était la responsable de l'espionnage des Leone... Il serait moqué, bien sûr, mais pardonné. Il était trop compétent et trop capable pour qu'on se passe indéfiniment de ses services, s'il était loyal.
Non. Cette idée odieuse ne pouvait pas germer. Il ne pouvait même pas la tolérer. Il secoua sa tête et se gratta les cheveux frénétiquement, la chassant de son esprit. S'il devait toucher ne fut-ce qu'à un seul cheveu de sa dulcinée, il savait qu'il ne s'en remettrait pas.
Qu'un autre cadavre viendrait se perdre au milieu de cette cuisine habitée par le malheur.

Finalement, il prit sa décision. Subitement, brutalement, sans crier gare. Il devait faire une chose avant de retourner à l'appartement... et il devait faire vite, si possible. D'un pas vif, il se dirigea vers la sortie de la maison et prit la peine d'en refermer la porte soigneusement, tout en sachant que Mizeria n'y mettrait probablement plus jamais les pieds de son vivant. Puis il se mit à arpenter les rues en cherchant une indication utile sur les panneaux de signalisation, voire en cherchant à mettre la main sur un taxi susceptible de le mener directement à bon port.
Elle n'était peut-être pas la seule à devoir affronter son passé.
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MessageSujet: Re: What do I do because of you ?    What do I do because of you ?  EmptyMar 19 Jan - 0:22

What do I do with you?
I look at you and I think of you even more


Et elle était partie. Sans se retourner. Du moins c’est ce que Mizeria avait fait sur les premiers mètres. Sans un regard en arrière elle avait passé le portail et débouché dans la rue. Néanmoins son coeur se serra fortement à ce moment là et l’envie soudaine de jeter un coup d’oeil à la maison lui prit. C’était surement la dernière fois qu’elle la verrait… Ce sentiment de fatalité l’assomma et manqua de faire basculer sa résolution, de la faire rebrousser chemin, de se jeter dans les bras de Rai et d’y pleurer de tout son soûl. Mais c’était impossible. Sans crier gare, la demoiselle se mit à courir. Elle ne pouvait pas se permettre de faire ça même si elle en avait envie. Et de quoi avait-elle réellement envie au final ? Dans sa course effrénée sans but précis ni direction, les différentes options défilaient devant ses yeux et le constat restait le même, elle n’avait envie de rien, ni que les choses s’arrangent, ni que tout s’arrête. Elle était juste vide. A bout de souffle, elle s’arrêta enfin les larmes aux yeux, haletante dans une rue résidentielle déserte, incapable de savoir où elle était, et incapable de retrouver son souffle ou encore son calme. Son esprit fumait. Qu’est ce qu’elle voulait ? A chaque esquisse de réponse, la même question surgissait : comment en était-elle arrivée là ? Comment en étaient-ils arrivés là tous ls deux ? Dans un accès de fureur et entre deux hoquets, elle hurla enfin et abattit son poing sur le mur le plus proche, ne manquant pas de mettre sa pauvre extrémité dans un sale état. Elle glissa lamentablement contre le mur en la tenant jusqu’à finir par terre. La douleur de sa main lancinait déjà et cette dernière virait au bleu, et pourtant il lui semblait souffrir d’un mal pire que celui-ci.

Elle s’était promis de ne pas craquer, de rester détachée, intouchable, brisée mais glaciale… Mais désormais qu’elle se retrouvait seule c’était quelque chose d’impossible. Elle fondit en larmes pour de bon, ramenant un de ses genoux vers sa poitrine pour y placer son bras et y cacher sa tête. Elle seule pouvait s’offrir du réconfort à cet instant. Personne d’autre ne pouvait l’étreindre et la cacher au creux de ses bras. Comme elle aurait aimé que les choses soient différentes pourtant, qu’elle puisse se laisser aller dans les bras de quelqu’un… Dans les bras de Rai… C’était tout bonnement impossible. Il était l’actuel responsable de son état, de sa détresse et visiblement il ne souhaitait pas l’en sortir. C’était bien cruel, il voulait la tuer mais ne souhaitait pas la soulager non plus au final… L’espace d’un instant elle songea qu’elle aurait préféré qu’il la tue sur le coup, dans cette maudite cuisine, que ce cauchemar s’arrête. Il avait songé à la tuer, il la plaçait après son macabre plan. Finalement il l’avait laissée parler, lui déballer toute son histoire et il était resté là, ne pipant mot, n’esquissant aucun geste à son encontre, ne lui promettant rien, ne lui répondant rien… Les larmes coulèrent de plus belle. Les rares passants qui virent le spectacle au fil des minutes n’osèrent rien faire, ou lui adresser la parole. Mizeria ne les remarqua même pas, elle se moqua même qu’ils puissent avoir un avis sur son état. Pour sûr la majorité devaient penser qu’il s’agissait là d’une pauvre fille, voir une autre junkie ou autre triste créature inconvenante car ce n’était clairement pas un comportement décent et normal de s’effondrer en pleine rue recroquevillée à pleurer… L’élégance anglaise se voulait plus réservée, plus pudique et demandait qu’on s’écroule en privé. De ce fait, pendant plusieurs dizaines de minutes, la demoiselle passa pour une fille paumée aux yeux de tous ceux qui la dévisagèrent avec l’air dérangé. Elle n’en eu cure.

Quand elle releva enfin la tête, ce ne fut pas par regain de calme ou de courage. Non, il n’y avait plus de larmes à verser tout simplement. Elle avait épuisé son quota. Quelques unes roulaient encore sur ses joues, dans leur dernière course. Son regard vide se posa sur les derniers passants interloqués, mais c’était comme si elle les regardait sans les voir. Elle fronça même les yeux, la lumière l’incommodait… Ce n’était que de vagues ombres qui passaient devant elle, sans visages. Dire que Ash avait réduit ses lunettes en charpie… Elle soupira en fermant les yeux. Il fallait composer entre les larmes et ses problèmes de vue à peine guérit. Ses lèvres s’ouvrirent légèrement et elle expira profondément. Sa main continuait de la lancer, comme si son coeur avait élu domicile et y battait encore bien lentement. Elle était encore en vie, elle avait encore des sensations. Le temps fila de nouveau sur ce constat avant que la jeune femme ne se lève enfin et se mette à marcher. Une fois de plus, sans but, sans direction. C’était comme si elle avait été mise en pilotage automatique, ses jambes fonctionnaient mais le reste était moins sûr. Tel un robot, elle progressait dans les rues avec pour seule compagnie, des regrets et des brides de souvenirs.

Les heures filèrent, ses idées noires et nostalgiques aussi. Elle n’avait rien à faire, elle n’arrivait plus à réfléchir. La seule chose à laquelle elle pensait était sa journée. La marche était prévue, mais non seule et désespérée. Elle aurait aimé passer cette après midi avec Rai, profiter d’un moment en couple le plus simplement du monde… Avoir droit pour une fois à la banalité. Plus d’une fois, le jeune couple avait été confronté à des ennuis qui avaient cassé leur quiétude et leurs instants complices.. Mais il lui semblait que cela n’avait jamais été d’une telle violence et de plus jamais aussi rapproché. Ils étaient à peine remis sur pieds et loin des Auditore qu’ils se déchiraient… Avait-elle raté des signes annonciateurs avant cette journée ? Toutes les embuches qu’on avait mis sur leurs routes étaient-elles d’ailleurs des avertissements pour les empêcher d’aller plus loin ? De se mettre ensemble ? Où serait-elle si elle n’avait jamais rencontré Rai ? Fatigués, ses pieds s’arrêtèrent enfin… Mizeria avisa un banc non loin et s’y dirigea. Son esprit restait en ébullition. D’un oeil vide elle jeta un coup d’oeil au ciel se rendant enfin compte de l’heure avancée qu’il devait être… C’était pour dire à quel point elle était déboussolée. Elle ignorait combien de temps elle avait marché ni où diable elle pouvait bien se trouver exactement… Toujours dans la même ville mais du reste… Elle connaissait les lieux mais elle était bien incapable d’analyser la moindre chose dans son état actuel. Mizeria était telle une poupée, cassée, figée et fonctionnant purement mécaniquement… Il y avait bien sa tête certes, à l’intérieur l’histoire était différente mais elle tentait au plus possible d’enfouir cette partie d’elle qu’elle commençait à décréter inutile. Son regard aurait pu se vider d’avantage si cela avait été possible. Cependant, une interruption arrêta le processus.

« Qu’est ce que tu fous là toute seule ici. »

L’ancienne Leone fronça les sourcils et darda l’intruse qui venait de lui adresser la parole d’un regard mauvais. Elle ignorait qui était cette fille mais elle lui parlait trop familièrement à son goût et surtout avec une animosité beaucoup trop palpable et aucunement voilée. La blonde fronça les sourcils en la voyant s’approcher, et elle se fit plus attentive en voyant trois ombres la suivre de près… A quatre contre une ? Voilà qui semblait bien déloyal…

« Oh je te parle Leone.

- Le terme exacte ne serait-il pas ex-Leone.
- Elle reste une putain de Leone à mes yeux. »

Elle ne pipa mot et balaya la scène qui se déroulait devant ses yeux d’un regard méfiant. Ils n’étaient pas n’importe qui… Et pourtant ils ne lui disaient rien. La virulente jeune femme qui lui faisait face ne lui disait rien, que cela soit ses cheveux bruns ou ses yeux bleus.. Et elle se serait rappelée d’une telle fille, elle était plutôt jolie mais le plus frappant chez elle était ce qu’elle dégageait.. Tant de haine et Mizeria pouvait sentir son envie d’en découdre. Elle la dévisageait avec rage et elle ignorait bien pourquoi… Pour les autres, uniquement des garçons. Un rouquin et un noiraud, le troisième bien planqué sous une capuche malgré sa précédente intervention. Mizeria fronça les sourcils, ils avaient l’avantage de la connaitre quand elle ne pouvait pas savoir à quelle faction ils appartenaient… Néanmoins elle le devina sans mal…. Des Auditore à coup sûr. C’était la seule réponse plausible. Mais qu’est ce qu’ils venaient faire ici ? Le jeune couple était sensé avoir carte blanche le temps de leur convalescence ici, ils ne devaient pas être suivis par les Auditore et encore moins être chaperonnés. Sa méfiance monta en flèche et se transforma même en inquiétude. Pourquoi étaient-ils ici face à elle ? Avaient-ils été là depuis le début ? Le pire la frappa de plein fouet. Et si ils avaient vu tout leur échange avec ses anciens coéquipiers ? Elle en pâlit à l’idée et remercia l’obscurité qui permettait de cacher cet état de fait. Néanmoins elle ne se démonta pas, elle ignorait également pourquoi ils s’en prenaient à elle si frontalement et si odieusement. Surtout la fille. Ce n’était pas le jour pour lui chercher des noises et celle ci venait de tomber en disgrâce à ses yeux.

« - C’est Mizeria. Pas Leone et encore moins putain de Leone.
- Putain de Leone ça me va bien.
- Très bien… Donc que me vaut cette visite, putain d’Auditore ? »

La brune qui lui faisait face vira au cramoisi, non pas par gêne mais par énervement. Mizeria lui sortait par les yeux et cette dernière ne comprenait en rien pourquoi mais ça l’excédait au plus au point sans oublier qu’elle n’était pas d’humeur. Elle regarda l’autre jeune femme foncer sur elle comme une furie sans ciller.

« - Aria arrête…
- Je te conseille de la fermer… Et vite. Tu resteras une putain de Leone à mes yeux peu importe que tu sois bonne actrice ou pas. Surtout quand tes chers copains Leone s’autorisent comme par hasard une petite virée ici. Etrange hein. C’est toi qui a voulu venir à Londres et tes copains ont eu la même idée soudainement au même moment ? Je ne te fais pas confiance, et je pense que tu te fous de nous et de Rai… Tu voulais voir tes potes Leone pour leur filer des infos c’est ça ? »

Mizeria ne cacha pas sa surprise et ouvrit la bouche un instant puis la referma. Cette fameuse Aria avait réussit à lui couper l’herbe sous le pied… Et plonger la blondinette dans un doute des plus horribles. Ils savaient pour Ash, Akio, Gabriel et June… Ils avaient été repérés. Milles questions se succédèrent dans sa tête. Elle voulait savoir à quel moment ces idiots s’étaient faits remarquer, si ils avaient été attrapés après leur rencontre, voir s’ils étaient en vie… Elle avait envie de les tuer tous les quatre sur le champ de ses propres mains. Les idiots… Elle leur avait appris à faire mieux que ça en tant qu’espions et voilà qu’ils se faisaient remarquer non seulement par elle mais par les Auditore. Leur bêtise venait peut être de leur couter la vie. Un léger vent de panique s’installa en son sein puis elle se mit à relativiser. Non ils ne pouvaient pas être morts ou attrapés… Ils se seraient fait un plaisir de lui dire, ou du moins de laisser filer l’info par inadvertance… Cette déduction lui permit de reprendre du poil de la bête. Restait un autre sujet assez épineux… Avaient-ils été témoins de leur rencontre dans la maison ? Mizeria était plus incertaine sur cette partie là, ils n’étaient pas idiots non plus quant à la présence des Leone en même temps qu’elle à Londres. Il ne servait à rien de mentir… Juste d’en dire le moins possible. Mais de la même manière que précédemment, elle en déduisait qu’ils ne savaient rien sinon ils l’auraient directement mise hors d’état de nuire.


« C’est vrai…. Et je les ai biens vus. Ils nous ont trouvés en début d’après midi. Mais si vous étiez vraiment bien renseignés vous sauriez que Rai et moi les avons mis en fuite… »

La blonde avait bel et bien retrouvé son calme mais c’était désormais aux quatre mafieux lui faisant face de se tendre… La tension était palpable, sa réponse ne leur plaisait guère. A vrai dire, ils ne savaient quoi en faire. D’un côté ses révélations étaient inquiétantes et confirmaient leurs soupçons, de l’autre elle avait été tellement franche qu’ils pouvaient lui donner le bénéfice du doute et concevoir qu’elle les avait vraiment mis en fuite… Sinon pourquoi le leur dire ? Ils se regardèrent à tour de rôle et Mizeria demeura parfaitement calme. Elle comptait justement sur cette sincérité pour les amadouer. Elle jeta un coup d’oeil discret à Aria, elle pouvait espérer convaincre les trois hommes. La jeune femme restait une autre paire de manche. Leur manque de réaction confirma à la blonde qu’ils n’étaient pas au courant de leur échange… Elle remercia les cieux que les Auditore ne semblent finalement pas plus compétents que les quatre idiots qui lui servaient de subalternes… Elle avait trop de chance sur ce coup ci. Et ce n’était jamais un bon présage.. Le revers n’allait surement pas tarder, ou bien l’avait-elle déjà essuyé à travers les paroles de Rai.

« Et où est Rai ? »

Mizeria se tendit à la mention de son amant et planta son regard dans celui de la dénommée Aria avec un air de défi. Elle ne souhaitait pas en parler, encore moins que quelqu’un d’autre le fasse. Juste entendre la brune prononcé le nom de son amant lui avait filé la chair de poule, une réaction épidermique au plus haut point.

« - Il doit être à l’appartement.
- Il doit ? Vous devriez être ensemble. Pourquoi ce n’est pas le cas ?
- Parce que.
- Réponds.
- Fous moi la paix et dégagez… Ça ne vous regarde pas
- Réponds. Immédiatement.
- Laisse-moi-tranquille. »

Les trois hommes commencèrent à se jeter des coups d’oeils. La tension montait entre les deux demoiselles et les choses n’allaient pas tarder à s’envenimer. Ni l’une ni l’autre ne pouvait concevoir avoir une discussion posée et platonique. L’ancienne Leone se sentait agressée et appréciait peu ces intrusions dans sa vie et encore moins ces questionnements sur Rai. Quant à la brune, la fameuse Aria, elle semblait vouer une haine sans nom à l’autre jeune femme. Bientôt il aurait pu être impossible de délimiter qui avait commencé quoi. Aria attrapa le chemisier de Mizeria sans crier gare et cette dernière regarda avec dédain sa main puis son visage successivement.

« - Je te laisserais tranquille quand je l’aurais décidé Leone. Je te préviens.. T’as pas intérêt à nous la faire à l’envers. Et encore moins à essayer d’utiliser Rai. Si tu lui causes le moindre tord de nouveau je te bute. Je ne sais pas ce qu’il te trouve vraiment, tu n’as rien et tu lui as fais perdre sa place de gardien. Du pur gâchis pour une idiote pareille…
- Je t’ai dis de me lâcher. Et ce que je fais à Rai ne te concerne pas… Je sais très bien m’occuper de lui toute seule, tout comme lui plaire… Contrairement à toi on dirait. Reste à ta place et j’en ferais de même. »

Aria écarquilla les yeux face à l’air amusé de Mizeria. Les secondes semblèrent durer une éternité. Mizeria avait compris.. Au fil de la tirade, elle avait enfin saisit le noeud du problème. Elle ignorait qui était cette Auditore mais elle avait sentit trop de dévouement venant de sa part envers son amant. La jalousie avait fait le reste… Ou quelque chose qui s’en rapprochait elle ne saurait dire. Elle en voulait à Rai mais elle dépréciait fortement que quelqu’un lui parle de la sorte et puisse s’intéresser autant à lui. Ce n’était pas son genre de parler comme ça ou de tomber dans de telles provocations mais elle n’avait plus réfléchit. Elle voulait chercher les ennuis en disant exactement ce qu’il ne fallait pas et tenter d’énerver cette Aria autant qu’elle avait finit par l’énerver elle. Elle avait besoin de passer ses nerfs sur quelqu’un. Et c’était un succès. Elles se dévisagèrent un instant avant que l’Auditore prise de rage n’assène une bonne droite à l’ancienne Leone dans l’optique de la corriger.

Mizeria encaissa et prit ce coup pour un signal. Au fond c’était tout ce qu’elle cherchait… Qu’on la frappe en premier pour qu’elle n’ait plus qu’à répliquer. Elle avait comme une envie de sang sur le moment, un besoin d’en découdre, d’évacuer tous ses ressentiments sur quelqu’un et le tout était sublimé par son inconscience. A cet instant elle s’en moquait d’encaisser des coups ou d’être battue à mort dans ce parc… Elle s’en moquait éperdument et trouvait même que ça pouvait lui rendre service. Elle avait besoin de faire mal et d’avoir mal pour oublier toute cette journée. L’ex-Leone ne tard pas à répliquer. Elle lui rendit la même droite dans la mâchoire alors qu’elle sentait déjà le goût ferreux du sang dans sa bouche. La dénommée Aria n’avait pas besoin de plus également. Les coups s’enchainèrent entre les deux jeunes femmes, sans aucune retenue, visant les arcades, les mâchoires, les nez, les côtes, le ventre… Comme deux hommes primitifs elles se cognèrent de toutes leurs forces avant que les trois autres Auditore, choqués de leurs réactions, ne décident d’intervenir. Deux sur les trois se jetèrent dans la mêlée, l’homme à la capuche décidant toujours de rester en retrait. Les deux hommes bloquèrent évidemment Mizeria pour venir en secours à leur collègue, cette dernière y vu une occasion d’avoir l’ascendant et d’achever son ennemie et non de s’arrêter pour se préserver. Elle en profita pour la ruer de coups sans avoir à s’inquiéter d’une quelconque réplique puisqu’elle en était incapable malgré tous les efforts qu’elle faisait à se débattre en vain.

« Tenez la je vais la…

- Aria. Ça suffit. »

Et tous s’arrêtèrent. L’homme à la capuche avait parlé, il ne semblait pas être plus haut gradé qu’eux mais ils l’écoutaient religieusement… Aria vociféra de nouveau quelques mots mais se recula tandis que les deux autres relâchèrent Mizeria après s’être assurés qu’elle manquait bel et bien de force pour répliquer de plus belle. Cette dernière resta un moment par terre à se tenir les côtes. Sa tête tournait et elle pouvait déjà sentir les multiples contusions… Allait-elle enfin tourner de l’oeil et mettre son cerveau sur pause ? Elle avait encore envie de frapper l’Auditore, de chercher les limites, de peut être frôler la mort pour être délivrée. Mais son corps lui refusa ce luxe. Il ne pouvait plus. Certes elle avait réussit à mettre son adversaire dans un piteux état mais elle avait subit suffisamment de dégâts. Sa main déjà amochée n’allait pas mieux d’avoir cogné aussi fort. Son visage avait également subit les dégâts de leur échange, sa lèvre était tuméfiée, un coquard commençait à pointer le bout de son nez comme plusieurs bleus. Et pour finir ses côtes avaient dégustées… Pour sur sa cage thoracique n’allait pas tarder à être violacée aussi. Le pire restait sa tête, sonnée, partagée entre la douleur et visiblement trop fraichement remise de ses précédentes batailles.

Face au silence qu’avait instauré le dernier Auditore, elle leva enfin les yeux et les dévisagea vaguement… Qui était-il pour arriver à les rappeler à l’ordre de la sorte ? Surtout pour couper Aria dans un début de folie meurtrière. La blonde regarda d’ailleurs la jeune femme et se sentit assez satisfaite de lui avoir refait quelque peu le portrait.. Elle était actuellement entrain de pester avec un de ses collègues que la « putain de Leone » venait de lui péter le nez. La blonde s’était peut être acharnée à le lui casser, elle devait l’admettre. Même si elle n’était pas du tout en meilleur état. Elle se remit assise en réprimant une grimace et un gémissement, elle ne ferait pas ce plaisir à la brune qui semblait déjà vouloir lui sauter de nouveau à la gorge.

«-  Je te préviens ce n’est qu’un avant gout de ce qui t’attends si tu poses le moindre problème à Rai. Je te l’ai dis un seul pas de travers et c’est moi qui t’achève.
- Rai par ci Rai par là… T’es sa mère ou quoi. 

- Toi… Espèce de….
- Aria. »

Nouvelle intervention de l’homme encapuchonné tandis que les deux femmes commençaient de nouveau à s’empoigner. Cette fois ci il daigna bouger et les sépara même, les faisant lâcher prise sur le col respectif de l’autre. Mizeria l’avait attrapé par réflexe, pour répondre à l’attaque même si elle était sonnée. Qui était Aria pour vénérer Rai à ce point ? Et qui était cet homme à la capuche ? Au final c’était la jeune femme qui l’intéressait le plus. Elle dévisagea cette femme qu’elle n’avait jamais vu, dont elle n’avait jamais entendu parler alors qu’elle était entrain de la traiter de tous les noms devant ses collègues. Elle n’entendait même pas toutes les insultes qu’elle lui dédiait ni ce que l’homme à la capuche semblait lui dire, tellement elle était absorbée à se poser des questions. Elle la détestait depuis le début, mais désormais plus encore. Son instinct lui criait que quelque chose n’allait pas… Aria semblait vouer une adoration sans faille à Rai, beaucoup trop. Bêtement, la blondinette se sentit un moment menacée… Et si il la tuait et la remplaçait par elle ? Elle n’était pas la seule à l’aimer, et elle était plus que remplaçable si il arrivait à la considérer gênante. Aria avait le mérite de vouloir le soutenir dans ses plus sombres méfaits. Elle, elle ne s’interposerait surement pas tellement à son plan, il n’aurait pas à songer à la tuer. Son coeur sombra de nouveau.

«- Tout allait bien avant qu’elle débarque ! Il a commencé à disparaitre à ce moment là j’en suis sure.  Puis qu’est ce qu’il lui trouve ? Il en a perdu son titre de gardien et il aurait déjà pu se faire tuer. Tout ça pour cette trainée.. Elle ne nous apportera rien de bon, autant s’en débarrasser au plus vite.
- Rai est un grand garçon et techniquement ton supérieur Aria, reste donc à ta place… Ca ne te ressemble pas de t’énerver ainsi. Et que tu ne l’apprécies pas ne change rien, on est là pour veiller au grain et sur eux deux. Nous allons la ramener. »

Mizeria ne vit même pas les regards se tourner vers elle, elle le leur rendait pourtant sans être vraiment là. Elle n’avait plus envie d’échanger avec eux, tout était trop flou. Elle ignora comment mais bientôt elle se retrouva à marcher dans la rue en leur compagnie, ou plutôt presque comme leur otage. L’avaient-ils remise sur pieds ? Surement, puisqu’elle marchait même si elle ignorait comment elle arrivait à le faire. Elle était encore trop sonnée. Malgré ça, une fois de plus elle ne montra rien. Elle poussa même la prouesse en faisant face à Aria à chaque fois que celle ci semblait vouloir reprendre leur combat. Leur progression s’en trouva davantage pénible, surtout pour les trois autres. Le seul point positif était qu’ils savaient où ils se trouvaient et où ils devaient se rendre.. Cela enlevait une épine du pied à Mizeria. Très vite ils se retrouvèrent devant la petite maison qu’ils avaient loués, l’endroit qui aurait du être un nid douillet l’espace de quelques jours pour le noiraud et sa blonde. Et voilà qu’ils avaient eu le plaisir de la visite d’une délégation Leone et Auditore.. Et quelles visites.

« - Il est là c’est bon vous pouvez partir et rentrer gentiment à la niche.
- Ferme là, on est venus voir Rai avant tout. On t’a juste trouvé en premier… Et crois moi que j’aurais préféré que ça ne soit pas toi ou bien te trouver morte.
- Charmant. Si tu veux on peut toujours régler ça par ta propre mort. Pas sur que tu manques à Rai. »

Une fois de plus les deux jeunes femmes se firent face, les poings serrés, se dardant l’une et l’autre avec un regard mauvais, un air de défi. Le reste n’existait plus. Aucune d’elles n’avait remarqué qu’un des Auditore venait de toquer à la porte, encore moins que les autres leur demandaient de se calmer de nouveau. Même la nouvelle sommation de l’homme à la capuche ne leur parvint pas cette fois-ci. Elles avaient juste envie de se jeter à la gorge l’une de l’autre et qu’il n’en reste plus qu’une. Mizeria fermait à peine la main qu’elle avait abattu contre le mur quelques heures plus tôt, mais elle pouvait sentir ses ongles s’y enfoncer du mieux qu’ils pouvaient. Elle était encore sonnée mais sur la défensive malgré tout, à l’affut du moindre pas de travers qu’Aria pourrait esquisser.

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MessageSujet: Re: What do I do because of you ?    What do I do because of you ?  EmptyJeu 21 Jan - 12:49



Dans les yeux de la vérité.
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Sa promenade crépusculaire s'était avérée moins longue qu'il ne s'y attendait. Deux heures après son départ de la maison marquée par le crime, il était de retour devant l'appartement qu'ils avaient loué, lui et sa belle, avec des intentions optimistes, voire naïves. Il s'en était passé des choses, depuis qu'elle s'était engagée auprès des Auditore pour garantir leur sécurité à tous les deux... Un soupir lourd le vida de toute énergie, et il dut se contraindre à prendre la poignée de porte aussi fermement que possible dans l'optique de l'ouvrir, le tout en tendant soigneusement l'oreille, afin d'anticiper la potentielle présence de Mizeria à l'intérieur. Il savait ce qu'il avait à lui dire et, grosso modo, il savait comment le lui dire. Mais de là à imaginer que cela le réjouissait... Le noiraud savait pertinemment que toutes les promesses et que toutes les excuses du monde ne suffiraient pas à gommer cette soirée chaotique qu'ils venaient de connaître. Ni de sa part, ni de celle de la jeune femme. Ils s'étaient révélés des choses qu'ils auraient mieux fait de continuer à taire, pudiquement. Leurs vérités les plus sordides avaient été révélées à l'autre. Et ils avaient manifestement compris, l'un comme l'autre, qu'ils sous-estimaient grandement les dommages que leurs âmes malmenées et atrophiées avaient pu subir avant qu'ils ne se rencontrent.
Il referma la porte derrière lui, en constatant qu'elle était encore absente. Il se débarrassa de ses affaires les plus encombrantes, déposa deux morceaux de papiers sur une table basse et se laissa choir dans le fauteuil le plus proche, à bout de nerfs et d'énergie. Son corps avait besoin de dormir... mais son esprit, lui, le lui interdisait bien évidemment. Il se devait d'attendre qu'elle rentre, pour enfin lui répondre. Il s'était fait violence, dans la cuisine de l'ancien domicile des Balogh, afin qu'elle puisse se sentir libre de tout déballer sans souffrance supplémentaire... Il n'attendait dorénavant plus qu'une seule chose : qu'on lui offre enfin une chance de s'exprimer, de poser des mots sur ce qu'elle avait vécu, et sur ce qu'il en pensait, en finalité.

Il dut pourtant perdre du terrain face à l'épuisement, car il ne se réveilla qu'une poignée de minutes plus tard, en sursaut, en entendant qu'on cognait à la porte. Il fut instantanément aussi intrigué que suspicieux. Si c'était Mizeria, pourquoi se sentait-elle obligée d'annoncer son arrivée de la sorte ? Cela ne lui ressemblait guère, même en imaginant qu'elle ait été hautement perturbée par leur échange, hypothèse qui n'avait en l'occurrence rien de farfelu. Elle aurait plutôt été du genre à entrer en silence, quitte à se frayer seule un chemin jusqu'à la chambre à coucher, sans le confronter... L'espace d'un instant, le Nagafuse se mit à craindre qu'il s'agissait d'un traquenard, monté à la hâte soit par ses anciens compagnons Leone, frustrés de ne pas avoir eu gain de cause, soit par Mephisto et ses séides, en quête de vengeance. Il entreprit néanmoins de réunir tout son courage et de se relever avec autant de fierté qu'il en était capable, comme si son corps, épuisé, n'était pas à deux doigts de s'effondrer ; dans les deux cas, il était dans la merde, et ce n'était pas une simple porte de bois qui le protégerait. Il se dirigea ainsi jusqu'à l'entrée de l'appartement et l'ouvrit sans concession ni délicatesse, plongeant immédiatement son regard dans ceux, multiples, des nouveaux arrivants.

-...

Il ne connaissait que trop bien ces visages. Ils lui étaient familiers... Tous. Y compris celui de la jeune femme tristement amochée, que ces types avaient raccompagné jusqu'à lui. Mizeria était dans un piteux état... Et Rai n'avait pas besoin de réfléchir beaucoup pour trouver un coupable tout désigné. Mettant momentanément de côté leurs heurts précédents, imaginant qu'ils auraient d'autres occasions plus propice à la discussion, il se rapprocha de sa chère et tendre et passa immédiatement son bras sous son épaule, afin de lui offrir un appui stable et digne de ce nom. Sans un mot pour les nouveaux arrivants, il entreprit alors de la faire entrer, jusqu'à ce qu'Aria, la plus impatiente des quatre, n'ait la sottise de se faire entendre de sa voix irritante.

-Putain, on en est là ? Tu pourrais au moins nous dire bonjour, on existe encore et...
-La ferme. Ferme-la tout de suite.

Elle tressaillit, de concert avec les trois autres Auditores présents. Le noiraud relâcha légèrement sa pression sur Mizeria, s'assurant qu'elle tenait encore suffisamment debout avant de définitivement lâcher prise, et fit volte face pour planter un regard incandescent dans celui, bercé d'incompréhension et de stupeur, de la jeune criminelle.

-Je te déconseille de moufter. La prochaine fois que tu l'ouvres, t'en prends une.
-Rai... on te respecte beaucoup mais t'as vu l'état dans lequel t'es ? T'as même plus ta bague, nous menace pas...
-Contrairement à vous, Diego, j'ai pas besoin d'armes pour tuer des connards. Reste à ta place.

Le prénommé Diego s'était fait entendre à mi-voix, comme s'il savait qu'il allait écoper d'un sévère rappel à l'ordre... et cela n'avait pas manqué. Les deux autres hommes, y compris celui à la capuche, ne manquèrent pas de tenir les rangs et de ne faire aucune vague. Même si les derniers épisodes de Venise avaient pu chambouler l'ordre établi, rares étaient ceux qui ignoraient, au sein des Auditore, que leur famille devait beaucoup à l'ancien gardien du désert. La réputation du noiraud était à la fois semblable à celle de certains de ses collègues et totalement unique : il était connu comme un électron libre, un chien fou partiellement incontrôlable mais terriblement efficace. Et rares étaient également ceux qui ignoraient qu'il ne proférait jamais une menace gratuitement... Avec le temps, il avait su se faire une place de choix au sein de la hiérarchie primitive des Auditore, tant et si bien que même le gardien de la tempête, pourtant autrement plus autoritaire, n'inspirait pas autant de méfiance que le maître des illusions et de la manipulation.
Une fois l'affaire entendue, le noiraud décerna à ses quatre sous-fifres un bref signe de la tête, plus sec que cordial, et s'en retourna auprès de sa chère et tendre. Il fut néanmoins coupé dans sa procession par la voix de l'homme encapuchonné.

-T'as raison, Rai. Ils connaissent pas leur place. Moi, si.
-Alors tu devrais savoir que vous avez rien à foutre ici. On est censés être là incognito. Mephisto vous connaît, putain. Vous croyez sérieusement qu'il va continuer à ignorer où on se trouve si la moitié de la mafia vénitienne se prend soudain d'intérêt pour Londres ? Vous êtes un sacré tas de connards, si c'est le cas.

Son vocabulaire de charretier en disait long sur son état psychique. Il était épuisé, et n'arrivait plus à feindre la délicatesse, la finesse d'esprit qu'il témoignait habituellement. Il en avait marre de prendre des gants, de faire des détours, de jouer à l'obséquieux, à pisser dans des violons... Le Nagafuse imaginait sans peine que dès le lendemain, les batteries rechargées par une bonne nuit de sommeil, il se sentirait davantage capable de reprendre le rôle qui avait longtemps été le sien. Mais ce soir ? Cela ne concordait pas avec son humeur du moment. Clairement pas.
Il fit une nouvelle fois volte-face, planta son regard dans celui de Dario.

-Je sais. Mais justement. Je me méfie de ce type. Seuls, vous êtes en danger. Nous quatre, on peut...
-Nous accompagner ? Nous défendre ? Nous materner, peut-être ? Vu l'état de Mizeria, tu m'excuseras d'en douter.
-C'est Aria qui...
-Ah, c'est acté, t'es plus capable de l'arrêter quand elle devient subitement encore plus conne que d'habitude ? Je me demande comment tu vas faire pour tenir tête à Mephisto, du coup.
-J'ai pas...
-Toi, je t'ai pas donné la permission de l'ouvrir à nouveau.

Le noiraud pointa son index menaçant droit vers la jeune femme, qui ferma la bouche immédiatement après l'avoir ouverte en bredouillant quelques mots censés lui servir d'excuses. Dario poussa un soupir en enfonçant ses mains dans ses poches, et en se renfrognant légèrement ; puis il sembla en avoir assez de ronger son frein, à son tour.

-Je comprends pas, Rai. J'ai toujours tout fait. Tout ce dont t'avais besoin. J'ai toujours été là pour toi. Je t'ai toujours secondé, du mieux que je l'ai pu. Diego, Aria et Tino aussi. On est pas aussi intelligents que toi, je dirai pas le contraire. Mais putain ! Tu peux pas dire qu'on se soit pas défoncés pour toi...
-Ce n'est pas la question.
-Pourquoi ? Pourquoi ça le serait pas ? C'est quoi, la raison qui fait que tu refuses de me faire confiance ? Tu m'as jamais rien dit. Rien de rien. Je dois juste avancer à l'aveugle, quand tu acceptes de me filer des directives... Des fois, tu disparais pendant six mois, et j'ai aucune nouvelle. C'est intenable. Comment je suis censé t'épauler dans ces conditions, merde ?
-Demande-le aux Ciels.

La réponse laconique et particulièrement antipathique de Rai poussa Dario à arquer un sourcil, décontenancé. Il demeura muet, au même titre que ses trois collègues, jusqu'à ce que l'ancien gardien du désert ne réponde, toujours avec la même froideur et la même brièveté.

-Je te l'ai dit, dès le premier jour. C'était leur idée. Non... c'était leur ordre. Je devais te prendre comme second, point. Si ça ne te convient pas, grand bien t'en fasse : va te plaindre aux responsables de cette situation, et laisse-moi tranquille.
-C'est trop.
-Aria...
-Non, c'est trop ! Si tu veux me buter, je m'en fous. Tu le feras après. Mais tu vas m'écouter. On sait que t'es pas n'importe qui. On ignore tout de toi mais... putain, on te respecte, on te respecte vraiment ! On t'idolâtre, même ! T'es tout ce dont les Auditore ont jamais eu besoin. T'incarnes le lieutenant parfait... Silencieux, indépendant, actif, rusé. T'as tout pour toi, et on te suivra jusqu'en enfer... Pourquoi tu nous traites comme si on était des ennemis ? Et... Et pourquoi à elle, tu lui fais confiance ? Alors qu'elle t'aurait planté un couteau dans le dos y a pas six mois si sa boss le lui avait demandé ?

Cette fois, la menace voilée du Nagafuse ne parvint pas à réduire Aria au silence. Celle-ci, dans un éclat de voix vif et clair, se mit à lui répondre avec un emportement qui lui ressemblait bien. Elle était aussi italienne que bon nombre de ses collègues, et ainsi tout-à-fait apte à céder à ce type de pulsions si on la sollicitait un peu trop virulemment... Rai ne s'en étonna donc pas, sur le papier. Le sens de ses mots, en revanche, fut autrement plus douloureux à encaisser. Il avait l'impression, encore une fois, de revivre un ersatz de ce qu'il avait vécu un peu plus tôt dans la journée, avec Mizeria. C'était sans doute le poids de la vie secrète qu'il avait choisi de mener...
Pour autant, y avait-il une autre issue, avec eux ? Non. Diego, Aria, Tino et même Dario, ils n'étaient pas différents du mafieux moyen. Ils étaient égocentriques, sans pitié, capables du pire. Et ils n'admiraient pas suffisamment Rai pour le suivre jusqu'au bout du chemin. Aria potentiellement mise-à-part, à cause des sentiments évidents qu'elle avait développé à son encontre, ils freineraient tous des quatre fers s'ils devaient apprendre qu'il rêvait en réalité de défaire tout ce que les Auditore avaient pu construire jusqu'à présent. Ils ne le suivraient jamais. Pas jusqu'au bout. Ils pouvaient être utiles pour mettre à mort les Van Sidéris... mais cela s'arrêterait là, cela n'irait jamais plus loin.

-... Rentrez à Venise.
-Mais...
-Rentrez à Venise. C'est un ordre.
-Venez... On s'en va.
-Dario, t'es pas sérieux ?
-On s'en va, j'ai dit. Rai... Si... Si tu changes d'avis, tu sais où me trouver.

D'un simple signe de la tête, Rai acquiesça et le congédia silencieusement. Les quatre mafieux s'en firent, à leur tour sans un mot, même si Aria demeura statique un plus long moment ; elle balada son regard sur Rai, puis sur Mizeria, avant de serrer les crocs et de partir, furibonde comme jamais. Tant pis si elle développait une rancœur amère à son encontre : dans le fond, le Nagafuse n'avait jamais attendu d'elle qu'elle s'amourache de lui. Il ne prenait même aucun plaisir à constater qu'elle s'enfermait dans ces sentiments sans constater que leur histoire était impossible, et qu'il ne ressentait rien la concernant… Il ne haïssait pas au point de jubiler à chaque fois qu'il causait de la souffrance chez les criminels, a fortiori chez ceux qui avaient toujours tout mis en œuvre pour le satisfaire.
Sur ces entrefaites, le noiraud refermerait la porte derrière Mizeria et lui, avec une lenteur absente, comme s'il était obnubilé par le fil de ses pensées... ce qui était probablement le cas, en vérité.
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MessageSujet: Re: What do I do because of you ?    What do I do because of you ?  EmptyVen 22 Jan - 1:16

What do I do with you?
I look at you and I think of you even more


Mizeria ne se rendit même pas compte que la porte de l’appartement qu’elle partageait avec Rai venait de s’ouvrir. Elle se tenait là, face à Aria, prête à un deuxième tour et surtout prête à se battre à mort s’il le fallait. Elle avait occulté le reste, tout comme son adversaire apparement. Les deux femmes se fixaient d’un air mauvais et attendaient le moindre faux pas de l’une ou l’autre pour passer à l’action. La blonde ne remarqua pas non plus que les trois autres Auditore étaient devenus silencieux et ne regardaient plus que la seule et même personne. Elle prit véritablement connaissance de la présence de Rai quand celui ci arriva à son niveau et passa son bras sous son épaule ce qui la fit sursauter. L’air choquée, sa tête pivota vers lui et elle le dévisagea un moment. Il lui fallut du temps pour réaliser et procéder à son interruption. Toujours perdue, elle ne se rendit même pas compte qu’il l’entrainait déjà avec elle vers la maison. Quand enfin son esprit se remit en marche et qu’elle comprit la situation, son premier réflexe fut presque de le repousser mais elle se ravisa. Il fallait montrer bonne figure devant les autres… Ne rien laisser paraitre de leur précédente dispute, de la fêlure qui s'était créée aujourd’hui et qui menaçait leur couple. Pourtant, l’ex Leone avait envie de se dégager de sa prise, de lui dire de ne pas agir aussi doucement avec elle, qu’elle était certes dans un sale état mais qu’elle tenait debout comme une grande fille, qu’elle n’avait pas besoin qu’il la protège. Surtout pas… Car cela baissait toutes les barrières qu’elle avait érigé pendant des heures contre lui.

A son contact et au fil des secondes elle se sentait faillir. Elle avait besoin de lui, de s’appuyer sur lui, contre lui, de trouver refuge dans ses bras de nouveau. La monstrueuse colère qui l’avait aveuglée quelques minutes plus tôt était déjà loin, complètement anéantie par le brun et son extraordinaire don de la calmer… Silencieuse comme une enfant elle se laissa faire et se plaça en rôle de spectatrice. Quand Rai la lâcha pour répondre à ses acolytes, ses yeux trouvèrent le sol un instant. Elle ne voulait pas. Inconsciemment elle voyait à quel point ce geste anodin représentait déjà beaucoup.. Quand bien même elle voulait paraitre forte et clamer qu’elle n’avait pas besoin d’aide. Toujours dans le souci de maintenir les apparences, elle releva bien vite les yeux et suivit la scène qui se déroulait devant leur appartement. Elle savait qu’elle n’avait pas à intervenir, à vrai dire la force lui manquait. Ils pouvaient tous aller au diable, surtout Aria. Ils avaient déjà été suffisamment problématiques et détestables pour une première rencontre. Aussi, elle apprécia quelque peu leur air penaud face à l’énervement de Rai. Elle même se sentit presque toute petite soudainement face au comportement du noiraud. Jamais elle ne l’avait entendu parler ainsi, jamais elle n’avait eu aussi peur qu’il mette ses menaces à exécution et en vienne aux mains. Ca ne lui ressemblait pas… Ses yeux se posèrent sur lui tandis qu’elle s’interrogeait. Il était fatiguée, elle le voyait. Il était à bout et excédé que d’autres problèmes se profilent. Discrètement et instinctivement elle attrapa son haut pour lui signifier de rester calme. Puis elle le lâcha, il n’avait surement pas remarqué et ça ne l’arrêterait pas. Lui aussi était un grand garçon, il n’avait pas besoin qu’on le materne…

Tandis qu’elle prenait appui sur le quadrant de la porte, elle assimilait les échanges et les prénoms… Prenait des notes de toutes les informations qui s’échappaient à l’instant. Ils étaient donc tous sous les ordres de Rai de ce qu’elle comprenait. L’existence d’un second apparut et elle se sentit bien bête de ne pas s’en être douté avant… Néanmoins cela expliquait que les trois autres écoutaient ses interventions docilement. Un énorme soulagement naquit dans sa poitrine également, Aria n’était qu’une petite frappe… Elle aurait pu être la seconde de Rai maintenant qu’elle y pensait mais par chance, ou plutôt par pragmatisme vu son caractère, ce n’était pas le cas. Toujours aussi silencieusement elle les écouta, restant surprise du détachement dont faisait preuve Rai par rapport à ses subordonnés. Puis elle comprit. Il n’avait pas choisit cette situation… Il n’avait fait que subir la hiérarchie des familles mafieuses et des Auditore dans ce cas précis. Il était un loup solitaire mais un haut gradé, les deux étant rarement compatibles, il n’avait pas eu le choix d’avoir ces quatre crétins dans ses pattes… Ou du moins Aria. La remarque de cette dernière d’ailleurs à son encontre ne l’étonna guère. Elle s’attendait déjà à en recevoir une myriade. Malgré la dévotion qu’elle semblait porter à Rai, sa haine envers la blonde n’allait pas disparaitre par l’apparition de son dieu vivant. Un léger bruit agacé s’échappa d’ailleurs de ses lèvres quand elle clama haut et fort son adoration pour le gardien du désert. Comptait-elle oser lui faire une déclaration des plus enflammée en sa présence également ? Dès le premier coup et les premiers mots qu’elle lui avait adressé au parc, Mizeria avait décrété qu’elle devrait s’occuper de son cas un jour ou l’autre. A vrai dire, elle avait intérêt à le faire. Elle doutait qu’Aria l’ignore par la suite soudainement ou la laisse vivre en paix. Leur confrontation n’était qu’une première, et elle savait qu’elle risquait d’en essuyer d’autres voir qu'elle aurait à éviter des sales coups.

Le temps lui parut long et pourtant ils ne s’expliquaient que depuis quelques minutes. Rai les somma de repartir tandis qu’il lui semblait qu’ils partaient tous au ralenti. Ils n’avaient pas l’air enclins à le faire, c’était presque comme s’ils espéraient que Rai allait les retenir au dernier moment. Comme s’il allait les inviter à rester de bon coeur avec eux. Mais le noiraud n’en fit évidemment rien, tout comme elle il semblait pressé de les voir disparaitre. Aria s’attarda néanmoins comme c’était à prévoir. Mizeria la regarda poser ses yeux sur Rai et se tendit tant et si bien que quand cela fut à son tour elle lui lança un regard noir. Aucun mot ne fut prononcé mais les deux jeunes femmes se comprirent et se jurèrent intérieurement de reprendre leur match plus tard… Aria voulait sa mort et Mizeria n’avait pas dit son dernier mot… Encore moins rendu tous les coups qu’elle avait encaissé même si elle avait bien amoché le nez de la brune.

Son regard resta braqué sur leurs silhouettes jusqu’à que Rai referme la porte et qu’elle rentre à l’intérieur. Enfin… Après tant de rebondissements ils étaient finalement chez eux et seuls. Pas de subordonnés Leone ou Auditore pour faire une interruption. Sans s’en rendre compte elle en souffla longuement. Elle ne s’était pas rendue compte à quel point elle s’était tendue et qu’elle en avait retenu son souffle. Ses épaules s’affaissèrent et un petit rire nerveux s’échappa de ses lèvres comme si tout était normal.

« Tu as un sacré fan club… »


Elle avait parlé sans réfléchir, et elle s’en mordit les doigts, ou du moins subtilement la lèvre en vrai. Rien n’était plus normal… Pourquoi diable avait-elle oublié ça l’espace d’un instant ? Tout comme elle avait oublié qu’elle ne voulait plus regarder Rai. Et pourtant.. Son regard était braqué sur lui, sur son visage, sur lui tout entier et tout ce qu’elle pouvait aimer chez lui. Elle le fixa longtemps, comme soudainement hypnotisée ou dans un état second. Il n’était plus question de l’ignorer ou de s’énerver contre lui. C’était tout bonnement impossible. Son regard plongea dans le sien et son coeur manqua un battement. Elle avait besoin de lui, là maintenant, et même à jamais. Une fois de plus, elle avait envie d’occulter tout ce qui s’était passé et de se jeter dans ses bras, de l’embrasser le plus fougueusement possible. Elle l’aimait, comme aux premiers jours. Le moindre trait ou souffle du brun suffisaient à réveiller cet amour. Combien de fois avait-elle passé ses doigts dans ses cheveux ou sur son visage en lui murmurant qu’elle l’aimait ? Combien de fois lui avait-il répondu en la couvrant de baisers ? Peut-être que s’ils oubliaient les promesses de mort et effaçaient celles ci par des « je t’aime » tout s’effacerait, les choses pourraient rentrer dans l’ordre. Ses lèvres s’ouvrirent lentement, prêtes à tenter le coup… Avant de se refermer sans qu’aucun son ne sorte. Elle ne pouvait plus le dire, elle avait trop peur. Elle le revoyait quelques heures plus tôt, animé d’une colère froide, prêt à se débarrasser d’elle. Aucun mot d’amour ne pouvait gommer ce souvenir douloureux. Il n’y avait donc rien à ajouter à ça… Lui même à ses yeux paraissait de cet avis. Les derniers mots qu’il lui avait adressé étaient son funeste projet à son encontre, sa conviction de la tuer si elle lui barrait la route. A ce souvenir son corps aurait du le repousser de plus belle, mais pourtant c’était tout l’inverse qui se produisait. Alors que la fatidique dernière phrase de Rai résonnait de nouveau dans sa tête, elle se rendait compte que son corps tout entier était déjà tourné vers lui, prêt à retrouver le sien et l’épouser. C’était comme si elle préparait une chute en avant, tout son centre de gravité était attiré vers Rai, son poids désormais placé à l’avant de ses pieds. Elle n’avait qu’un léger pas à faire et elle basculait sur lui, ou plutôt se jetait contre lui, au creux de ses bras comme elle le désirait tant. Elle n’en fit rien. Une fois de plus elle baissa amèrement les yeux et prit la direction opposée.

« Je.. J’ai besoin d’une douche… »

Se maudissant pour son tressaillement, ses jambes bougèrent enfin et prirent la direction de la salle de bain. Elles ne vacillèrent pas et, dignement l’ex Leone s’en alla de nouveau. Même s’il lui fallait en réalité surtout fuir. Elle se sentait trop faible face à Rai, véritablement comme une enfant. Et il n’avait pas besoin de ça, il n’avait pas besoin d’elle. C’est ce qu’elle essayait de se répéter quittes à s’enfoncer elle même un couteau dans le coeur. Péniblement au fil de ses pas, elle entra dans la salle de bain et tourna le robinet du lavabo dans la foulée pour enlever le plus gros du sang sur son visage. Elle prit appui sur la vasque et se regarda enfin dans le miroir. Ce n’était pas catastrophique mais pas non plus de simples égratignures… Aria s’était fait plaisir, cette pourriture-ci aurait certainement au moins cette satisfaction ce soir avant de s’endormir. Elle observa les dégâts dans la glace sous toutes les coutures avant de se regarder globalement. Sa propre image quelques heures auparavant lui fut renvoyée et elle ne pouvait nier qu’il ne s’agissait plus de la même Mizeria… Elle n’avait plus rien de la jeune femme souriante et nerveuse dans la glace, pressée de sortir, apprêtée et soucieuse du moindre détail allant de ses cheveux à son maquillage et passant par sa tenue. Désormais elle était là, telle une mauvaise parodie d’elle même. Les habits en vrac, bien loin de son premier aspect soigné, ses cheveux emmêlés par les deux échanges musclés de la journée, sa lèvre et son arcade ouvertes donnant la seule touche de couleur carmin à sa peau. Elle était presque livide, les yeux encore un peu bouffis de toutes ces heures à pleurer… Et son regard était vide, privé de toute étincelle de joie. Le constat était sans appel, elle n’était plus que l’ombre d’elle même et ce seulement en une journée. Si les larmes lui montèrent aux yeux, elle les réprima. Elle savait que le moindre sanglot n’était pas permis et ne lui rendrait pas service, elle avait également l’impression que sa tête en exploserait. Ce décalage entre son reflet du matin et celui actuel l’écoeura si puissamment qu’elle en baissa les yeux pour regarder l’eau couler. Machinalement elle leva le poing pour l’abattre de nouveau sous le joug de la colère mais elle se ravisa au dernier moment… Cela ne servait à rien, elle avait déjà essayé. La taille de sa main et la douleur dans ses côtes la rappelèrent à l’ordre. Fracasser des choses n’allait pas gommer cette journée, encore moins effacer ses aveux à Rai, la présence des Leone puis des Auditore, et pour finir les mots qui avaient pu être échangés entre les deux amants. Elle avait pourtant envie qu’on la réveille, qu’on lui dise que tout cela n’était qu’un mauvais rêve. A bien regarder, frapper dans tout ce qui pouvait lui tomber sous la main et se battre contre Aria rejoignaient ce principe… Une version plus douloureuse et exutoire d’un pincement pour vérifier l’état du rêveur. Mais malheureusement elle était toujours là, rien n’était un rêve..

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Rai Nagafuse
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MessageSujet: Re: What do I do because of you ?    What do I do because of you ?  EmptyJeu 28 Jan - 12:48



Dans les yeux de la vérité.
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-Ouais... je suppose. Désolé pour ça.

Il ne parvint ni à se faire plus explicite, ni à faire montre d'esprit ou d'ironie. Toute l'agitation qui avait pu leur permettre de se réunir ne pouvait pas effacer les circonstances chaotiques au sein desquelles ils s'étaient séparés... Mais Rai ne pouvait pas ignorer non plus qu'elle venait de passer un sale quart d'heure par sa faute. Si leur confrontation n'avait pas été aussi sèche, s'il avait choisi de tout tenter pour calmer leurs ardeurs à tous les deux ou s'il avait été davantage dissuasif du point de vue des Auditores, rien de tout ceci n'aurait eu lieu. La jeune Leone, en tout cas, n'aurait pas à affiche de nouvelles blessures, de nouvelles plaies qui risquaient encore une fois de pourrir sa vie au cours des jours à venir. Chaque mouvement risquait de lui rappeler cuisamment cette amère rencontre avec les subordonnés de son amant...
Lorsqu'elle entreprit, après un regard échangé en silence et quelques secondes de maladresse et d'inconfort, de s'éloigner à la hâte sous le prétexte salvateur d'une douche à prendre, le noiraud la laissa faire, une fois de plus sans chercher à émettre la moindre objection. Il comprenait qu'elle avait grand besoin de se retrouver seule, une fois de plus, afin de faire le point sur la situation inédite à laquelle ils allaient se trouver confrontés le soir même. A moins qu'ils ne décident de faire bande à part d'un bout à l'autre de la nuit, ils allaient bien devoir tôt ou tard échanger bénignement, comme n'importe quel couple... Ils devaient crever l'abcès. Une bonne fois pour toutes. Le faire éclater, laisser toute la substance purulente qui pourrissait prématurément leur relation s'écouler, repartir sur des bases saines. En définitive, repartir sur de bonnes bases.
Mais cela ne pouvait pas se faire tant que ni l'un ni l'autre n'y étaient totalement prêts.

Avec le rythme des heures et la confrontation tout juste achevée avec Dario, Diego, Tino et Aria, Rai, de son côté, se semblait plus à même d'engager la conversation avec Mizeria sur un ton serein et optimiste. Il n'était pas certain que la conclusion qu'ils érigeraient de concert à toute cette affaire serait idéale, et qu'ils la vivraient dans la joie et la bonne humeur, mais il ne doutait pas du fait que c'était une étape obligée afin de continuer à vivre. De surcroît, il avait pleinement conscience du fait que leurs mots avaient, et de très loin, outrepassés le champ de leurs pensées. Ils étaient l'un comme l'autre tombés regrettablement dans l'outrance et l'abus afin de répondre à ce qu'ils estimaient être des provocations ou de l'obstination préméditée... C'était comme si, pour se préserver eux-mêmes, ils avaient choisi de tirer un portrait particulièrement négatif de leur moitié, de laquelle ils ne pouvaient pourtant pas se résoudre à se séparer. Ils avaient eu un comportement proprement auto-destructeur... Il se réjouissait, dans le fond, que toute cette engueulade n'ait pas dégénéré davantage encore. Le cadre y avait été propice, sans doute, rappelant sans cesse à la demoiselle de modérer ses colères, de les revoir à la baisse, de tirer des leçons de son passé trouble. Mais tout ce qu'ils avaient évité un petit peu plus tôt pouvait encore survenir ; afin d'éviter qu'ils ne retombent l'un comme l'autre dans les mêmes travers nocifs, le noiraud allait avoir un rôle crucial. Celui de relancer une discussion sage et apaisée, et d'y prendre part généreusement, avec toute la sincérité qu'il était capable de témoigner. Cet exercice, il n'y était en aucun cas familier. Il le redoutait, même, d'une certaine manière... mais il était allé trop loin. Il avait dévoilé à Mizeria ce qu'il avait jusqu'à présent souhaité lui cacher, par pudeur, par sécurité, afin d'éviter précisément que tout ne manque de dégénérer : maintenant qu'il était trop tard pour faire marche arrière, il allait devoir se rattraper en terminant le travail. Avec méthode, rigueur et calme, il allait avoir le même devoir de transparence que sa chère et tendre, celui-là même dont elle s'était acquitté en lui livrant spontanément le récit tragique de la disparition de sa famille, conclus par le suicide de son paternel, tourmenté par tout ce qui l'avait abattu successivement.

Mais il savait que toutes les larmes entre eux ne seraient pas épongées en une seule soirée. Ils allaient avoir besoin de temps pour rebâtir les fondations de leur couple, qu'ils avaient si sévèrement ébranlées... Du temps, et du courage. Du dévouement. Ils allaient devoir, en somme, se forcer à écouter l'autre. Lui donner suffisamment de place pour penser à l'après, à son rôle, à ses rêves, à ses devoirs... Ils n'arriveraient à rien s'ils empiétaient sur les plates bandes de leur moitié.

D'un pas lent, le noiraud s'en retourna s'asseoir dans le fauteuil où il avait manqué de s'assoupir un petit peu plus tôt, avant l'arrivée de Mizeria et de son escorte antipathique. Il s'y vautra de tout son long, orienta son regard vers le plafond et s'autorisa un soupir sincère, de lassitude et de nostalgie. Il essayait de se convaincre que tout ce drame était survenu pour une bonne raison, et que s'ils parvenaient à le surmonter, rien ne pourrait plus jamais menacer de les éloigner l'un de l'autre... mais, pour autant, il avait du mal à s'en réjouir. Au-delà de cela, il estimait que ces souvenirs doux qu'il cultivait encore des jours passés innocemment à échanger avec sa belle étaient tout ce qui lui était arrivé de positif depuis la mort de ses parents, d'une façon claire, désintéressée et objective. Rai songea en silence qu'il aurait aimé en profiter davantage avant de se secouer légèrement, soucieux de ne pas retomber dans une léthargie qui risquait fort de leur nuire. Ils devaient prendre le taureau par les cornes, pour progresser de concert dans la bonne direction.
Avec autant d'énergie que possible, il se redressa et prit une posture plus noble sur ce fauteuil décidément trop confortable ; il plaça ses avant-bras sur les accoudoirs, croisa les jambes, et entreprit d'attendre le retour de sa chère et tendre. Ses yeux, quant à eux, se baladèrent sur la table basse qui lui faisait face... et sur laquelle se trouvaient deux objets anodins en apparence, lourds de sens pour cet éternel expatrié.
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MessageSujet: Re: What do I do because of you ?    What do I do because of you ?  EmptyMer 23 Juin - 23:56

What do I do with you?
I look at you and I think of you even more


Elle l’avait donc abandonné pour se rendre sous la douche. La jeune femme y passa un long moment, si long qu’elle en oublia le temps qui passait. Combien de minutes avait-elle déjà perdu à se regarder dans la glace puis à rester à contempler l’eau couler quand son propre reflet avait fini par l’écœurer et lui rappeler cette horrible journée ? Les minutes avaient défilé et rien n’avait changé, ses envies d’hurler et de tout casser étaient toujours présentes. Le seul changement qui s’était opéré dans cette salle de bain était l’emplacement de la jeune femme. Elle avait fini par se dévêtir, lançant ses vêtements froissés et éclaboussé de quelques taches de sang et de terre dans un coin de la place, pour se réchauffer sous l’eau bouillante de la douche. L’ex-Leone était là, bercée par l’eau, comme collée à la paroi et regardant l’eau s’écouler. Par moment elle réprimait une nouvelle crise de larmes en fermant les yeux quelques secondes, puis elle finissait par se rappeler qu’elle n’en avait plus et qu’elle avait l’impression que son crâne allait finir par exploser ou se scinder en deux. Son cerveau ne semblait plus vouloir fonctionner non plus, elle essayait de remettre ses idées en place mais c’était sans succès. Les frais souvenirs de l’après-midi n’arrivaient même pas à lui revenir en entier, seulement quelques brides venaient la torturer par moments, tels des flashs devant ses yeux. Comment avaient-ils pu en arriver là ? Il n’y avait rien à mettre sur le compte de la fatigue ou du stress cette fois ci. Ils n’avaient pas eu à affronter un fou furieux comme Méphisto aujourd’hui, et ils étaient en convalescence depuis suffisamment longtemps pour être reposés. Était-ce au final la réalité de leur relation qui les avaient rattrapés aujourd’hui ? Avaient-ils été aveuglés des mois durant à force de traverser épreuves après épreuves ? Plus elle y pensait, plus le constat était poignant. Jamais ils n’avaient réellement eu de répit, le calme avait toujours été de courte durée… Et à bien réfléchir, cette fois ci n’échappait pas à la règle non plus. La blonde avait à peine enlevé son bandage ce matin qu’elle finissait par recevoir la visite des Leone après les avoir quittés quelques jours plus tôt… Et comme une seule altercation ne suffisait pas, il avait fallu que les Auditore y mettent leur grain de sel. Elle avait envie de tout plaquer. C’était à croire que l’univers tout entier leur en voulait et ne souhaitait pas qu’ils puissent vivre normalement… Ou peut-être plus simplement qu’ils ne vivent pas normalement ensemble. Et si le destin souhaitait leur faire comprendre qu’ils n’avaient rien à faire l’un avec l’autre ? Les événements et les coups du sort avaient toujours été en leur défaveur… A chaque fois le couple avait su se relever de plus belle et lutter ensemble mais la question qui taraudait Mizeria à l’heure actuelle était : Pourquoi exactement ?

« Je te tuerais… »

La blonde réprima une grimace à ce souvenir… Ils s’étaient battus ensemble certes, mais c’était peut-être ce qu’elle avait voulu croire ou voir. Ses mots l’avaient lacérée au plus profond de son être. Quelque chose s’était brisé. Les douleurs physiques dont elle avait eu à souffrir jusqu’à aujourd’hui et toute l’angoisse qu’elle avait éprouvée depuis qu’elle l’avait rencontré ne paraissaient être en rien en comparaison.
Un rire nerveux et épuisé s’échappa de ses lèvres et elle s’attrapa la tête avant de glisser le long de la paroi. Elle maudissait cet idiot de destin… Elle n’y comprenait plus rien. Qu’avait-elle fait pour mériter ça ? N’avait-elle pas déjà assez subi depuis son enfance ? N’avait-elle au final rien espéré et ne s’était-elle pas laissée justement surprendre par sa relation avec Rai ? N’avait-elle pas tout donné pour se battre pour leur histoire ? Pour lui ? Ne l’avait-elle pas aimé assez finalement ? Et pourtant… Elle avait envie que tout s’arrête désormais, surtout que le destin arrête de lui mettre des bâtons dans les roues. Elle n’avait jamais eu une ambition monstre, tout comme elle n’avait pas prié tous les soirs pour avoir quelqu’un à ses côtés qui l’aimerait indéfiniment… La jeune femme avait souhaité simplement vivre après la perte de sa famille. Tout simplement. Puis soudainement ce fichu destin avait mis Rai sur sa route et semblait vouloir changer la donne, la faire espérer à mieux, la faire rêver… Pour finalement tout lui arracher de plus belle. Et quelle meilleure ironie que tout s’effondre ici même, dans cette même ville où elle avait déjà tout perdu, où elle avait souhaité que tout s’arrête il y a bien longtemps… Jusqu’à quand la vie comptait-elle la tester ? Elle ne voulait plus jouer, elle ne voulait plus rien….

Les minutes passèrent de plus belle jusqu’à que l’eau finisse par en devenir froide. Elle ne bougea que quand cela devint insupportable et qu’elle sentit son corps se raidir davantage. Péniblement, la jeune femme se releva, coupa l’eau et s’extirpa de la douche… Le miroir n’en était même plus embué, elle se jeta un dernier coup d’œil dans le miroir. Sa peau était blafarde, seulement colorée par des trainées bleutées sur ses côtes et quelques autres taches de ça et là … Elle devait reprendre de la contenance. Son état n’était que preuve qu’elle avait baissé les bras. Aria était forte mais en temps normal elle n’aurait pas eu autant l’ascendant. Elle en était donc arrivée à ce point, à se laisser cogner, incapable d’avoir la moindre volonté et rage de vivre. L’ombre d’elle-même… Une telle ombre que quand son regard se tourna vers la porte elle se rendit compte qu’elle craignait désormais de sortir de la salle de bain. Elle ne voulait pas confronter Rai… Et pourtant. Ils étaient coincés tous les deux ici. Leur situation ne leur permettait pas de s’éloigner, encore moins à Mizeria de rentrer auprès des siens. Elle faisait partie des Auditore désormais, elle pouvait recueillir des informations au maximum… Quelle idée lui avait pris ? Soudainement elle réalisa de plus belle que peut être elle ne reverrait jamais les siens. Les chances qu’elle meure en tant qu’Auditore avaient drastiquement augmentées aujourd’hui. La blondinette n’avait déjà pas été très sereine depuis qu’elle avait pris cette décision. Son instinct lui avait crié à maintes reprises qu’elle fonçait dans un mur, ses rêves les plus abominables n’avaient fait que renforcer son appréhension. Combien de nuits avait-elle passé à rêver d’un Rai ensanglanté et sur le point de mourir lui rappelant que tout était de sa faute. A l’heure actuelle elle en voulait au brun mais l’idée que ses rêves finissent par réellement se réaliser la tétanisait toujours. Elle ne souhaitait pas sa mort, puis la sienne arriverait au final suffisamment tôt et très certainement avant celle de son cher et tendre. Par sa main d’ailleurs ou par celle des Auditore, ou encore par Méphisto… Désespérée, ses yeux se perdirent dans le vide. Tout était vain mais elle n’avait plus aucun choix. Ou si tout du moins, il en persistait un : couper ses émotions et agir machinalement. Demain était un autre jour, et ici celui où elle devrait se renfermer et reprendre un rôle monté de toute pièce pour mieux espionner, pour remplir son devoir, pour utiliser ses talents à dénicher des informations. Il ne lui restait plus que ça. Mais cela attendrait demain, elle n’avait pas la force de commencer tout de suite.

La blonde se sécha grossièrement, se moquant bien d’avoir encore les cheveux trempés et se traina enfin hors de la salle de bain. Le changement de température lui arracha une grimace tandis qu’elle se tendait par réflexe et sentait ses côtes et ses contusions appréciant moyennement cette agression. Elle se traina de nouveau jusqu’à la chambre, tachant de ne pas regarder le lit, de ne pas réfléchir encore et encore, et de ne surtout pas penser à Rai. Après avoir tiré quelques affaires de sa valise, elle enfila un t-shirt des plus larges et récupéra le reste de ses affaires. Son esprit bouillonnait malgré tout. Où pouvait-elle aller ? Nulle part. L’idée de s’allonger ne lui disait guère même si ça ne lui aurait pas fait du mal et permettrait à son corps de s’octroyer un peu de récupération.

Pour le reste, elle n’était pas dupe elle n’arriverait pas à trouver le sommeil. Le seul moyen serait encore de l’assommer. Peut-être aurait-elle mieux fait de provoquer d’avantage Aria quittes à en subir une commotion cérébrale. Elle sortit enfin de la chambre en songeant encore à leur altercation, elle avait réussi à amocher le nez de l’autre mafieuse mais elle ne s’en sortait clairement pas mieux et ça l’énervait. Ce sentiment d’être pitoyable et misérable, faible et contrainte à subir la situation alors qu’elle avait fait de son mieux. Son regard se posa sur la lumière du salon qu’elle apercevait au loin. En parlant de subir la situation… Un soupir s’échappa de ses lèvres et elle tacha de taire ses pensées et agir machinalement. Un pas. C’est tout ce qu’elle réussit à faire… Son cœur se serrait de nouveau et ça la paniqua. Cette fois-ci, sur le coup de l’impulsivité, elle retourna vers ses affaires pour en sortir sa boite animale, elle enflamma sa bague et en fit sortir son loup. La boule blanche lui fit face et ils restèrent quelques secondes à se fixer mutuellement avant que ses doigts viennent quérir son pelage. Szerelem… « Aimer ». Quelle foutue connerie de son mentor de le nommer ainsi pour lui rappeler la ligne de conduite à suivre. Elle l’avait fait et le constat n’était pas fameux après cette journée mouvementée. Mais lui n’y pouvait rien, son loup n’était pas son animal de compagnie mais c’était son fidèle ami depuis tant d’années et tant d’épreuves… Le voir lui permettait déjà de se calmer et de reprendre un semblant de force. Il allait lui en falloir, elle n’allait pas pouvoir rester cachée au fin fond de la maison pendant des jours et des jours. Sans faire un geste, l’ancienne Leone se redressa et reprit son chemin initial talonnée de près par son ami à quatre pattes. Il n’était nullement question d’avoir un moyen de dissuasion vis-à-vis de Rai, c’était simplement pour avoir un soutien et un semblant de stabilité à ses côtés. Elle se concentra sur les pas de son loup en même temps qu’elle avançait, que ses propres pieds se rapprochaient du salon, et ce jusqu’à qu’elle arrive à l’encadrement de la pièce. Son cœur parti pour flancher de nouveau en se remémorant le matin. Elle avait été là, au même endroit, émerveillée et heureuse, se ruant sur Rai la seconde d’après… Et ce soir, en une tout autre seconde elle tournait les talons pour aller dans la cuisine, le cœur lourd et serré. La bestiole la suivit avec un air dubitatif. Mizeria ouvrit le frigo et y jeta un coup d’œil tout aussi las qu’avant, puis elle le referma et prit plutôt le parti d’aller vers un coffre. Elle l’ouvrit et y jeta un rapide coup d’œil avant d’en sortir une bouteille de whisky. C’était au moins ça qu’il lui fallait, un bon verre pour digérer la journée, pour avoir quelque chose de fort mais souhaité cette fois ci. Voir même plus qu’un verre. Elle en prit un avec quelques glaçons et se servit avant de jeter un coup d’œil à la bouteille, et de finalement partir avec les deux non sans prendre déjà deux bonnes gorgées avant de réapparaitre dans le salon.

Elle n’accorda aucun regard à Rai, elle se déplaça avec calme et contenance, comme si elle n’était qu’un fantôme de passage. Elle attrapa son sac et se dirigea vers la cheminée où brulait un feu. Toujours aussi effacée, elle prit place devant cette dernière, dos à Rai, en tailleur, son sac devant elle près de la bouteille qu’elle venait de poser et son verre à la main. Szerelem s’installa à ses côtés, bien content pour sa part de se chauffer également. Elle ignorait si elle avait aussi froid à cause de la douche, de ses cheveux encore trempés, d’avoir trainé des heures dehors ou simplement à cause de tout ce qu’il s’était passé. Le feu était dans tous les cas salvateur et réconfortant, pour le reste les gorgées de whisky se chargeaient de lui réchauffer les entrailles. Elle grimaçait juste quelques fois quand de malencontreuses gouttes d’alcool atterrissaient sur sa contusion à la lèvre. Ca ne l’empêcha pas de descendre son verre et de s’en resservir un. Pour marquer enfin une pause dans son étrange soif, elle ouvrit son sac et en sortit l’anneau qu’elle avait récupéré quelques heures plus tôt. Elle prit également une chaine qu’elle avait récupéré dans sa valise et la glissa dans l’anneau de ce dernier. Une fois son entreprise accomplie, elle reprit de bon cœur son verre et ce qu’elle faisait. Elle ignorait ce qu’elle pouvait faire d’autre à vrai dire. Les gorgées ne lui apportaient pas de réponses, et pourtant elles se succédaient tandis que la jeune femme fixait l’anneau dans sa main. Même si tout était préparé, elle n’avait jamais songé en avoir réellement besoin… Un anneau d’un rang plus haut que le sien habituel. Au cas où…. Si jamais les Leone ne pouvaient plus l’aider, si elle avait à accomplir une sorte de mission suicide et avoir une assurance de tenir le coup. Son instinct était peut-être couplé à des dons de médiums pour qu’il l’ait poussée à faire cette acquisition et la garder cachée. Szerelem s’étira, lui au summum de sa forme et semblant à l’aise près du feu. Elle ignorait comment il faisait… Elle en était incapable. Elle avait envie de s’écrouler là, de disparaitre dans ce feu pour se réveiller de ce mauvais rêve. Elle porta le verre à son arcade et y prit appui, cette fois ci soulagée par la fraicheur qu’il dégageait pour son arcade meurtrie et la migraine qu’elle sentait poindre. Ses pensées étaient à l’arrêt, incapables de remettre de l’ordre dans son esprit, braquées sur les sensations qu’elle ressentait autour d’elle, ce contraste de chaleur et de froid. Son cœur quant à lui semblait aussi nager entre ces deux états alors qu’elle fermait les yeux un instant pour ne plus se concentrer sur rien d’autre. Trop d’amour et de tristesse en un jour, du réconfort puis du vide. Oui, une impression d’un vide colossal qui était en train de la consumer.


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